Pour la première fois est présenté en vente publique, à Paris chez Sotheby’s, un chef-d’œuvre de la sculpture africaine, réalisé par un artiste Luba (Congo), appelé le « maître de Buli ».
Révélant l’individualité artistique des sculpteurs africains, l’identification des « mains de maîtres » a fait avancer de façon significative la reconnaissance des arts premiers africains, qui ont ainsi accédé au statut d’œuvres d’art. Sorties de l’anonymat, « les œuvres du maître de Buli ont un caractère éminemment emblématique », souligne François Neyt, professeur émérite à l’Université catholique de Louvain (Belgique), dans une longue étude consacrée à cet objet et publiée au catalogue de vente. Collecté par Harry Bombeeck au Congo en 1896 et rapporté en Belgique en 1899, ce siège à cariatide Luba a fait l’objet de publications et de présentation dans plusieurs expositions internationales jusqu’en 1945. Depuis cette date, il n’avait pas été montré au public. Une vingtaine d’œuvres sont attribuées au maître de Buli : porteuses de coupe, effigies d’ancêtres, statuettes, sièges à cariatide et appui-nuque. « L’essentiel du corpus a été collecté entre 1894 et 1909 », précise le chercheur. Les sièges à cariatide cérémoniels sont des objets du pouvoir princier et royal Luba consacrés aux ancêtres. « La présence féminine, évoquant peut-être la mère ou une des épouses du chef ou du roi, est celle qui fait advenir cette présence aux moments importants », explique François Neyt.
Certains de ces trônes pouvaient être remis à de hauts dignitaires de la cour Luba. Parmi les six sièges à cariatide en posture assise sur les talons qui sont référencés, celui-ci est le seul exemplaire en mains privées. Il est d’une excellence plastique : « Le torse penché vers l’avant, le cou incliné, l’eurythmie des bras fléchis et des avant-bras tendus vers le haut, de taille équivalente (environ 15 cm), qui se prolongent par celle des paumes ouvertes et tournées vers l’avant (de même longueur jusqu’à l’auriculaire), les quatre doigts écartés se posant délicatement sur la tablette supérieure du siège, enfin le pouce écarté touchant latéralement le lobe de la coiffure, mettent en valeur l’exceptionnelle majesté de la tête, probablement la plus belle du corpus », écrit François Neyt. Difficile d’évaluer cette œuvre dont l’estimation « sur demande » se chiffre à quelques millions d’euros, avec peut-être un record à la clé pour l’art primitif africain. Selon l’expert Marguerite de Sabran, « le résultat [attendu] ne peut pas être inférieur à trois ou quatre millions d’euros, eu égard aux prix des œuvres les plus importantes passées ces dernières années sur le marché de l’art africain, à savoir le masque Fang de la collection Vérité [adjugé 5,9 millions d’euros le 17 juin 2006 à Paris (SVV Enchères Rive Gauche)] et la tête d’Oba de Benin de la collection de la Albright-Knox Art Gallery [vendue 4,7 millions de dollars (3,3 millions d’euros), le 17 mai 2007 à New York chez Sotheby’s].
-Date : XIXe siècle
-Matériaux : bois dur et lourd
-Dimensions : 51 cm de hauteur, 30,5 cm de diamètre
-Provenance : Harry Bombeeck (1896), conservé dans la famille
-Expert: Marguerite de Sabran
-Estimation : sur demande
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Focus: Le « maître de Buli », Siège à cariatide Luba
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°335 du 19 novembre 2010, avec le titre suivant : Focus: Le « maître de Buli », Siège à cariatide Luba