Au moment où étaient renégociés les nouveaux Fonds structurels pour la période 2000-2006, une « bataille » menée par la France a permis d’ancrer plus solidement la légitimité des projets culturels qui pourront en bénéficier. Ces ajouts aux textes officiels permettent encore une fois de rappeler que la culture est un facteur de développement pour les régions et pour l’emploi, véritable pierre angulaire de la politique culturelle européenne, et de clarifier les rapports entre la Commission et les porteurs de projets.
Comme le souligne le Département des affaires internationales (DAI) du ministère de la Culture, “des études récentes ont fait apparaître que les Fonds structurels constituaient la première source de financement européen en faveur du secteur culturel, loin devant les modestes programmes Kaléidoscope, Ariane, Raphaël [NDLR, remplacés par Culture 2000] ou même Media II”. En 1999, les actions structurelles ont en effet représenté 42,66 % des engagements financiers de l’Union, venant au 2e rang derrière la politique agricole. Une part modique de ces fonds destinés aux régions “en retard de développement” a pu être utilisée pour subventionner des projets culturels, mais en l’absence de statistiques fiables il est impossible d’avancer un chiffre précis. Seul un rapport officiel précise que “la Commission européenne estime à plus de 400 millions d’euros la part des Fonds structurels consacrés à des projets directement liés à la Culture entre 1989 et 1993”. Depuis cette date, la Commission n’a malheureusement pas procédé à une autre évaluation, mais elle considère que “le Fonds européen de développement régional (Feder) aurait à lui seul consacré durant la période 1994-1999 environ 15 millions d’euros à des projets pilotes de coopération entre les régions centrés sur la culture et le patrimoine”.
“Avancer masqué”
À l’initiative de la France, soutenue par l’Allemagne, une référence à la culture a été intégrée pour la première fois en 1999 dans les textes officiels : le règlement portant dispositions générales sur les Fonds structurels stipule désormais que “le développement culturel, la qualité de l’environnement culturel et bâti […] contribuent à rendre les régions économiquement et socialement plus attractives dans la mesure où ils favorisent la création d’emplois durables”. Pour le DAI, “la bataille menée par la France sur les Fonds structurels en 1999 était autrement plus importante que la bataille menée sur Culture 2000 : là, il y a de l’argent et il y en a énormément !”
Dorénavant, tout porteur de projet culturel ne se verra plus opposer un refus par la Commission, qui l’obligeait le plus souvent à “avancer masqué” pour solliciter des subventions. Comme ce fut le cas pour la rénovation du Musée André-Malraux au Havre en 1997-1998 : “Nous avons reçu des crédits dans le cadre de la rénovation du musée, non pas véritablement pour la restructuration intérieure et l’aspect muséographique, mais pour la création d’espaces d’accueil (librairie, café, etc.) et la réhabilitation des extérieurs du musée, déclare la directrice du musée, Françoise Cohen, notre projet s’inscrivait dans une logique de requalification d’un grand espace qui va du littoral au musée. Ce sont ces deux aspects qui nous ont permis de retenir l’attention du Feder, qui nous a versé 9 millions de francs sur un total de travaux de 80 millions de francs.”
De même, le conservateur du Musée de l’Arles antique rappelle qu’un premier projet centré sur ce musée ouvert en 1995 avait été déclaré non-éligible : “nous avons alors débaptisé le dossier ‘Musée de l’Arles antique’ en ‘Institut de recherches pour la Provence antique’ et mis en avant les activités de recherche, de restauration et d’enseignement liées à l’archéologie. Dès lors, poursuit Claude Sintès, le Feder a remboursé 50 % de ce qui avait été apporté par chacun des abondeurs, à savoir le ministère de la Culture, le secrétariat d’État aux Grands Travaux, la Ville, le Département et la Région.” Soit la moitié des 197 millions de francs qu’a finalement coûté ce grand projet mitterrandien en Régions. “C’est considérable, on nous a dit que jamais l’Europe n’avait donné autant à un musée !”
Reste que si les porteurs de projets culturels ne devraient plus avoir à recourir à ces artifices dans l’avenir pour bénéficier des Fonds structurels, les 33,5 millions d’euros alloués cette année au programme Culture 2000 ont déjà fait le bonheur de 52 actions préparatoires, parmi lesquelles 7 sont coordonnées par des “têtes de pont” françaises. C’est par exemple le cas d’“Euroclio, pour une Europe de l’histoire”, un projet dirigé par Laurent Gervereau, directeur du Musée de l’histoire contemporaine et du Conseil européen des musées d’histoire. Cette mise en réseau (www.euroclio.org) de l’ensemble des musées et des sites d’histoire en Europe concerne des milliers de lieux, de la préhistoire à nos jours. Lancé en 1999, ce programme devrait être renouvelé en 2000 pour trois ans, mais a déjà obtenu 200 000 euros sur un budget initial global de 506 727 euros pour l’ensemble des quinze pays. Bonne nouvelle, “depuis que les programmes culturels existent, bon an mal an, à peu près 20 % des budgets de programme reviennent à des porteurs de projets dont le coordinateur est français”, estime le directeur du Relais-Culture-Europe, Claude Véron, pour qui “les professionnels français des différents secteurs concernés ont repéré plus vite que leurs homologues étrangers les aides communautaires”.
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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°108 du 30 juin 2000, avec le titre suivant : Manne structurelle et...