L’édition 2006 de PHotoEspaña à Madrid et Tolède déploie un éventail du naturel, des portraits de tradition extrême-orientale aux paysages intérieurs.
MADRID, TOLÈDE - Ceux qui ont besoin de leur dose de chlorophylle quotidienne, voient l’art comme un écosystème et pleurent la disparition des saisons devraient trouver satisfaction dans l’édition 2006 de PHotoEspaña, qui a pour thème « La nature ». Une bonne dizaine de lieux présentant plus d’une vingtaine d’expositions composent la section officielle du festival, alors que la programmation « off » occupe une trentaine de galeries et autres structures.
L’aspect enchanteur du paysage est à coup sûr un domaine maîtrisé par les artistes asiatiques. Un jeune espoir Japonais, Rinko Kawauchi, réalise des portraits dans la plus pure tradition extrême-orientale, avec son légendaire sens du détail. Au Centro Cultural de la Villa, sous le titre de « La Terre, mère » réunissant aussi les visions postindustrielles du Britannique John Davies et les vues de chantiers très graphiques du Canadien Edward Burtynsky, Kawauchi présente la puissance d’une vague en pleine mer, la douceur d’un éclair fissurant le ciel nocturne, un nourrisson après sa tétée ou encore un groupe de flamants roses. Au Jardin botanique, le Japonais Takashi Yasumira, avec un sens précis de la mise en scène, transforme un simple intérieur en une féerie dans laquelle un oiseau prend son envol depuis un napperon glissé sur la télé ou une tapisserie fixée au mur. Figure de la jeune photographie coréenne, Bae Bien-U donne dans la profondeur et le mystère avec ses séries de pins et ses lacs peuplés de nénuphars présentés au Musée Thyssen-Bornemisza.
Romantique, pittoresque, urbanisé à outrance…, toutes les formes du paysage sont abordées dans l’exposition « Du paysage récent », au Musée des Collections ICO. Parmi les artistes convoqués, Rodney Graham, avec ses arbres inversés, en revient aux premiers gestes de la photographie liés à la camera oscura. Le thème est revisité par la Fondation Astroc avec l’exposition « Paysage naturel dans la collection photographique de l’IVAM », qui réunit Wenders, Ralph Steiner, Lothar Baumgarten, Hamish Fulton, Gerhard Richter…
Plus politique, Vesselina Nikolaeva, au Musée municipal d’art contemporain, nous met face à une Bulgarie misérable et à ce qu’il est possible d’en espérer à l’ère postcommuniste.
Oiseaux disparus
À la Casa de América, le Brésilien Caio Reisewitz présente des vues du Brésil, de ses transformations socio-économiques et urbanistiques, et ce dans un esprit d’objectivité typique de la photographie allemande des années 1970 et suivantes. L’historique Karl Blossfeldt a lui aussi influencé cette école : au Centro Cultural Conde Duque, son herbier photographique noir et blanc est présenté, brin par brin, avec un sens du motif qui tend vers l’abstraction. D’autres abordent la nature sous un aspect plus écologique, comme la Catalane Mireia Maso, exposée au même endroit. Son projet en Antarctique nous entraîne dans les transformations d’un paysage gelé qu’on imaginerait éternel. Pour rester dans les basses températures, Olafur Eliasson, connu pour ses installations mêlant avec poésie art et science, offre cette fois des photographies panoramiques. Des horizons islandais gelés qui nous donnent une idée du territoire vierge postérieur au passage de l’homme. Plus alarmiste, Chris Jordan évoque les ravages du cyclone Katrina au Círculo de Bellas Artes, tandis que Manfred Willmann dresse un portrait humoristique, voire cynique, d’un monde rural kitsch et aux couleurs criardes. Cristóbal Erra laisse pour sa part une grande place à la nature animale, au Consejería de Cultura y Deportes. Quant à Suki Best, visible à l’Hôtel NH Nacional, elle nous place au cœur d’une illusion numérique dans laquelle sont réintégrés insectes et oiseaux disparus…
Au Mataredo Madrid, Daniel Garcia Andújar nous renvoie, lui, aux paysages rencontrés sur Internet. Tandis que l’exposition de groupe du Consejería de Cultura y Deportes propose « L’espace intérieur ». Une dizaine de jeunes artistes comme Leandro Erlich – spécialisé dans le trompe-l’œil –, le prometteur Jonas Dahlberg ou encore Dan Graham et Sam Taylor-Wood y mettent en perspective leur monde intérieur à travers photographies mais aussi installations et sculptures.
Jusqu’au 23 juillet, divers lieux à Madrid et Tolède, Espagne, swww.phedigital.com
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Tous les goûts sont dans « La nature »
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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°240 du 23 juin 2006, avec le titre suivant : Tous les goûts sont dans « La nature »