Centre d'art

Les explications de Marina Abramovic sur son projet abandonné de centre d’art

Par Shahzad Abdul (correspondant à Washington) · lejournaldesarts.fr

Le 17 novembre 2017 - 588 mots

NEW YORK (ETATS-UNIS) [17.11.17] - L’artiste avait collecté plus de 2 millions de dollars pour un projet de centre d’art à New York, finalement abandonné. Mais l’argent a en partie disparu. Marina Abramovic tente de s’en expliquer au Journal des Arts.

Marina Abramović - Photo Manfred Werner, 2012 - CC BY-SA 3.0 DEED
Marina Abramović.
Photo Manfred Werner, 2012

S’ils pouvaient replonger leurs yeux dans ceux de Marina Abramovic, comme lors de la rétrospective au MoMA en 2010 qui avait fait d’elle une superstar, ses donateurs briseraient probablement le silence pour lui demander des comptes.

L’artiste conceptuelle et corporelle âgée de 70 ans, adepte des performances extrêmes, a abandonné en octobre le projet de créer son institut d’art expérimental à Hudson, dans l’État de New York. Depuis, plus rien.

Ses soutiens, ses donateurs se sont longtemps interrogés : reverront-ils la couleur des 2,2 millions de dollars (1,9 M€) qu’elle a levés selon le New York Post sur une plateforme de financement participatif en ligne, et par le biais de son organisation à but non lucratif ? Au total, 4 765 philanthropes lui ont permis de récolter 661 452 dollars sur Kickstarter en 2013 et le 1,5 million restant a été glané par des dons entre 2011 et 2015, selon des avis d’imposition consultés par le quotidien. Malgré cela, celle qui resta assise et immobile durant 700 heures au MoMA ou qui se flagella pour les besoins de ses expériences, a reculé devant le prix exorbitant de son projet : 31 millions de dollars.

Dans un communiqué envoyé au Journal des Arts, l'artiste née en ex-Yougoslavie répond point par point aux interrogations et aux accusations « fausses » et « diffamatoires » du Post. Jouant sur le titre de sa présentation au MoMA, « The artist is present », le journal avait en effet ainsi résumé l’affaire : « L’artiste est présente, mais l’argent s’est évaporé ».

« Je rejette les accusations de vol du New York Post », écrit Marina Abramovic. « Le projet Kickstarter avait été créé pour financer une esquisse architecturale par (le cabinet) OMA New York. La facture que l'on a reçue de l'entreprise pour ce travail précis était de 655 167 dollars. Les fonds Kickstarter ont été utilisés ce pour quoi ils ont été levés », écrit-elle, précisant qu'après les frais de la plateforme, sa levée de fonds lui a rapporté 596 667 dollars nets.

« Lorsque nous avons reçu la proposition d'OMA New York, nous avons été époustouflés par l'originalité et la beauté du projet. Toutefois, ils nous ont informés que le projet coûterait plus de 31 millions de dollars. Nous avons cherché une solution rentable avec OMA New York et un consultant mais le bâtiment avait beaucoup de problèmes pour que cela puisse fonctionner dans un budget raisonable. » Le bâtiment, devenu une épine dans le pied de Marina Abramovic, sera mis en vente, a-t-elle fait savoir.

Kickstarter, qui stipule que « lorsqu’un projet est financé avec succès, le créateur doit le mener à bien », a également donné raison à l'artiste, selon sa charte. « Ce projet était destiné à financer une phase de design de l'institut de Marina, et cela est regrettable que l'institut ne verra pas le jour », explique David Ninh, responsable chez la plateforme, au Journal des Arts.

« Sur les quatre dernières années », conclut Marina Abramovic, « la vision originale de l'institut a évolué et je suis très fière de ce travail ». Entre les lignes, ceux qui l'ont aidé à financer son projet en auront au moins le coeur net : leur argent a servi à payer un coup de poker. Perdant.

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Marina Abramovic © Photo Manfred Werner

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