Pour sa 34e édition, la foire belge d’art contemporain, installée désormais à Tour & Taxis, resserre sa sélection de galeries et tente d’affiner son profil « découverte ».
BRUXELLES - Dans un contexte général tendu à la suite des attentats du 22 mars, Art Brussels ouvre ses portes du 22 au 24 avril. « Nous n’avons eu aucune annulation de galeries. On sent une frilosité de la part de certains collectionneurs étrangers, principalement américains, mais d’autres affirment plus que jamais leur soutien et viendront accompagnés de leurs amis », avait confié précédemment Anne Vierstraete, directrice générale de la foire.
Ce 34e opus a lieu pour la première fois dans un ancien entrepôt de stockage (6 819 m2) de Tour & Taxis, vaste complexe industriel. Tandis que l’attractivité de Bruxelles ne cesse de se confirmer avec notamment l’arrivée de la jeune foire new-yorkaise Independent, qui se tient du 21 au 23 avril rue de l’Écuyer, Katerina Gregos, la directrice artistique, et Anne Vierstraete ont souhaité donner une nouvelle impulsion à Art Brussels. « Nous voulions nous situer plus près des musées et des institutions de la ville. Depuis plusieurs années, les collectionneurs se plaignaient car ils trouvaient le site d’Heysel trop loin du centre et pas très accueillant, précise la première. De plus, nous voulions réduire l’échelle de la foire car le gigantisme actuel des foires d’art contemporain ne sert ni les artistes, ni les galeristes, ni les collectionneurs. Réduire l’échelle d’Art Brussels nous a permis d’affiner notre sélection et d’améliorer sa qualité. » Le déménagement va en effet de pair avec une réduction notoire du nombre de participants. On passe, avec quelques grincements de dents, de 191 à 141 galeries.
La présence écrasante des galeries européennes demeure inchangée (88 % galeries sont européennes, contre 8,5 % d’origine américaine et 3,5 % extra-occidentales), de même que le taux de renouvellement (un tiers de nouveaux entrants). Notons l’arrivée des galeries françaises Laurent Godin et Antoine Laurentin, mais aussi celle de la Pace Gallery, qui, comme Continua, fait un peu figure d’extraterrestre dans le paysage d’une foire qui peine à attirer les grosses enseignes internationales. « Nous avons récemment rencontré de nombreux collectionneurs belges, que ce soit à Art Basel, à Frieze ou à la Fiac. Ce qui nous a motivés à participer à Art Brussels cette année », explique Mollie Dent-Brocklehurst, présidente de Pace London, qui mettra à l’honneur Lee Ufan et Hiroshi Sugimoto. « Art Brussels est un moment très attendu à Bruxelles. Les collectionneurs belges sont très concernés par leur foire », confirme Almine Rech, qui réserve un focus, à côté de ses artistes américains, au jeune artiste suédois d’origine palestinienne Tarik Kiswanson.
En réponse aux critiques sur le manque de lisibilité du parcours de la foire, ses directrices ont voulu « insister sur son profil de découverte tout en clarifiant son parcours pour le visiteur », souligne Anne Vierstraete. La section « Young », qui constituait un entre-deux peu pertinent pour désigner les jeunes galeries, a donc été supprimée, tandis que « Discovery » est élargie à 30 galeries âgées de moins de 8 ans qui proposent des œuvres d’artistes émergents produites entre 2013 et 2016. Ce secteur de l’émergence a un espace à lui, distinct de la section « Prime » réservée à 99 galeries plus établies. Certaines présentent des solo shows, dont celui très attendu de l’artiste palestinien Taysir Batniji avec des pièces inédites chez Éric Dupont (Paris), de Yann Gerstberger chez Sorry We’re Closed (Bruxelles) ou de Noémie Goudal chez Les Filles du Calvaire (Paris).
Redécouvrir l’histoire
La section « Prime » peut aussi recouper la section « Rediscovery » réservée aux oubliés de l’histoire. « Nous souffrons d’une terrible amnésie culturelle. Avec “Rediscovery”, le profil de découverte d’Art Brussels s’affirme plus historique. Dans cette section figurent des artistes qui ont compté au XXe siècle, qui ont eu des liens très forts avec les avant-gardes historiques, mais qui ont été oubliés », souligne Katerina Gregos. Ainsi de Boris Lurie, fondateur très controversé du mouvement d’avant-garde NO !art, présenté chez Odile Ouizeman (Paris), ou d’Eduardo Terrazas, un acteur majeur de la scène mexicaine mais méconnu, chez Timothy Taylor (Londres).
« Art Brussels permet de prendre plus de risques que d’autres grandes foires », confie Philippe Valentin (Chez Valentin, Paris), qui expose à côté de Jean-Baptiste Bernardet, artiste belge qui a le vent en poupe, des artistes méconnus comme Antoine Donzeaud. « Le rythme de démarrage est toujours un peu lent mais les gens ont plus de disponibilité pour regarder. » Même enthousiasme chez Michel Rein (Paris), qui propose un stand très français avec Anne-Marie Schneider, Franck Scurti, Raphaël Zarka, mais aussi la Belge Sophie Whettnall : « Au départ, nous étions une galerie parisienne qui venait faire la foire. Depuis deux ans, nous avons une antenne bruxelloise, nous sommes chez nous. On connaît bien les collectionneurs belges. Les choses vont à un rythme qui me plaît. »
Direction artistique : Katerina Gregos
Nombre d’exposants : 141
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Art Brussels déménage
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Abonnez-vous dès 1 €Du 22 au 24 avril, Tour & Taxis, avenue du Port 86C, Bruxelles, 11h-19h, www.artbrussels.com
Légende photo
Taysir Batniji, Sans titre (détail), 2015, ceinture de munitions, crayons, dimensions variables. Courtesy galerie Eric Dupont, Paris.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°455 du 15 avril 2016, avec le titre suivant : Art Brussels déménage