Critiques et spectateurs cherchent souvent un sens caché, psychanalytique ou symbolique, aux œuvres de Magritte. Pourtant, lui, affirmait qu’il n’y en avait pas...
« On me demande souvent ce que cache ma peinture. Rien ! Je peins des images visibles qui évoquent quelque chose d’incompréhensible. Je ne suis pas un symboliste… Mais bien sûr je ne puis empêcher les gens d’interpréter mes toiles. S’ils préfèrent essayer de traverser les murs que passer par la porte, que voulez-vous que j’y fasse ? », disait René Magritte, en 1966 (Écrits complets, Flammarion). L’exposition que lui consacre la fondation Beyeler, à Bâle, est une nouvelle occasion de vérifier ce curieux phénomène. Mis en présence d’une œuvre de Magritte, notre cerveau est pris d’une sorte de fureur explicative. Ce cube avec des yeux, cette ouverture informe dans une porte, ces grelots qui poussent au bord d’un gouffre, nous voulons absolument leur trouver une solution convenable, quitte à saisir les pinceaux les plus épais de la psychanalyse, de l’allégorisme ou de l’onirisme. Si nous nous acharnons de la sorte – et le texte accompagnant l’exposition est une énième manifestation de cet acharnement –, c’est sans doute que quelque chose, ici, nous inquiète, nous résiste et ne se laisse pas ignorer. Quelque chose, mais quoi ? « Cet élément à découvrir, cette chose entre toutes attachée obscurément à chaque objet, j’acquis au cours de mes recherches la certitude que je la connaissais toujours d’avance mais que cette connaissance était comme perdue au fond de ma pensée », écrivait Magritte, en 1938. Pour le spectateur, c’est dans la première impression que ce « quelque chose » apparaît souvent, avant de se dérober à la réflexion. Dans la présente exposition, il surgit un peu plus vivement, semble-t-il, de peintures comme Les Muscles célestes ou Les Figures de nuit, peut-être parce que ces œuvres, rarement montrées, sont des premières « premières impressions ». Quant à dire ce que c’est… les mots de Magritte, mieux que ceux des critiques, s’y sont essayés. Ce n’est pas une pipe, en tout cas.
« René Magritte, la clé des songes », BÂLE/RIEHEN (Suisse), fondation Beyeler, Baselstrasse 101, tél. 41 (0) 616 459 700, www.beyeler.com, 7 août-27 novembre.
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Les images visibles de René Magritte
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°573 du 1 octobre 2005, avec le titre suivant : Les images visibles de René Magritte