BILBAO / ESPAGNE
En 1997, l’inauguration du Guggenheim Museum, à Bilbao, fut une révolution dans l’histoire de l’architecture et bien au-delà.
D’abord, cet édifice de l’Américain Frank Gehry fut le premier à être entièrement modélisé grâce à un logiciel informatique, Catia, jusqu’alors uniquement utilisé par le secteur aéronautique. Ensuite, le bâtiment généra un étonnant renouveau de cette ville espagnole jusqu’alors sinistrée, que d’aucuns baptisèrent illico : « Effet Bilbao ». C’est cette « réaction » indicible qu’explore cette exposition intitulée « Architecture Effects », déployée au sein même de l’emblématique Guggenheim Museum de Bilbao et rassemblant une vingtaine d’œuvres : sculptures, prototype grandeur nature, films, animations, photographies… Au lieu d’une traditionnelle présentation avec plans et maquettes, le parcours arbore des pièces à la frontière de l’art et de l’architecture qui évoquent la réflexion amorcée à l’orée du XXIe siècle autour de l’architecture et mettent en relief l’extension des investigations architecturales au-delà de l’espace construit identifiable et normalisé. Ainsi, critique en creux du rationalisme – lequel aimait à cacher derrière une façade homogène une hétérogénéité d’existences –, l’installation El Otro (« L’Autre ») de Frida Escobedo est une série de fenêtres issues d’un bâtiment abandonné de Mexico, sur lesquelles on peut encore « lire » les traces de la vie qui, jadis, s’est déroulée derrière. Empli d’eau et d’une forte quantité de sel, le caisson de flottaison individuel Float Tank1 du duo Leong Leong, dans lequel le corps peut flotter à l’envi, est un moyen pour explorer son Deep Self (« Moi profond »). En clair : les œuvres mettent l’accent sur la dimension psycho-affective de l’architecture, suggérant, en outre, moult manières de transcender les tensions de notre temps.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°720 du 1 février 2019, avec le titre suivant : L’avènement de l’ère numérique en architecture