Ventes parisiennes

Des tableaux anciens, sans « le Chardin »

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 11 juin 2004 - 1045 mots

Les vacations de tableaux anciens du mois de juin réservent peu de lots en nombre,
mais proposent une qualité supérieure par rapport à l’an dernier.

PARIS - Les ventes parisiennes de tableaux anciens du mois du juin sont plus consistantes qu’elles ne l’avaient été en 2003. Mais nul n’est à l’abri d’une erreur d’attribution. L’historien de l’art Pierre Rosenberg ayant mis en doute l’attribution à Chardin du Singe antiquaire, la pièce vedette des Temps Forts de Drouot, la SVV Eve a immédiatement retiré l’œuvre de la vente du 3 juin.

Artcurial-Briest-Poulain-Le Fur ouvre le feu le 15 juin avec deux esquisses d’Eugène Delacroix, La Guerre déchaînant les monstres (130 000-160 000 euros), étude peu « commerciale » pour la décoration du salon du Roi à Paris, et Le Forgeron (40 000-60 000 euros). Plus intéressante, l’étude pour la figure de Michel-Ange par Ingres s’offre pour 150 000-200 000 euros. Le 23 juin, la vente de Sotheby’s reste modeste avec un produit estimé à 1,2-1,8 million d’euros pour 100 lots. À vrai dire, ce rendez-vous parisien est une goutte d’eau dans la stratégie d’une maison qui exporte 10 à 20 millions d’euros en tableaux anciens par an. Le lot phare sera La Pentecôte par Jean Jouvenet (150 000-200 000 euros), préparatoire à une fresque de la voûte de la chapelle royale à Versailles. En bon état, ce tableau est resté depuis deux cents ans dans une collection française. La dispersion compte aussi un projet d’aménagement pour la place de la Concorde, une des dernières compositions d’Hubert Robert, signée l’année de sa mort en 1808 (60 000-80 000 euros). Le même jour, Millon & associés offre une autre toile de cette star du marché ancien, L’Escalier de pierre, estimée généreusement 800 000 euros-1,2 million d’euros.  Toujours le 23 juin, un autre artiste très plébiscité, Claude-Joseph Vernet, est à l’affiche chez Rieunier & associés avec le Lancement d’un navire de guerre à l’embouchure (300 000-400 000 euros).

Le lendemain, Christie’s, dont la pression pour vendre en France est plus forte que sa concurrente, affiche un beau panorama de goût français avec 161 lots et un produit prévisionnel de 5,5 millions d’euros. Un chiffre correspondant grosso modo à la valeur de ses exportations annuelles en tableaux anciens. Malgré la qualité de la vente, les estimations n’en paraissent pas moins relevées. La pièce de résistance est un bel autoportrait de Nicolas de Largillierre, connu mais jamais exposé, estimé 300 000-500 000 euros. Un prix étonnant pour cet artiste très productif. Avec un brin d’audace, Christie’s a voulu s’aligner sur le record de 529 500 livres obtenu par le Portrait de François Pommier et Yves Joseph Charles Pommier en 1993. Le catalogue présente aussi pour 300 000-500 000 euros une paire de Fêtes galantes par Jean-Baptiste Pater. Des 12 lots de la collection Pierre Landry, se démarque un très joli tableau de Georges de La Tour, probablement un fragment d’une composition plus grande (150 000-200 000 euros). On note enfin un tout petit format de Chardin, Écolier dessinant, proposé pour la coquette somme de 200 000-300 000 euros. Le même jour, on retrouve un trompe-l’œil de Chardin (200 000-300 000 euros) chez Tajan qui arbore un catalogue de 75 lots et un produit prévisionnel de 2 à 3 millions d’euros. Il faudra compter 400 000-600 000 euros pour un Lévrier surveillant un trophée de chasse au lièvre, de Jean-Baptiste Oudry, et 60 000-80 000 euros pour une huile en bel état de Louis Jean François Lagrenée représentant Jupiter et Junon sur le mont Ida, endormis par Morphée.

Batailles britanniques
Le 25 juin, Piasa groupe dans un même catalogue 40 lots importants, estimés autour de 2,5 millions d’euros, et quelque 80 plus moyens. Y figure une Nature morte au bouquet de fleurs sur cuivre d’un des pères de la nature morte hollandaise, Ambrosius Bosschaert l’Ancien (800 000 euros à 1 million d’euros). En décembre 2002, Piasa avait cédé au marchand londonien Richard Green une composition similaire, mais très sale, pour 2,5 millions d’euros. Une bataille d’enchères tout aussi britannique est à escompter pour ce cuivre qui a en sa faveur un état impeccable et des couleurs vives. La vente compte aussi un « sujet en or », Deux collectionneurs déjeunant dans une galerie de peinture par Frans Francken (80 000-120 000 euros). De la succession Pierre Sommer, on retrouve une nature morte d’Osias Beert, estimée modestement 250 000-300 000 euros, sans doute en raison de son état. En meilleure condition, elle aurait pu prétendre à 400 000 euros. On s’attarde enfin sur un Portrait de jeune homme de Fra Galgario, traité avec force dans une belle matière épaisse. Présenté par la SVV Vregille et Bizoüard de Dijon, membre du réseau Piasa, ce tableau affiche 120 000-150 000 euros. Chantal Mauduit, associée au cabinet Éric Turquin et expert pour les ventes d’Artcurial, Tajan et Piasa, observe qu’une grande majorité des pièces sont tombées seulement vers le mois de mars. Une reprise parisienne s’annonce, mais à l’arraché.

- TABLEAUX ANCIENS, OBJETS D’ART ET BEL AMEUBLEMENT DES XVIIIe et XIXe, le 15 juin à 14h30, Artcurial-Briest-Poulain-Le Fur, 7, Rond-Point des Champs-Élysées, 75008 , tél. 01 42 99 20 20 ; expositions : du 11 au 13 juin 11h-19h, le 14 juin 11h-16h. - TABLEAUX et DESSINS ANCIENS ET DU XIXe, le 23 juin à 14h30, Sotheby’s, 76, rue du Faubourg-Saint-Honoré, 75008, tél. 01 53 05 53 05 ; 18 juin 14h-20h, 19 juin 14h-18h, 21 et 22, 10h-18h. - MEUBLES, OBJETS D’ART, TABLEAUX ANCIENS, le 23 juin à 14h, SVV Millon et associés, Drouot-Richelieu, 9, rue Drouot, 75009, tél. 01 48 00 99 44 ; le 22 juin 11h-18h, le 23 juin 11h-12h. - TABLEAUX ANCIENS ET DU XIXe, le 24 juin à 18h, Christie’s, 9, avenue Matignon, 75008, tél. 01 40 76 85 85 ; les 19, 21, 22 et 23 juin 10h-18h, le 20 juin 14h-18h. - TABLEAUX ANCIENS, le 24 juin à 15h, SVV Tajan, Espace Tajan, 37, rue des Mathurins, 75008, tél. 01 53 30 30 30 ; du lundi au vendredi 9h-12h 14h-18h, les 5 et 12 juin 11h-18h, le 24, 9h-12h30. - TABLEAUX ANCIENS, le 25 juin à 14h15, SVV Piasa, Drouot-Richelieu, 9, rue Drouot, 75009, tél. 01 53 34 10 10 ; le 24 juin 11h-18h, le 25, 11h-12h.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°195 du 11 juin 2004, avec le titre suivant : Des tableaux anciens, sans « le Chardin »

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