MIAMI / ETATS-UNIS
La 16e édition de la foire d’art contemporain, qui s’est tenue du 6 au 10 décembre, a confirmé sa première place sur le marché américain, avec une qualité de contenu qui va crescendo d’année en année.
Miami Beach (Floride). Avec 268 galeries venues de 32 pays, ce millésime donnait raison à Noah Horowitz, son directeur : « L’an passé a été difficile avec la crise Zika, et quelques semaines seulement après les élections, en pleine protestation politique. Mais Miami reste un carrefour de l’art entre les États-Unis et l’Amérique latine. Beaucoup de New-Yorkais y ont une résidence secondaire ou à Palm Beach. La force de la foire est d’attirer de nouveaux collectionneurs. »
Dès l’ouverture des portes du Miami Beach Convention Center (MBCC) en pleins travaux de rénovation, les « top collectors » internationaux et autres VIP des deux Amériques et d’ailleurs étaient au dernier rendez-vous glamour et « people » de l’année. « Dress code » balnéaire et ambiance jet-set. Leonardo di Caprio s’attardait chez Gagosian, non loin de Dasha Zhukova et Jorge M. Pérez. À Miami comme à Hong Kong, la relève est à l’œuvre. Les nouvelles fortunes de la Silicon Valley, entre autres, achètent tous azimuts. « C’est une des meilleures éditions que j’ai vue ces dernières années, avec beaucoup de peinture », confiait le peintre Chuck Close.
Plusieurs enseignes « blue-chip » faisaient part de ventes très fortes dès les premières heures. Paula Cooper exposait un exceptionnel ensemble de gouaches sur papier de Sol LeWitt, 100 Cubes (1991), acquis par une fondation française (entre 1 et 1,5 M$). Hauser & Wirth s’est défait d’un Bruce Nauman (1989) pour 9,5 millions de dollars à destination d’un collectionneur chinois. Autres mastodontes du marché, Gagosian et Zwirner avaient cédé des pièces autour ou au-dessus d’1 million de dollars. Un Yoshitomo Nara (2012) est parti à 2,9 millions de dollars chez Pace, un Soulages (1966) à 1 million d’euros chez Applicat Prazan. Thaddaeus Ropac a vendu le deuxième jour un James Rosenquist (1961) pour 2,7 millions d’euros, un John Chamberlain (1979) à 1,35 million d’euros ; Michael Werner un Sigmar Polke (1988) pour 1,5 million de dollars ; Eva Presenhuber un Ugo Rondinone (2013) pour 1,2 million de dollars.
Art Basel, un label inégalé
En seize ans d’existence, la foire a acquis un très haut niveau qualitatif. Malgré la vigilance du comité de sélection, quelques accrochages un peu fourre-tout subsistent. Le bon goût étant la chose du monde la mieux partagée, un certain public reste client d’un style « flashy ». Ce travers « paillettes » a cependant quasiment disparu à ABMB, pour mieux faire florès à Art Miami, devenue son incarnation. La marque Art Basel, première foire globalisée, reste un label inégalé. Tous les galeristes rêvent d’y être ; les collectionneurs sont assurés d’y trouver la fine fleur des enseignes internationales. « Cette foire est importante tant en termes d’image que pour la promotion des artistes, confiait Nathalie Obadia, à sa sixième participation. Quant aux ventes, cela dépend des années mais, sur le moyen terme, c’est toujours positif. Cela nous permet de retrouver les collectionneurs américains et les musées à qui l’on vend régulièrement. » Cette année, des œuvres récentes de Shahpour Pouyan au Musée de la Cornell University, pour un peu moins de 100 000 euros. Il y a trois ans, la galerie a vendu un Martin Barré au Art Institute de Chicago. « Miami compte des collections de qualité, qui parlent d’une vision américaine, différente de l’européenne, soulignait quant à elle Chantal Crousel. C’est cette découverte d’un autre point de vue qui est intéressante. Cela nous apprend aussi des choses, cela va dans les deux sens. Beaucoup de bonnes galeries d’Amérique latine sont là. C’est un peu la spécificité. »
Le secteur Survey donnait ainsi à voir le peintre chilien Roberto Matta (Robilant Voena) ou le Brésilien Wesley Duke Lee (Ricardo Camargo). Étudiant à la Parsons School of Design à New York dans les années 1950, ce dernier y rencontra Marcel Duchamp, Jasper Johns, Robert Rauschenberg et John Cage avant d’exposer à la Biennale de Tokyo en 1965. Pour sa première participation, Ceysson & Bénétière montrait Claude Viallat et Noël Dolla. L’artiste niçois, ravi, avait fait le voyage. Cinquante ans après ses débuts, l’une de ses installations était présentée à Public, le hors-les-murs dans Collins Park. « Cette foire a permis de déclencher des collaborations à venir avec des galeries américaines ainsi que la confirmation d’expositions Supports/Surfaces à venir dans deux musées américains », précisait François Ceysson, se félicitant de ventes rapides dès le vernissage et de confirmations de réservation par la suite : un Étendoir aux serpillières de Dolla (1967) pour 100 000 euros à une collection colombienne, un Filet de Viallat (1972) au Musée de Philadelphie pour 140 000 euros.
Le souffle nouveau se trouvait dans le secteur Nova, dont les 29 galeries présentaient des œuvres récentes. Chez Supportico Lopez, Dara Friedman, dont la première rétrospective au Pérez Art Museum Miami (PAMM) comptait parmi les inaugurations à ne pas manquer. « Cette foire atteint un niveau extrêmement bon en termes de présentation, constatait Philippe Charpentier, directeur de Mor Charpentier. C’était sans doute notre meilleur démarrage. Nous sommes contents quant aux résultats. »
Franc succès pour des pièces fortes
La galerie a elle aussi vendu pour l’essentiel à des contacts américains et latino-américains. « Le climat politique semble avoir un impact sur la venue de nos clients européens. Nous l’avions déjà remarqué à l’Armory Show et à Frieze New York. » Sur son stand, la Mexicaine Teresa Margolles a rencontré un franc succès avec des pièces fortes sur la mémoire des immigrés clandestins latino-américains et sur l’Holocauste. La nouvelle série de pièces uniques de la Brésilienne Rosângela Rennó a également reçu un très bon accueil.
Parmi les plus de 82 000 visiteurs de la foire, collectionneurs, commissaires d’expositions, trustees de musées et institutions ont pu assister aux vernissages du nouvel Institute of Contemporary Art (ICA), du Bass Museum et du CIFO (Cisneros Fontanals Art Foundation). Sans oublier les nouveaux accrochages des collections De la Cruz, Rubell ou Margulies. Les foires satellites, de niveau inégal, étaient cette année encore pléthoriques : Nada, Untitled, Scope, Pulse… Du street art de Wynwood au dîner prestigieux du tycoon de l’immobilier Aby Rosen à The Dutch, en passant par les innombrables soirées – au club Wall de l’hôtel W ou au Prada double club Miami sous la houlette de Carsten Höller – la fête de l’art sous la chaleur tropicale semblait sans fin. Tout Miami.
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Art basel Miami beach : le marché de l’art à la fête
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°491 du 15 décembre 2017, avec le titre suivant : Art basel Miami beach : le marché de l’art à la fête