Et si, à l’image de la musique techno, les arts plastiques français étaient portés par une « French Touch » ? Partant de ce postulat, la société Ricard a décerné le premier prix Ricard S.A, après avoir organisé successivement, en septembre, l’exposition «Propice » et une fête, le « Bal jaune ». Le résultat est loin d’être convaincant.
PARIS - Le succès des DJs et musiciens techno français sur la scène internationale ne cesse de faire des envieux dans le monde des arts plastiques, au point de donner des idées à certains. Et si, comme la musique, l’art contemporain était porté par une “French Touch” ? Conseillée par Fabrice Bousteau, rédacteur en chef de Beaux Arts Magazine, et la galeriste Nathalie Vallois, la société Ricard, qui entend réaffirmer son mécénat en faveur de l’art contemporain, a tenté de proposer quelques éléments de réponse en confiant le commissariat de l’exposition “Propice” – censée réunir les artistes les plus représentatifs de la jeune génération – à la critique d’art Catherine Francblin, spécialiste notamment des Nouveaux Réalistes. Ce choix peut paraître curieux, un peu comme si l’on avait demandé à Ève Ruggieri d’organiser la “Techno Parade”. Le résultat a d’ailleurs cruellement manqué d’énergie, desservi, il est vrai, par l’Espace Ricard lui-même, des salons plus prompts à accueillir des déjeuners d’affaires qu’à mettre en valeur la création contemporaine. “Propice” se présentait comme une exposition, éclectique et sans relief, de onze artistes français de moins de quarante ans : Sandy Amério, Gilles Barbier, Alain Bublex, Claude Closky, Mohamed El Baz, Malachi Farrell, Stéphane Magnin, Didier Marcel, Florence Paradeis, Philippe Ramette et Hugues Reip. Peu de découvertes, en réalité, puisque les œuvres avaient déjà été exposées, la maison n’ayant pas prévu de budget de production. Étrange sélection, tout de même, qui ignorait nombre de ténors de la jeune scène française, pour ce qui était destiné à récompenser l’artiste le plus représentatif de la “French Touch”. Finalement, le jury, composé d’une centaine de collectionneurs issus du fichier de l’OIP, la société organisatrice de la Fiac, a heureusement décerné le Prix Ricard S.A. à Didier Marcel (lire le JdA n° 87, 27 août). La société marseillaise exposera ainsi au Centre Georges Pompidou, durant la Fiac 2000, une œuvre achetée à l’artiste pour un montant de 60 000 francs.
Cette somme peut paraître bien dérisoire au regard du budget total (plus de 700 000 francs, selon nos informations) du “Bal jaune”, la soirée de remise du prix organisée à l’Espace Wagram, à Paris, le 17 septembre. Plus étonnante est la participation financière à cette fête privée de la Délégation aux arts plastiques, estimée à 160 000 francs. Certes, designers, stylistes et artistes avaient été invités à présenter des œuvres qui, dans ce type d’événement, n’étaient guère à leur avantage, mais que dire de la représentativité, dans cette fête destinée à célébrer cette fameuse “French Touch”, de certains artistes sélectionnés, comme la Suissesse Sylvie Fleury ou l’Américain Jack Pierson ?
Le Tout-Paris de l’art contemporain se pressait pourtant à ce raout. Des stars du cinéma avaient même été conviées, alibi à une grand-messe unitaire de la création française, mais surtout invitations révélatrices d’un complexe renouvelé vis-à-vis d’un star-system médiatisé dont le milieu de l’art contemporain parisien se sent injustement rejeté. Avec ce “Bal jaune”, certains espéraient enfin avoir accès aux pages “people” de Voici ou de Gala, souriants, un verre de pastis à la main, entre Vanessa Paradis et Johnny Depp. Malheureusement, actrices et comédiens n’avaient pas jugé bon d’être présents, préférant céder leur place aux vedettes de l’art contemporain. Décidément, il reste encore du chemin à faire.
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La « French Touch » ou « Much ado about nothing »
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°90 du 8 octobre 1999, avec le titre suivant : La « French Touch » ou « Much ado about nothing »