PARIS
La Fondation Cartier pour l’art contemporain montre comment l’automobile s’est constituée comme un véritable sujet au fil de l’histoire de la photographie.
Paris. La voiture est un objet et un sujet éminemment photogénique. De Jacques Henri Lartigue à Bernard Plossu en passant par William Eggleston, Lee Friedlander, Robert Frank ou Daido Moriyama, les photographes historiques ont produit nombre d’images ou de séries iconiques sur l’automobile. Pourtant aucun historien de la photographie ni conservateur n’avait encore analysé les créations et récits sur les us et coutume des XXe et du XXIe siècles, sur l’urbanisation, l’industrialisation et la désindustrialisation de la période… et ses sorties de route. L’éditeur Xavier Barral et le rédacteur en chef de Autohebdo, Philippe Séclier – celui-ci étant surtout connu pour ses livres et ses documentaires sur Marc Riboud ou Robert Frank –, s’y sont attelés, curieux de ce que le sujet révèle en découvertes passionnantes.
La sélection a été rude tant les photographies sont multiples et diverses : elle comporte aussi bien des images totalement méconnues d’auteurs illustres comme Doisneau que des photos anonymes. Ainsi de ces planches de négatifs de relevés photographiques de voies de circulation mondiales réalisés par Michelin dans le cadre de ses essais de pneus, ou de cette collection de portraits d’Américains posant devant leur voiture, photographies amateurs collectées et réunies par Sylvie Meunier et Patrick Tournebœuf. Nul flot d’images pourtant ne vient submerger le visiteur dans ce parcours, au contraire. Riche de près de 450 photographies, l’accrochage, porté par la scénographique de Constance Guisset, relance en permanence le visiteur dans sa lecture.
Vitesse, road trip…
La série domine le genre. La vitesse, la ligne de la carlingue bousculent la vision, le road trip instaure son genre. La voiture « boîte photographique », pour reprendre les termes de Philippe Séclier, devient un formidable révélateur de l’existence, de ses joies, de ses labeurs, peines et misères. Dans l’encadrement d’une porte, d’une vitre ou d’un rétroviseur, un baiser s’échange (Elliott Erwitt), des mariés posent tout sourire (Rosângela Rennó) ou dépassent volontairement la vitesse autorisée pour être flashés (Jeff Guess). Un chauffeur de taxi mexicain raconte à travers la vitre de son véhicule la pauvreté de sa ville (Óscar Fernando Gómez). Un chien court après une voiture (John Divola). Le graphisme d’une carrosserie d’une voiture américaine et d’un parking forme une composition confondante d’harmonie (Ray Metzker) tandis que la décharge de cadavres de pneus (Edward Burtynsky) renvoie au revers de la modernité. Cette dernière partie consacrée aux vestiges automobiles est à cet égard un regroupement de travaux qui n’oublient pas la beauté de la ruine (Patrick Nagatani) ni l’ingéniosité humaine employée à construire une voiture à partir de matériaux de récupération (Melle Smets et Joost van Onna). Et si l’on doit témoigner d’une déception, outre la faiblesse du diaporama concocté spécialement par l’agence Tendance Floue, et de deux grands formats d’Andrew Bush, c’est la grande pudeur de l’exposition, dénuée totalement de scène de sexe.
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« Autophoto », Une expo décoiffante
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Abonnez-vous dès 1 €Jusqu’au 24 septembre, Fondation Cartier, 261, bd Raspail, 75014 Paris.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°481 du 9 juin 2017, avec le titre suivant : « Autophoto », Une expo décoiffante