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Le trompe-l’œil : la peinture et son objet

Par Christophe Perez · L'ŒIL

Le 1 décembre 2002 - 355 mots

La grande exposition que consacre la National Gallery de Washington au trompe-l’œil est logiquement centrée sur le XVIIe siècle flamand et ses maîtres (Samuel van Hoogstraten, Cornelis Gijsbrechts et Gerard Dou, parmi d’autres). 

Cette exposition s’autorise néanmoins un grand écart historique en incluant, en guise de prologue et d’épilogue, une fresque pompéienne du Ier siècle, mais aussi des œuvres Pop ou encore un tableau-piège de Spoerri. C’est justement là tout l’intérêt de cette exposition qui se propose d’étudier le trompe-l’œil, au-delà de l’exercice de style virtuose et de son âge d’or, comme un phénomène porteur de fascination en même temps que de grandes questions théoriques quant à la représentation du réel. Une légende hellénistique en témoigne qui oppose deux artistes : Zeuxis et Parrhasios. Le premier, qui peignait des grappes de raisins avec une adresse telle que des oiseaux s’en approchaient pour les manger, devait s’avouer battu lorsqu’il tendit la main pour essayer de tirer un rideau peint par son rival. Peindre aussi vrai que nature reviendrait donc à mentir ? La question devait demeurer ouverte et trouver d’autant plus d’applications avec l’avènement de la nature morte comme un genre académique. Le perfectionnement de la perspective géométrique et la diffusion des écrits humanistes aidant, le trompe-l’œil prenait alors, du XVIe au XVIIIe siècle, toute sa dimension symbolique et philosophique. Décliné en vanités et autres memento mori, scènes domestiques ou cabinets de curiosités, ce sous-genre se posait comme autant d’allégories morales du savoir et du temps, de la vie et de la mort, des arts et de leur futilité, et engageait son spectateur à considérer la représentation d’objets familiers comme le théâtre de sa condition. Le XIXe siècle voyait un renouvellement du trompe-l’œil sur un mode plus léger, notamment à travers une peinture américaine s’amusant de l’illusion pour sortir l’objet peint de son cadre ou mettre en abyme le tableau même. Peut-on s’autoriser à penser, comme le suggère cette exposition, que le terrain était dès lors préparé pour les collages cubistes et l’utilisation de l’objet préfabriqué au titre de l’art

WASHINGTON, National Gallery of Art, Constitution Avenue, tél. 00 (1) 202 737 4215, 13 octobre-2 mars.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°542 du 1 décembre 2002, avec le titre suivant : Le trompe-l’œil : la peinture et son objet

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