PARIS
Malgré les réquisitions de non-lieu du Parquet la juge d’instruction a ordonné le renvoi du marchand devant le tribunal.
Mis en examen en mai 2017 pour « contrefaçon par diffusion » (et non par fabrication) et « tromperie sur les qualités substantielles d’une marchandise », le Parquet de Paris avait finalement demandé l'abandon des poursuites à l’encontre du marchand d’art Éric Touchaleaume en novembre de la même année. Mais contre toute attente, fin avril, la juge d’instruction Aude Burési a ordonné le renvoi devant le tribunal correctionnel du marchand et de l’un de ses fournisseurs.
A l'origine du litige, qui dure depuis 10 ans maintenant, une vente du 15 avril 2008 chez Artcurial lors de laquelle Patrick Séguin, Philippe Jousse et François Laffanour achètent deux fauteuils et une table de Jean Prouvé provenant de la collection d’Éric Touchaleaume. Les quatre hommes, qui ont longtemps collaboré ont vu leurs relations se détériorer au fil du temps tandis que la cote de l'architecte ne cessait de grimper. Soupçonnant une éventuelle contrefaçon des lots acquis chez Artcurial, les nouveaux propriétaires portent plainte en 2009.
Après plusieurs expertises dont certaines ont tenté de démontrer qu’une photographie d’un des meubles n’était qu’un photomontage et que la lettre reproduite aux côtés de ce lot, datée de 1958 et soi-disant envoyée par Prouvé était également fausse, l’affaire traîne en longueur jusqu’à ce que la juge Aude Burési entre en scène en 2016. Elle nomme un expert judiciaire qui remet son rapport en juin de la même année. Dans ce rapport, il analyse la composition des métaux utilisés pour les meubles saisis et mène des recherches dans les archives du designer « sans toutefois se prononcer sur la date de leur fabrication ni livrer de conclusion », avait déclaré à l’époque Antoine Vey, l’avocat d’Éric Touchaleaume.
En décembre 2017, le Parquet de Paris a requis un non-lieu à l'encontre du marchand, estimant difficile de se prononcer sur l'authenticité des pièces « en raison de la nature de la production de Jean Prouvé qui se considérait lui-même comme un industriel ». Et même s'il s'avérait qu'il s'agissait de faux, « les investigations n'ont pas établi que le marchand d'art en avait connaissance », indiquait le Ministère public, ajoutant que ses concurrents sont « des professionnels, amateurs de l'œuvre de Prouvé », donc « capables d'apprécier la qualité des meubles » lors de leur acquisition.
Pourtant, Aude Burési a estimé dans son ordonnance de renvoi que le mobilier est « contrefaisant » et a donc décidé de renvoyer Éric Touchaleaume et Abdelhakim Bouadi - son principal fournisseur en mobilier Prouvé - devant le tribunal, notamment pour contrefaçon. « Aujourd’hui, mon client est renvoyé alors que rien n’a établi le défaut d’authenticité des meubles en question. Il est donc toujours présumé innocent », commente Antoine Vey. « La juge s’appuie sur une pseudo-expertise lacunaire et partisane et ne suit pas les réquisitions du parquet malgré l’absence d’éléments nouveaux », souligne Éric Touchaleaume.
La partie défenderesse a formulé un recours contre cette ordonnance de renvoi.
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Éric Touchaleaume renvoyé en correctionnelle
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