PARIS
Le cerveau fonctionne parfois comme un vieux juke-box, et c’est avec un air de la Compagnie créole que l’on se rend au BAL Café (« ohé, ohé »). Il faut que cela cesse !
Heureusement, une chanson de Bashung nous accueille au restaurant du BAL (le BAL Café x Otto), où l’on retrouve avec plaisir les banquettes en velours vert, le grand miroir rond sur le mur du fond, le bar et son comptoir quadrillé à la Mondrian ouvrant sur la cuisine à petits carreaux noirs et blancs. Derrière la place de Clichy, au fond d’une impasse que borde un square de poche, l’adresse fait partie de celles qu’il faut connaître – un peu en retrait, précieuse. Durant les Années folles, lit-on sur le site Internet du Bal, le 6, impasse de la Défense accueillait un cabaret, un « hôtel d’amour » et une salle de danse. Le lieu, dans sa configuration actuelle, est désormais une plate-forme d’expositions, de production, d’édition, de rencontres et de débats autour de l’image (photographie, vidéo, cinéma, nouveaux médias) et de ses enjeux autant politiques qu’esthétiques. Il a pour président fondateur Raymond Depardon et pour directrice Diane Dufour, ancienne directrice Europe de Magnum Photos.
Depuis l’ouverture en 2010, les toques ont valsé côté restaurant. Arrivée aux fourneaux en 2020, Morgane Lovero, une jeune cheffe qui a fait ses classes en pâtisserie, impose son style en douceur. De son expérience pâtissière, elle a gardé le sens de la rigueur et de la gourmandise. Ses assiettes sont travaillées, ses recettes, volontiers végétales, conjuguent la recherche du bien-être et de l’émotion gustative. Ce jour-là, son velouté de carotte violette est réveillé par une pointe âpre de cumin et par le croquant de quelques graines toastées. Cette rondeur en bouche et cette précision dans les textures se vérifient dans son merlu à la plancha servi avec un risotto aux champignons et des chips de topinambour. Onctueuse, fondante, croustillante, c’est une cuisine allègre. Une pointe de poivre Timut saupoudrée sur un cheesecake aérien, quelques paillettes d’algues nori sur la meringue du crémeux au citron : au moment du dessert, la cheffe s’amuse. Des nourritures terrestres aux nourritures spirituelles, il n’y a qu’un pas. Visible depuis le restaurant, la librairie est spécialisée dans la photographie. Une affiche y annonce la formidable exposition en cours, dédiée au travail du chorégraphe et plasticien Éric Minh Cuong Castaing, filmé par Victor Zébo. Intitulée « Forme(s) de vie », elle donne à voir la force et la fragilité de corps empêchés, réanimés par la danse.
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Les assiettes swinguent au BAL
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°751 du 1 février 2022, avec le titre suivant : Les assiettes swinguent au BAL