Le Cantique des Cantiques façon Kupka

À son mécène, un industriel tchèque nommé Waldès, il dit alors sa joie « de voir qu’un groupe d’artistes s’est formé, déclarant de façon presque fanatique que rien ne doit être peint ni représenté d’après nature », et il rejoint aussitôt le groupe. Un peu plus loin, il précise à son correspondant comme pour bien insister : « Encore une fois, il faut faire de l’art pur. »

1931 est justement l’année où sort l’édition bibliophilique du Cantique des Cantiques à laquelle il n’a cessé de travailler depuis 1905, une œuvre capitale en matière de livre illustré qui s’inscrit parfaitement dans la quête de cette pureté. Proprement fasciné par ce chef-d’œuvre de la poésie amoureuse universelle, son abondance de traductions, sa large diffusion et sa dimension érotique chère au courant symboliste, l’artiste lui a consacré un nombre considérable de dessins. Depuis les esquisses au crayon jusqu’aux aquarelles très détaillées destinées à l’édition finale, ce ne sont pas moins de cent trente-quatre pièces issues des collections de Waldès, que vient d’acquérir le musée d’Art et d’Histoire du judaïsme. Cet ensemble capital témoigne du travail de recherches formelles de Kupka, de la synthèse plastique qu’il opère entre les diverses tendances abstraites qui ont animé le début du xxe siècle, enfin de son inventivité dans le domaine typographique.