L’architecte japonais est connu pour ses ensembles aux composantes anthropologique et urbanistique.
Chicago (États-Unis). Son nom n’a jamais circulé parmi les gagnants potentiels mais c’est pourtant celui qui a été prononcé le 5 mars dernier à Chicago. À 78 ans, Riken Yamamoto est le lauréat inattendu d’un prix Pritzker qui souhaite désormais, chaque année, transmettre un message à la profession à travers ses distinctions : l’importance de la réhabilitation avec Anne Lacaton et Jean-Philippe Vassal (2021), celle des matériaux résilients et adaptés avec Diébédo Francis Kéré (2022), la durabilité dans la conception avec David Chipperfield l’année passée. En choisissant Riken Yamamoto, le jury – présidé par un autre récipiendaire surprise du prix, le Chilien Alejandro Aravena (2016) – met en lumière la dimension sociale du travail d’architecte.
Riken Yamamoto naît à Pékin, à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Ses parents retournent en 1947 dans un Japon dévasté, où sa mère tient une officine de pharmacie dans une machiya, la maison traditionnelle des commerçants de Kyoto, qui ménage espace privé et espace public : une forme qui influencera ses travaux. Il se forme à l’architecture à l’université Nihon, puis à l’Université des arts de Tokyo où il rencontre son mentor, l’architecte Hiroshi Hara. Diplômé en 1971, il fonde son cabinet Riken Yamamoto & Field Shop en 1973.
Tout juste sorti de l’Université, le jeune architecte s’embarque dans un voyage autour de la méditerranée en compagnie de l’architecte Hiroshi Hara. Il découvre les paysages urbains de Grèce, d’Italie, de Turquie. Dans son ouvrage Cell City (1999), il confiera l’importance de la découverte des villes du Maroc dans sa réflexion : il y voit un modèle alternatif à la planification urbaine, où la ville se développe de manière organique au gré des besoins. Décriant les architectes et urbanistes qui imposent les usages des lieux qu’ils conçoivent à leurs habitants, il qualifiera l’urbanisme moderne de « parfait exemple d’un régime totalitaire ».
Développant une réflexion fine sur l’habitat collectif, les projets les plus notables de Riken Yamamoto sont des ensembles résidentiels. Le complexe Jian Wai Soho, livré en 2004 à Pékin, le Gangnam Housing construit en 2012 à Séoul sont emblématiques de ses préoccupations pour un aménagement modulaire et évolutif des espaces intérieurs, ainsi que de l’attention qu’il porte aux liaisons entre espace privé et espace public. Les vertus sociales de son architecture lui ont également permis de réaliser de grands équipements publics au Japon : l’université de Saitama (1999), de Hakodate (2000), de Nagoya (2022), ou encore une caserne de pompiers ouverte sur la ville à Hiroshima (2000).
Féru de sciences sociales et d’anthropologie, Riken Yamamoto est l’auteur d’un travail théorique sur l’architecture. Il forge ainsi au début des années 2010 le concept de « Local Community Area Model », une approche qui propose de concevoir le logement à partir non pas de l’échelle d’une famille, mais d’une communauté. Cette critique du modèle de l’habitat individuel, considéré par l’architecte comme un modèle obsolète, propose de mettre en commun certaines fonctions du logement tout en garantissant un espace privé. En 2012, il formulait ce plan comme une réponse à la spéculation immobilière et à la difficulté d’accès au logement pour les classes populaires : encore une fois, un Pritzker d’actualité.
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Riken Yamamoto, prix Pritzker 2024
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°629 du 15 mars 2024, avec le titre suivant : Riken Yamamoto, prix Pritzker 2024