Peu connue en Europe, l’orfèvrerie indonésienne est à découvrir au Musée Guimet où sont regroupées 71 pièces en provenance du Musée national de Jakarta. Fleuron de cette sélection, le trésor mis au jour en 1990 près du village de Wonoboyo, à Java Centrale, fouille la plus importante du siècle pour l’archipel.
PARIS - L’or a joué dans la civilisation indonésienne un rôle proche de celui exercé dans d’autres civilisations. Il permet aux hommes d’afficher un rang social, de sceller des alliances matrimoniales, d’entrer en relation avec le monde divin. Divisée en trois sections – sculpture, archéologie, ethnographie – l’exposition veut faire briller toutes ces facettes.
Les deux premières, réunissant des pièces allant du VIIe au XVIe siècle, frappent par la finesse et la sobriété du travail. Issue du trésor de Wonoboyo, une coupe quadrilobée allongée (début du Xe siècle) séduit par son délicat décor en relief, exécuté au repoussé, racontant la légende du Râmâyana.
Un modèle réduit de récipient en feuilles de palme, découvert lui aussi à Wonoboyo, surprend par la pureté de sa forme, comme celle de deux coupes à lèvre évasée. Les pièces présentées sont loin de l’image clinquante que l’on pourrait avoir des ors indonésiens. En témoigne au premier chef un collier composé de 38 pièces, en forme de coquille de mollusque conique, agencées tel un soleil régnant avec une évidente simplicité.
La section ethnographique montre des objets plus tardifs – XIXe et début du XXe siècle – et plus démonstratifs. Parmi eux, les kriss – ces poignards à lame sinueuse, chargés du pouvoir des ancêtres – occupent une place de choix.
Cette exposition est la première que le Musée Guimet consacre à l’art indonésien. Elle est organisée pour marquer les cinquante ans de la proclamation de l’indépendance de la République d’Indonésie.
On peut comprendre que le musée soit largement absorbé par la préparation de sa rénovation.
On passera rapidement sur les fautes d’orthographe de certains cartels – "Musée nationale de Jakarta" – mais on déplorera davantage le manque d’informations fournies au visiteur, contraint d’aller aveuglément d’Avalokiteçvara à Aksobhya en passant par Civa et Pârvati, sans le minimum de clés pour s’ouvrir à un monde totalement différent du sien. Quant aux auteurs du catalogue, ils donnent l’impression de si bien connaître leur sujet qu’ils n’envisagent pas que le lecteur puisse ne pas être spécialiste.
Espérons que le “nouveau” Guimet, qui entrera en chantier l’an prochain après une exposition consacrée aux chevaux Han et Tang de la donation Jacques Polain, s’efforcera d’allier davantage de rigueur scientifique à un souci du public non averti.
"Les ors de l’archipel indonésien", Musée national des Arts asiatiques Guimet, 6, place d’Iena 75116 Paris, jusqu’au 31 juillet, tous les jours, sauf le mardi, de 9h45 à 17h45. Catalogue, Éditions RMN, 176 p., 97 ill., 250 F.
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La sobriété des ors indonésiens
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°15 du 1 juin 1995, avec le titre suivant : La sobriété des ors indonésiens