Longtemps tombée en désuétude, une drôle de matière a refait son apparition, en avril, au dernier Salon international du meuble de Milan : le « granito » – aussi appelé « terrazzo ». Employé traditionnellement dans le nord de l’Italie dès le XIIIe siècle et jusqu’à son apogée au XVIIIe siècle pour réaliser, notamment, les vastes sols des palais vénitiens, ce matériau de construction est constitué de granulats colorés – fragments de marbre, de quartz, de verre ou autre… – agglomérés à l’aide de ciment, le tout poncé et poli jusqu’à lui donner l’apparence du granit, d’où son nom. Avantages essentiels : il arbore la finition du marbre sans sa fragilité, et offre, en outre, une grande variété de nuances. Certes, quelques créateurs téméraires ont déjà transposé le matériau de la 2D, le revêtement de sol, à la 3D, sous la forme de meubles et d’objets, mais ils s’étaient, curieusement, cantonnés à un exercice en particulier : la table, qu’il s’agisse du plateau ou de ses quatre pieds. Ainsi en est-il des tables Granito de Jean Prouvé (1945) et Kyoto de Shiro Kuramata (1983) ou, plus près de nous, Drilling de Naoto Fukasawa (2009).
Cette année, grâce à l’imagination débridée de jeunes designers, le granito explore des voies nouvelles. Avec la collaboration d’artisans transalpins de la région du Veneto (Italie), les Canadiens Stéphane Halmaï-Voisard et Philippe-Albert Lefebvre ont conçu une collection intitulée « Terrazzo Project » (www.terrazzoproject.com), laquelle se compose, pour l’heure, d’un tabouret, d’une table, d’une étagère et d’une suspension. De son côté, un designer tout juste diplômé de l’École cantonale d’art de Lausanne (ÉCAL), Joschua Brunn, a dessiné une astucieuse lampe baptisée Petit Central, du nom d’un bar lausannois. C’est là qu’entre en jeu ledit granito : « J’ai d’abord choisi ce matériau pour des raisons purement esthétiques : il est à la fois simple et beau », explique Joschua Brunn. Mais ce dernier avait surtout besoin d’un matériau suffisamment « pesant », au sens propre du terme : « Je cherchais un matériau lourd afin de réaliser le socle de la lampe, un matériau qui pourrait assurer une stabilité à toute épreuve. » D’où le choix du granito pour fabriquer cet élément d’équilibre indispensable, lequel a pris les contours d’un cylindre haut. « La forme de ce socle fait penser aux « carottes » de chantier, ces beaux sondages cylindriques que l’on effectue par forage pour étudier la nature d’un terrain et qui sont truffés de minéraux divers », souligne Joschua Brunn. Ledit socle est ensuite transpercé par un élément horizontal pivotant, en plastique, qui loge l’éclairage proprement dit et qui se révèle très léger, ce qui permet à l’utilisateur de le manier très facilement. Ce mécanisme, en outre, arbore à une extrémité une tête de lecture multidirectionnelle garnie de diodes électroluminescentes (LED). L’objet se révèle, au final, des plus élégants. Ne reste plus désormais à Joschua Bruun qu’à trouver un… éditeur.
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Portrait d'objet - La lampe « Petit central »
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°377 du 19 octobre 2012, avec le titre suivant : Portrait d'objet - La lampe « Petit central »