JÉRUSALEM / ISRAËL
Deux salles étaient consacrées à l’artiste israélo-palestinienne Raida Adon avant la fermeture récente du musée.
Le Israel Museum à Jérusalem, le plus grand musée en Israël, exposait pour la première fois en solo une artiste palestinienne. Deux salles étaient consacrées à Raida Adon, une artiste-vidéaste dont les travaux portent sur l’exode et la recherche d’identité. Mais avec le nouveau confinement, le musée est à nouveau fermé.
La vidéo Strangeness, 2018 (Étrangeté) démarre par une chanson roumaine. Un groupe de personnes non-identifiables et bien habillées erre d’un endroit à l’autre. Raida Adon, valise à la main, observe à distance. D’autres scènes la montrent à l’intérieur d’une valise devenue sa maison.
« Je ne parle pas seulement de la situation des Palestiniens, je parle de façon générale. Beaucoup de gens n’ont pas de pays, de drapeau… » dit-elle au Journal des Arts. Selon elle, l’histoire se répète. Il s’agit de parler des conséquences des conquêtes territoriales, de la situation des réfugiés emportant leurs souvenirs avec eux et les transmettant aux générations futures.
Le commissaire d’exposition, Amitai Mendelsohn, expliquait au quotidien israélien Haaretz, que dans le passé les artistes arabes ou palestiniens ne voulaient pas exposer et que cela faisait débat dans l’institution. « Notre volonté n’est pas d’exposer les travaux d’une communauté particulière, mais de donner de la visibilité aux bons artistes quel que soit leur origine. »
Raida Adon est née à Acre, près de Haïfa, au nord d’Israël. Sa famille n’a pas fui sa terre lors de la guerre israélo-arabe de 1948. Elle a ainsi grandi entre la culture palestinienne à la maison et la culture israélienne au quotidien. Choisir une seule identité lui semble impossible : « Quand je dis que je suis palestinienne, les juifs sont déçus, parce que pourquoi se considérer comme palestinienne et vivre en Israël ? Mais c'est la réalité. Je suis palestinienne, je parle arabe, ma culture est différente. Mais je leur dis, je suis aussi israélienne, parce que j’ai été éduquée en Israël, je parle l’hébreu, je sais tout de la culture d'Israël. Alors ce sont les Palestiniens qui sont déçus, parce qu'ils veulent que je choisisse un côté et je ne choisirai pas. J’ai des amis des deux côtés. »
Elle ajoute : « Ils vous mettent toujours dans une case, tout le temps. Arabes et Juifs. Ils veulent que vous croyiez en une religion, en une idée. Partout dans le monde, ils veulent que vous apparteniez à une chose. »
Son refus d’être mise dans une case par la société, provoque un sentiment d’appartenir nulle part. Dans un travail précédent, la vidéo Woman Without A Home, 2014 (Femme sans maison), elle pousse un lit à travers des paysages vides jusqu’à ce qu’elle atterrisse seule sur ce lit dans la mer.
Pour expliquer la complexité de la situation dans laquelle elle se trouve, elle raconte sa visite, il y a quatre ans, à l’Institut du Monde Arabe à Paris où elle voulait – en vain - exposer ses œuvres : « Ils ne savaient pas comment [les] montrer, quelle est mon identité. Parce qu'ils sont soutenus par beaucoup d'Arabes, et que je viens d'Israël et de Palestine, ils ne pouvaient pas exposer mes vidéos. »
Du côté palestinien, ainsi que du côté israélien, il y a peu d’aide financière pour les artistes. « Ce n'est pas facile de vivre ici, » dit-elle, « Je ne sais pas pourquoi les gens se battent pour être ici. » Son art, elle le montre là où on l’accepte. Précédemment, elle a exposé à Tel Aviv, à Umm el Fahm, à Berlin, Paris et Tokyo.
Lorsqu’elle démarre son projet Strangeness, elle savait que c’était pour le Israel Museum. Elle connaissait Amitai Mendelsohn depuis plusieurs années et l’a contacté pour qu’il voit son travail et l’expose. « Le Israel Museum n'appartient pas qu'aux Israéliens » déclare Raida Adon, « si je veux montrer mon chagrin, je n'ai pas besoin d’en témoigner seulement aux Palestiniens. Les Palestiniens savent ce qui m'est arrivé et savent ce que nous ressentons. J'ai besoin de parler aux Israéliens. C'était important pour moi. »
Le Israel Museum a été fondé en 1965 et présente des œuvres d’art et d’archéologie. Il détient, entre autres, les fameux manuscrits de la mer Morte, les plus anciens manuscrits bibliques du monde.
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Première exposition solo d’une artiste Palestinienne au Israel Museum
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