En septembre 1802, Turner séjourne à Paris et se rend au Louvre afin de visiter l’événement incontournable de la rentrée artistique, le Salon. L’expression peu amène qu’il réserve à l’art français contemporain – « All made up of Art », littéralement « fabriqué d’art » – paraît stigmatiser la création hexagonale en tant qu’elle serait alambiquée et bricolée, obsédée par l’Art lui-même et non par une Nature pourvoyeuse de modèles exemplaires.
Claude, David et les autres
Si Turner, vingt-sept ans, fait de rares concessions à la grande peinture d’histoire néoclassique, au rang desquelles certaines œuvres de David et de Guérin (Le Retour de Marcus Sextus, 1799), il n’en demeure pas moins vigilant envers le genre qui constitue presque le tiers numéraire des 385 peintures exposées lors du Salon : le paysage.
Certes, la manière du jeune Turner, déjà tumultueuse et contrastée, ne peut souscrire aveuglément au style linéaire des paysagistes français. Néanmoins, la découverte du peintre et théoricien Pierre-Henri de Valenciennes (L’Ancienne Ville d’Agrigente, 1787) offre à un artiste bientôt sensible à la leçon de Poussin (Le Déluge, 1805) des solutions importantes quant à la structuration des formes et l’articulation des gestes, ainsi qu’en témoigne son Mercure et Hersé (1805-1811).
« All made up of Art ». Puisqu’elle s’inscrit dans un contexte de rivalité politique entre la France et l’Angleterre, cette expression péremptoire mérite donc d’être relativisée. Du reste, les œuvres de Turner suffisent elles-mêmes à nuancer un jugement sévère, et par trop hâtif, qui ne saurait, sinon, s’accommoder vraiment de son admiration décisive pour les toiles du Lorrain (Le Déclin de l’empire carthaginois, 1817), de sa relecture des pièces galantes de Watteau (Ce que vous voudrez !, 1822) ou des répercussions émouvantes du Radeau de la Méduse (1819) sur sa propre création (Désastre en mer, 1833-1835).
Turner et la France, une histoire contrastée, peut-être contrariée…
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"All made up of Art" : un fabriqué d’art. Un Turner très critique à l’égard de la peinture française
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°622 du 1 mars 2010, avec le titre suivant : "All made up of Art" : un fabriqué d’art. Un Turner très critique à l’égard de la peinture française