À l’heure où l’activité de production des galeries en est à ses balbutiements, certains artistes entrepreneurs ont déjà pris les devants.
PARIS - Trublion officiel, Fabrice Hybert a créé en 1994 une SARL baptisée UR (Unlimited Responsability). « L’idée d’entreprise a germé vers 1990. J’ai voulu faire le plus gros savon du monde. Mon marchand d’alors, Arlogos, ne pouvait pas le gérer. Je suis allé moi-même démarcher les entreprises. Je me suis alors aperçu que cette activité de production de l’œuvre était très riche d’échanges entre les décideurs et les fabricants, les techniciens et les artisans… Les artistes ne veulent plus faire seulement des choses à mettre dans une galerie. La pensée de l’artiste est bien plus grande que celle qu’on a bien voulu lui imposer pendant trente ans », rappelle Hybert. Affichant un chiffre d’affaires de 7 à 8 millions de francs, UR est une structure développant les projets des artistes et des entreprises tout en accompagnant le travail de Fabrice Hybert. Elle est ainsi intervenue pour le tiers du budget du pavillon français à la Biennale de Venise voilà six ans, et pour les deux tiers du projet avec l’arc de Triomphe. Fabrice Hybert a d’ailleurs participé à la mise en place d’un réseau international d’unités de production baptisé Woolways. « Notre idée est de créer d’ici deux ou trois ans un prix de 100 000 euros afin de permettre à un artiste de mener à bien un projet d’envergure », affirme-t-il.
Trois artistes français sont également à l’origine de la société Anna Sanders. Cette société de production de films de long-métrage a été créée en 1997 avec un capital social de 300 000 francs. Elle rassemble quatre actionnaires à parts égales : le Consortium de Dijon présent par l’intermédiaire de l’association Adac (Association de diffusion de l’art contemporain), Pierre Huyghe, Philippe Parreno et Charles de Meaux. « À un moment donné, ces artistes ont eu envie que leurs films soient financés par des structures qui puissent bénéficier des systèmes d’avances de la production cinématographique et d’une diffusion commerciale en dehors du circuit des galeries, ce qui ne peut être le cas que dans le cadre d’une société de production de films », explique Franck Gautherot du Consortium de Dijon.
Depuis sa création, la société a produit cinq courts-métrages et deux longs. Le court-métrage de Charles de Meaux Stanwix, ainsi que le long-métrage Le Pont du tireur, coréalisé par Charles de Meaux et Philippe Parreno, ont tous deux bénéficié d’une diffusion, certes limitée, dans quelques salles de cinéma. Les coûts de production de ces films sont variables. Un court-métrage coûte en moyenne 200 000 francs tandis que ceux de la série des AnnLee peuvent atteindre 400 000 francs. Le dernier long-métrage de Charles de Meaux, intitulé Shimkelt Hotel, a coûté près de 3 millions de francs. La société a rarement coproduit avec des galeries. « Les galeries n’ont pas réussi à inventer des modèles nouveaux. Elles n’ont souvent pas d’argent et il est difficile de les intéresser à la production. Aux États-Unis, les artistes qui travaillent avec des partenaires institutionnels ont des sociétés en nom propre. En France, tout cela est approximatif ou artisanal. Il faudrait des structures du type des bureaux d’études », affirme Franck Gautherot. Anna Sanders, hébergée dans les bâtiments du Consortium à Dijon, envisage de s’établir à Paris, d’ici le printemps prochain.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Artistes entrepreneurs
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°137 du 23 novembre 2001, avec le titre suivant : Artistes entrepreneurs