Matisse, la peinture aux ciseaux

L'ŒIL

Le 1 février 2003 - 339 mots

De la fin des années 1930 jusqu’à sa mort en 1954, Henri Matisse se livre à un exercice nouveau, celui des papiers gouachés et découpés.

L’exposition de Francfort présente soixante-dix œuvres de cette période, provenant de musées et de collections particulières du monde entier, d’Amérique, d’Asie ou d’Europe. Par la perfection des compositions, les formes et les couleurs réduites à l’essentiel pour une expressivité toujours plus forte, avec un goût de l’ornementation et du décoratif plus que jamais exacerbé, Matisse semble avoir trouvé dans cet art du découpage la manifestation la plus aboutie de ce qu’il a toujours recherché dans sa peinture. Les gouaches découpées qu’il réalise à partir de 1944 sont les plus convaincantes. Il procède à une sorte de dessin dans la couleur, créant un équilibre parfait entre le coloris, la forme et la lumière, avec des tons purs et des contours d’une précision que le dessin ne permettrait pas. « Découper à vif dans la couleur me rappelle la taille directe des sculpteurs », disait-il.

Par cette technique qui lui procure des sensations physiques inédites, Matisse ramène plus que jamais la peinture à la surface, à la bidimensionnalité, et accentue encore la valeur décorative de l’œuvre. Les compositions qu’il réalise au soir de sa vie, comme les célèbres Nus bleus (1952), en sont la meilleure illustration. L’exposition commence avec son tout premier papier découpé, la couverture de Cahier d’art (1936) et le célèbre livre Jazz (1943), publié par Tériade en 1947. Suivent nombre de pièces intégrant des figures humaines (La Chute d’Icare, 1943), des animaux et des végétaux (La Perruche et la Sirène, 1952) dans un rythme harmonieux. Si certains de ces travaux n’étaient au départ que des projets pour des vitraux – ceux de la chapelle du Rosaire à Vence (1949-1951) –, des céramiques, des illustrations ou des couvertures d’ouvrages, ils n’en demeurent pas moins des œuvres à part entière, révélatrices de l’aboutissement logique d’une vie de recherche et de création.

FRANCFORT, Schirn Kunsthalle Frankfurt, Römerberg, tél. 49 69 29 98 820, 20 décembre-2 mars.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°544 du 1 février 2003, avec le titre suivant : Matisse, la peinture aux ciseaux

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