Disséminées au détour des allées et parmi les arbres du parc du Middelheimmuseum, visibles de loin par les couleurs ou la taille, parfois cocasses rivales de la magnifique collection des sculptures permanentes, vingt-six œuvres produites par seize artistes venus de dix pays invitent le promeneur à céder ou non aux artifices de l’ancien jardin baroque.
Pas de grottes, de fontaines ou de labyrinthes, mais des installations qui s’en inspirent, les évoquent ou les détournent dans le but, comme au temps de Rubens, de provoquer des surprises qui ne sont pas toutes au rendez-vous. Des tuyaux d’arrosage multicolores de Bertrand Lavier, bouquet soi-disant ludique déjà vu et mal recyclé, à l’arc de triomphe en forme d’homme-acrobate urinant de Gelitin, l’esthétique perd ses repères. Elle les retrouve avec la voix de Louise Lawler, déguisée en perroquet, énonçant les noms d’artistes occidentaux et uniquement « mâles blancs », d’Andra Ursuta pointant son nez cassé en marbre à l’antique ou encore de William Forsythe, chorégraphe discret et convaincant de la déstabilisation. Avec ses plateaux ronds recouverts de gazon qui s’identifient à la prairie, il agite réellement le spectateur, celui qui regarde comme celui qui s’aventure dessus, et les met en mouvement. Censées jouer le rôle de pièges à regard qui ravissaient les courtisans d’hier, certaines installations éphémères prendraient du sens une fois rapportées à la critique de notre société consumériste. Voire ! Le visiteur peut s’amuser à en déjouer les leurres.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°714 du 1 juillet 2018, avec le titre suivant : Expériences en trompe- l’œil