La fusion projetée entre l’Agessa et la Maison des Artistes, les deux organismes de sécurité sociale des artistes auteurs, inquiète la MdA.
PARIS - C’est un serpent de mer qu’une lettre de mission, datée du 23 janvier dernier, vient de réveiller. Signée par trois ministres, Aurélie Filippetti pour la Culture, Marisol Touraine pour les Affaires sociales et la Santé, Jérôme Cahuzac pour le Budget (avant sa démission), la missive envoyée aux inspecteurs de l’IGAS (Inspection générale des affaires sociales) et de l’IGAC (Inspection générale des affaires culturelles) prévoit un audit des deux organismes de gestion de la sécurité sociale des auteurs et artistes, l’Agessa et la Maison des artistes, en vue de leur unification.
Ces deux organismes, associations agréées loi 1901, gèrent le régime de sécurité sociale des artistes auteurs, rattaché au régime général, pour le compte de l’État : la Maison des artistes (MdA) depuis 1964, l’Agessa (Association pour la gestion de la sécurité sociale des auteurs) depuis 1977. Dès 2005, la constitution d’une structure unique de gestion avait été envisagée après la remise d’un rapport conjoint de l’IGAS et de l’IGAC, mais la préconisation était alors restée lettre morte suite à l’opposition de la Maison des artistes. La séparation des deux caisses est historiquement due à la différenciation des secteurs d’activités exercés par les cotisants : d’un côté, la MdA gère la branche des arts graphiques et plastiques, tandis que l’Agessa récupère les droits d’auteurs des écrivains, auteurs et compositeurs de musique, cinéma et télévision, et des photographes. L’assujettissement aux cotisations est obligatoire pour les deux organismes, sans donner droit à une couverture sociale, que seule l’affiliation volontaire permet, sous conditions de revenus. Aujourd’hui, près de 60 000 artistes sont assujettis à la Maison des artistes pour environ 17 000 adhérents, tandis que l’Agessa instruit environ 216 000 dossiers par an, pour 14 000 artistes auteurs identifiés. Les deux organismes sont excédentaires.
Un pas à pas prudent
Au fil des années, l’émergence de nouveaux métiers a enrichi la mosaïque des métiers artistiques, des designers aux vidéastes, en passant par les créateurs de multimédia, rendant la séparation entre les deux organismes de plus en plus perméable. Le rapprochement entre ces associations a également été acté en 2011, avec la nomination à la direction des services administratifs de sécurité sociale de la MdA du directeur de l’Agessa, Thierry Dumas. Auditionné le 28 février par la Commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale, le directeur de l’Agessa pointait « une divergence d’appréciation » sur les missions de la MdA et des statuts « pas parfaitement clairs ». Et pour cause : la Maison des Artistes est en fait une association bicéphale réunissant deux entités, l’une chargée de la gestion de la sécurité sociale, l’autre menant des actions de solidarité et de soutien des artistes. L’opposition de la Maison des artistes à la fusion serait d’ordre idéologique. Rémy Aron, président de la MdA craint « la fin de l’association à moyen terme, alors que la Maison des artistes, à l’image d’une guilde, a une compétence nationale et symbolique ». Avec une fusion des deux services, la MdA redoute la dissolution de son activité de soutien aux artistes : « les deux missions sont complémentaires », martèle Rémy Aron. Cette position est cependant critiquée par certaines associations professionnelles, dont la FRAAP (Fédération des réseaux et associations d’artistes plasticiens) qui dénonce « le quiproquo entre [des] activités associatives et la gestion de la sécurité sociale dont [la Maison des Artistes] n’a pas la charge ».
L’union fera-t-elle la force ?
Cette réforme vise à améliorer le régime de protection sociale des artistes auteurs, notamment en permettant la couverture des accidents du travail et des maladies professionnelles, une demande très forte des associations professionnelles, qui espèrent aussi une simplification et une meilleure gestion du régime. « On m’a assuré que la décision n’était pas prise » espère Rémy Aron, mais le calendrier est pourtant fixé : le rapport de l’IGAS-IGAC doit être rendu le 1er juin avec une unification à l’horizon d’octobre 2014. Les aspects structurels, la gouvernance et le champ d’action restent à définir. « S’il faut être visible, il y aura une manifestation, comme en 2006 », prévient le président de la MdA. Face aux différentes contestations internes, la mobilisation risque d’être moins aisée que les années précédentes.
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La fusion Agessa-MdA en ébullition
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Abonnez-vous dès 1 €sources Agessa / Maison des Artistes
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°388 du 29 mars 2013, avec le titre suivant : La fusion Agessa-MdA en ébullition