Une décision parfaitement absurde d’un tribunal américain a conduit à la mise en vente de 12 000 fausses estampes et sculptures de Salvador Dalí, saisies dans une galerie d’art d’Honolulu par le Service d’inspection de la poste américaine.
HONOLULU - Plus épris d’opportunisme que de bon sens, le tribunal a préféré vendre les 12 000 contrefaçons saisies à Hawaii plutôt que les détruire, dans l’espoir de récupérer une partie des 2 millions de dollars (environ 10 millions de francs) de dommages et intérêts que les directeurs de la galerie n’ont jamais versés, alors qu’ils auraient écoulé pour 100 millions de dollars (500 millions de francs) de faux avant d’être écroués. Les vacations se sont tenues en Californie et n’ont recueilli que 350 000 dollars (1,75 million de francs), dans une parodie de vente qui a dispersé à tous vents les faux que les plaignants s’étaient efforcés de retirer du marché !
L’affaire semble incroyable, mais il faut savoir que les œuvres apocryphes n’ont rien d’illicite en soi : l’infraction commence lorsque le vendeur les propose comme des œuvres authentiques. Cette décision était donc fondée du point de vue juridique. Des fonctionnaires zélés ont même pris la peine d’apposer un minuscule avertissement au dos de la plupart des feuilles, mais plus de 1 500 d’entre elles sont restées vierges car elles ne figuraient pas sur l’acte d’accusation. Ces mises en garde disparaissent malheureusement sans peine sous un cadre et peuvent être effacées ; sur les sculptures, il s’agit même de simples papillons détachables…
Virgilia Pancoast, consultant auprès des services d’authentification de l’International Foundation for Art Research et témoin à charge à Honolulu, ne cachait pas sa consternation : "On aurait dû les détruire, car des acheteurs naïfs ou peu éclairés risquent de les acquérir un jour en les prenant pour des originaux. Cette affaire ne fait qu’augmenter la confusion qui règne autour des estampes de Dalí".
1987-1988 Les inspecteurs fédéraux Bob de Muro et Jack Ellis, du Postal Inspection Service, viennent en Europe pour enquêter sur la question des fraudes sur le marché de l’art, après qu’un grand nombre de lithographies suspectes de Dalí aient été mises en vente par le Center Art Gallery de Hawaii.
1993 Les services fédéraux américains et Robert Descharnes, ancien secrétaire de l’artiste et directeur de la société Demart Pro Arte – qui administrait alors les droits d’auteur sur tout l’œuvre de Dalí – intentent à la Center Art Gallery un procès, gagné par la Federal Trade Commission en 1993.
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De faux Dalí échappent au pilon
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°23 du 1 mars 1996, avec le titre suivant : De faux Dalí échappent au pilon