Bruges revient sur son passé en faisant revivre ce qui, au XVIIe siècle, constituait un art à part entière. Et témoigne de la diversité en même temps que de l’unité d’une industrie européenne qui a aussi été un enjeu politique et économique majeur.
BRUGES. On connaît l’intérêt qu’un Mallarmé ou qu’un Rodenbach portait à la dentelle comme symbole d’une réalité recomposée au travers d’un vitrail réduit à l’épure. Si, aujourd’hui, les amateurs d’art sont rares à s’intéresser à la dentelle, les historiens y ont trouvé matière à une analyse dont l’intérêt se situe dans la rencontre des démarches. Ainsi, l’histoire de la dentelle obéit-elle à l’évolution des modes. Elle rend compte à la fois des enjeux artistiques de son temps et de l’exigence du goût. Au-delà de l’objet mis en valeur à travers des pièces majeures venues de musées et collections privées belges, français, britanniques, russes ou espagnols, la partie documentaire constitue sans doute la part la plus captivante de l’exposition. Un panorama social et économique se déploie et éclaire un pan de l’histoire européenne. Ainsi, au XVIe siècle, l’histoire de la dentelle apparaît dominée par deux centres d’égal rayonnement : les Flandres et l’Italie. Enjeu économique déterminant, la dentelle se diversifie. Aux Pays-Bas méridionaux, le développement de la dentelle aux fuseaux ; à l’Italie, la continuation d’une tradition de dentelle à l’aiguille. Pour le Nord comme pour le Sud, le XVIIe siècle constituera un âge d’or dont l’impact économique n’est pas négligeable. Pour preuve, le souci de Colbert de limiter les importations de dentelle en formant une école dentellière française. En 1655, les Manufactures royales verront le jour pour défendre le "point de France" qui concurrencera les autres productions européennes. La dentelle reste cependant tributaire des modes et appartient de plain-pied à l’Ancien Régime. Son développement ne résistera pas aux révolutions vestimentaires qui marquent la seconde moitié du XVIIIe siècle. L’exposition offre un panorama complet et détaillé des différents centres artistiques. Elle met en évidence leurs spécificités en même temps que l’unité d’une industrie qui, au-delà des frontières, s’adresse à une même catégorie sociale. Évolutions stylistiques et thèmes iconographiques permettent de dater avec une certaine assurance les productions dentellières et jouent donc un rôle important pour les attributions en peinture ou en gravure.
L’EUROPE DE LA DENTELLE, jusqu’au 16 novembre, Musée communal Hôtel Arens, 16 Dijver, 8000 Bruges, tél. 32 50 44 87 11, tlj 9h30-17h. Catalogue en néerlandais et en anglais.
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« Une dentelle s’abolit… »
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°43 du 12 septembre 1997, avec le titre suivant : « Une dentelle s’abolit… »