Centre culturel

Changement de direction

Une nouvelle Gaîté-Lyrique

PARIS

Après six mois d’une transition difficile, la Gaîté-Lyrique présente la programmation de la nouvelle équipe. Mais les chantiers de fond démarrent à peine.

PARIS - « Lanceurs d’alerte », installé sur plusieurs étages depuis le 11 janvier (jusqu’au 29 janvier), est le premier événement intégralement conçu par la nouvelle équipe de direction de la Gaîté-Lyrique. En juillet dernier, le trio composé de Jean-Dominique Secondi de l’agence ARTER (lire le JdA n°429, 13 févr. 2015), de Monique Savoie de la Société des arts technologiques (SAT) de Montréal et de Marc Dondey, le directeur artistique de la nouvelle équipe, a signé le contrat de délégation de service public avec la Mairie de Paris. L’ancienne équipe menée par Steven Hearn, gérant de la société Scintillo, a dû quitter les lieux. Jérôme Delormas, le directeur artistique, avait déjà préféré voguer vers d’autres cieux. Depuis, « la transition a été abrupte, mais le calendrier était si serré qu’elle l’aurait été avec n’importe qui », admet Marc Dondey. Façon polie de confirmer la difficulté de passer après Steven Hearn, qui disait aux médias cet été se sentir « fauché en plein vol » par ce non-renouvellement.

Un « laboratoire transdisciplinaire des nouvelles pratiques »
Tout en réduisant sa subvention de 25 % en deux ans (4,3 millions d’euros en 2017), la municipalité souhaite une diversification du public (dont la moitié est âgée de moins de 35 ans), que l’équipe initiale a eu le mérite de fidéliser à plus de 300 000 visiteurs par an.

Avec douze départs pour quatre recrutements, l’équipe s’est stabilisée à 52 salariés, mais développera des collaborations extérieures. Avant que les nouveaux délégataires dévoilent en décembre dernier le projet d’établissement qu’ils conduiront jusqu’en 2022, le changement discret mais majeur qui figurait dans le cahier des charges était déjà connu. Après les « arts numériques et musiques actuelles », la Gaîté-Lyrique met l’accent sur « les relations entre la création artistique et l’innovation scientifique, technologique et sociale ». Le spectacle vivant et les arts visuels sont intégrés dans ce futur « laboratoire transdisciplinaire des nouvelles pratiques », davantage ouvert sur le quartier et la ville. De loin, la vocation du lieu ne paraît guère changer, même si le côté technophile est assumé et la ligne artistique plus diverse. De près, l’ADN évolue : la ligne ne doit plus se définir par la programmation. « Nous allons intégralement affecter le premier étage à la transmission et à la médiation, explique Marc Dondey. 80 % du public se concentrait sur 10 % de l’espace, créant de nombreux conflits d’usage. En réattribuant les espaces, nous équilibrons nos missions d’accueil, de visite, mais surtout de participation du public. »

Pour Marc Dondey, la participation du public à la construction du lieu n’est pas une simple médiation améliorée. C’est un projet d’établissement intégralement inspiré de l’expérience strasbourgeoise du Shadok. Marc Dondey a lancé cette « fabrique du numérique » en 2012, sur le modèle du ZKM (Centre d’art et de technologie des médias) de Karlsruhe – et, déjà, de la SAT de Montréal –, après avoir été responsable des entreprises créatives de Strasbourg. Le lieu se définit « à la jonction de plusieurs enjeux et domaines d’activités : culture, développement économique, aménagement urbain, démocratie locale, rayonnement et action internationale ».

Avant de s’installer à trois stations de métro de la gare de l’Est, Dondey a emmené dans ses valises les concepteurs du Shadok : l’agence ARTER, Géraldine Farage et Jérémy Bellot. Ce dernier, venu en consultant à Paris pour « infuser la culture Shadok », est membre du comité directeur d’Avlab (Fablab du Shadok), qui construira notamment le dispositif « Gaîté nomade », par lequel la Gaîté sortira de ses murs à la rencontre du public. Sur le modèle du Centre Pompidou mobile ? « Non, le coût sera bien moindre, et la “GL nomade” ne sera pas un geste de décentralisation des créations de la Gaîté, mais plutôt un endroit de dialogue, de partage, de fabrication. Un espace où l’on retrouve le logiciel de la Gaîté elle-même. »

Disposant d’un budget de 8 millions d’euros en 2016, le lieu doit pourtant revoir son modèle économique. Les recettes de billetterie (1 M€) n’augmenteront pas, la politique tarifaire restant inchangée. Des recettes commerciales croissantes sont cependant attendues : le restaurant va ouvrir le week-end midi et soir, et à terme en semaine, pour ancrer le bâtiment dans la vie du quartier. C’est enfin par les partenariats et les coproductions que Marc Dondey veut atteindre d’ici à 2022 les 10 millions d’euros de budget annuel, aidé en cela par Bertrand Jacoberger, industriel et collectionneur… mulhousien, qui a pris la présidence de la nouvelle structure.

Légendes photos

Marc Dondey © Photo Tonje Thoresen
Façade de la Gaîté-Lyrique © Manuelle Gautrand architecture - photo Vincent Fillon

Thématiques

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°471 du 20 janvier 2017, avec le titre suivant : Une nouvelle Gaîté-Lyrique

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