Frac

Les 22 régions et la culture

Par Le Journal des Arts · Le Journal des Arts

Le 16 février 2010 - 2906 mots

Entre 1,8 à 5 % des budgets globaux des régions sont destinés à la culture. Selon les endroits, la mise en valeur du patrimoine ou le soutien aux arts visuels figurent parmi les priorités.

RÉGION BRETAGNE : BUDGET ALLOUÉ À LA CULTURE - 2,97 %

Alsace
L’une des deux régions restées à droite en 2004, l’Alsace consacrera 15,2 millions d’euros à la culture en 2010, soit 1,95 % du budget primitif 2010 – hors crédits reportés. Ce budget s’élevait à 11,5 millions d’euros en 2004, mais représentait alors 3 % du montant global. Comme le montre l’obtention du label « Ville d’art et d’histoire » par Mulhouse en 2009, l’Alsace est attachée à son patrimoine historique (les deux grands châteaux forts du XIIIe siècle, Hohlandsbourg et Lichtenberg, viennent d’être restaurés) et à son identité culturelle (le bilinguisme est une priorité).

Que les musées mobilisent les fonds alloués à la culture tombe sous le sens : la région versera 2 millions d’euros pour la restructuration du Musée de l’automobile, à Mulhouse, et un minimum de 3,6 millions pour l’extension, signée Herzog & de Meuron, du Musée d’Unterlinden, à Colmar. L’aggrandissement du Musée alsacien, à Strasbourg, est quant à elle encore à l’étude. Selon les derniers sondages, Europe Écologie arriverait en deuxième position aux élections régionales, recentrant l’enjeu sur le développement durable. Une tendance retenue par l’Alsace pour son pavillon à l’Exposition universelle de Shanghai.

Aquitaine
Pôles régionaux de développement culturels, valorisation du patrimoine, soutien aux langues régionales, promotion de l’économie et de l’emploi culturels : la région Aquitaine a initié une politique culturelle très classique. Ses financements, en hausse de 18 % en 2010 (25,7 millions d’euros, soit 2 % du budget global), sont d’abord destinés à assurer un bon maillage territorial d’équipements, mais aussi à soutenir les quatre coûteux équipements nationaux de la région, situés à Bordeaux, Biarritz
et Bayonne.

Auvergne
Ses 12,4 millions d’euros dévolus à la culture, soit seulement 1,9 % de son budget, ne font pas de l’Auvergne la plus dépensière pour la culture. Mais cette région rurale est l’une des rares à avoir sollicité le transfert d’un monument historique, le domaine royal de Randan, coûteux en travaux de restauration. Son Fonds régional d’art contemporain, longtemps mal logé (lire le JdA no 318, 5 février 2010), vient par ailleurs de faire l’objet d’une installation dans de nouveaux espaces (800 000 euros à la charge de la région) . Le spectacle vivant n’est pas en reste, avec plus d’un million d’euros alloués aux grands festivals (court-métrage à Clermont-Ferrand, musique sacrée à la Chaise-Dieu).

Bourgogne
Avec ses 2 000 édifices classés, la Bourgogne a sans surprise d’abord misé sur l’entretien et la mise en valeur du patrimoine. Pionnière en matière de protection du patrimoine rural non protégé, elle est aussi l’organisatrice d’un prix régional du Patrimoine. La région a également repris un ancien monument de l’État, la forteresse de Châteauneuf-en-Aixois. Et, en 2010, son effort principal concernera le 1 100e anniversaire de l’abbaye de Cluny. Son budget 2010 consacré aux loisirs, sport et culture s’élève à 26,03 millions d’euros, soit 3,4 % du total.

Bretagne
Avec 34,3 millions d’euros, dont plus de 5 millions en faveur de la promotion de la langue bretonne, la région a développé une ambitieuse politique culturelle, axée sur trois objectifs transversaux : encourager les démarches et les pratiques artistiques, favoriser la circulation des œuvres et des artistes, et promouvoir la transmission de la culture. Elle ne rechigne pas non plus à investir. Outre le lancement d’un projet de bibliothèque numérique régionale, le nouveau bâtiment du FRAC (Fonds régional d’art contemporain), à Rennes, sera inauguré courant 2011. Conçu par l’architecte Odile Decq, il est financé à 40 % par la région (7 millions d’euros).

Centre
Même si elle préfère miser sur l’environnement, le développement durable, la formation et l’éducation, la région Centre ne néglige pas pour autant le volet culturel. Sur un budget global de 995 millions d’euros pour 2010, 5 % sont consacrés à la culture et aux sports tous les deux confondus (soit 49,7 millions d’euros). La région s’appuie sur le travail de lieux comme le domaine de Chaumont-sur-Loire, propriété de la région depuis 2008 devenue dans la foulée établissement public de coopération culturelle, chargé de mettre en valeur le patrimoine du site mais aussi de soutenir la création contemporaine. En 2009, la région a également mis sur pied des ateliers de développement culturel pour diversifier ses actions et répondre aux enjeux de la « démocratisation de la culture », un sujet largement développé lors du Forum de la culture en région Centre, organisé le 12 mars 2009, à Blois.

Champagne-Ardenne
Le spectacle vivant a toujours été le secteur le mieux soutenu par cette région, qui consacre 14 millions d’euros à la culture, soit 2,3 % de son budget. Depuis le transfert de l’inventaire, les préoccupations patrimoniales se sont toutefois renforcées. La région soutient également les huit structures nationales de création et diffusion du spectacle vivant.

Corse
La collectivité territoriale de Corse consacre 23 millions d’euros à la culture (3 %), affectés selon des axes définis en 2006 : égalité d’accès à la culture, préservation et développement de l’identité corse, création et production artistiques. Bénéficiant d’un statut à part, la Corse s’est vue transférer, dès 2003, quinze immeubles classés appartenant à l’État (tours littorales, sites archéologiques, églises, citadelle). Elle est aussi l’une des premières régions à avoir créé un musée régional, le Musée de Corse de Corte (1997). Un projet de centre régional de conservation préventive des objets mobiliers de Corse, à Calvi, financé à 43 % par l’État, est par ailleurs à l’étude.

RÉGION FRANCHE-COMTÉ : BUDGET ALLOUÉ À LA CULTURE - 2 %

Franche-Comté
Parmi les douze grands projets que la région a décidé de mettre en avant en 2010, la Cité des arts et de la culture, à Besançon, arrive en bonne position. Cette ancienne friche industrielle de 2 hectares, située sur le port fluvial, doit être transformée par l’architecte japonais Kengo Kuma en un vaste centre dédié à la musique et l’art contemporain, en intégrant notamment le conservatoire et le Fonds régional d’art contemporain. Ce projet, lancé en partenariat avec l’État, promet d’être exemplaire en matière d’environnement. La Franche-Comté a prévu de consacrer 2 % de son budget 2010 à la culture, soit 12,4 millions d’euros, contre 3 % pour la recherche et l’enseignement supérieur. Elle a soutenu la création du Musée du sel à Salins-les-Bains et le Musée de l’abbaye à Saint-Claude. Mais c’est surtout aux côtés de l’État que la région réalise des projets à grande échelle.

Île-de-France
Avec 29 millions d’euros sur un budget de 4,67 milliards d’euros (0,6 %), la plus grande région française est loin d’être la plus dispendieuse pour la culture. Une situation somme toute logique, Paris et sa région capitalisant déjà de très nombreux financements nationaux et municipaux. La région privilégie trois axes d’action : cinéma, spectacle et livre. Les autres secteurs ne sont pas pour autant négligés : le FRAC (Fonds régional d’art contemporain) bénéficiera de 300 000 euros pour ses acquisitions en 2010 alors que 1,5 million d’euros sera alloué à des programmes de rénovation de musées franciliens. Sans oublier le grand projet de « Philharmonie de Paris », dans lequel la région est partie prenante.

Languedoc-Roussillon
En Languedoc-Roussillon, la culture concentre à elle seule 4,1 % du budget, soit 37,7 millions d’euros, un chiffre qui marque l’engagement du conseil régional. Celui-ci a décidé de prendre dans son escarcelle le Musée de Sérignan qui est devenu, en janvier 2010, le premier musée régional d’art contemporain. Inauguré en 2006, celui-ci, avec sa façade signée Buren, se consacre à la création contemporaine avec des salles d’exposition temporaires et permanentes, un cabinet d’arts graphiques, une salle vidéo, des vitrines expérimentales et une bibliothèque, l’ensemble sur près de 2 500 m2.

La région ne néglige pas pour autant son riche patrimoine (sites antiques et médiévaux) et joue un rôle important dans le domaine de la littérature avec son Centre régional des lettres. Comme en PACA, le conseil général est définitivement convaincu que « la qualité de l’offre culturelle influe sur la fréquentation touristique et l’attractivité économique du territoire ».

Limousin
Cette région rurale est l’une des plus actives en faveur de la culture, avec 20,4 millions d’euros, soit 4,43 % de son budget. Outre une politique de subvention classique à destination du spectacle vivant, les arts plastiques contemporains y sont favorisés. Une dizaine de sites, centre d’art, écoles ou encore résidences d’artistes (Centre international d’art et du paysage de Vassivière, résidence d’artistes La Pommerie à Saint-Setiers, école nationale supérieure des beaux-arts Limoges-Aubusson) bénéficient de larges subsides de la région. Des travaux sont également annoncés au Musée de la résistance de Limoges, à la Cité de la tapisserie à Aubusson et au château de Vassivière.

Lorraine
Le Centre Pompidou-Metz, qui doit être inauguré au printemps, marquera à n’en pas douter l’année culturelle 2010 en Lorraine. La région participe au projet à hauteur de 10 millions d’euros (sur un montant total de 60 millions d’euros, financés pour plus de la moitié par la communauté d’agglomération de Metz). En Lorraine, où le budget global atteint 990 millions d’euros, la culture se voit octroyer 2,4 %, soit 23,7 millions d’euros. Après études, la région rappelle que l’emploi culturel représente 2 % des emplois du territoire et que les projets sont portés par de très petites structures, particulièrement fragiles en temps de crise. Outre les aides aux domaines des spectacles vivants, livre et cinéma, elle s’attache à développer les échanges interrégionaux et, situation géographique oblige, à multiplier les partenariats avec ses pays limitrophes, l’Allemagne, le Luxembourg et la Belgique.

Midi-Pyrénées
Depuis 1998, la région a plus que doublé son budget, qui est passé de 9 millions à 22 millions d’euros. Mais sur un volume global de 1,25 milliard d’euros, elle est pourtant loin d’être la plus généreuse avec la culture (1,8 % du budget). Malgré cela, elle a développé une politique originale de rééquilibrage entre la métropole toulousaine et les territoires ruraux. La région soutient ainsi des projets de territoire privilégiant la pluridisciplinarité. Un autre axe consiste à encourager la langue occitane, mais aussi les arts plastiques (10 % du budget culture). Depuis 2000, le FRAC (Fonds régional d’art contemporain) a été intégré au Musée d’art moderne et contemporain pour constituer le pôle des Abattoirs de Toulouse.

RÉGION RHÔNE-ALPES : BUDGET ALLOUÉ À LA CULTURE - 2,86 %

Haute-Normandie et Basse-Normandie
À gauche depuis douze ans, la Haute-Normandie a vu son budget culturel tripler depuis 1998 (19,9 millions d’euros en 2010, soit 2,15 % du budget). En favorisant la mue du Musée d’art américain de Giverny en Musée des impressionnismes (établissement public de coopération culturelle), la région affirme son statut de fief historique de l’impressionnisme.

Une fierté partagée par la Basse-Normandie (plus de 20 millions d’euros pour la culture soit 2,7 % du budget), qui lui a emboîté le pas en s’associant au festival « Normandie impressionniste » instigué par Laurent Fabius, président de la communauté Rouen-Elbeuf-Austreberthe. Pendant quatre mois, les communes, associations et institutions culturelles des deux régions célébreront cette identité artistique à travers des centaines d’événements divers et variés. Si les uns y voient un catalyseur touristique, les autres y voient des travaux forcés et regrettent que leur mission première soit financièrement délaissée par les régions au profit de la manifestation.

Nord-Pas-de-Calais
Réputée pour son engagement en faveur de la culture, la région Nord-Pas-de-Calais se distingue avec un budget 2010 dépassant les 100 millions d’euros, soit près de 5 % du budget global. Le lancement des travaux du très attendu Louvre-Lens en est une des conséquences directes, puisque la région finance le projet à hauteur de 59 %. Le conseil régional devra par la suite assumer des coûts de fonctionnements qui s’annoncent élevés, tandis qu’une antenne de l’Institut du monde arabe, à l’initiative de la région, serait dans les tuyaux à Roubaix. Certains établissements redoutent que ces grands projets ne grèvent les budgets de plus petites structures, même si la région promet de poursuivre ses aides aux communes les moins bien dotées et au grand mouvement de réhabilitation de sites industriels désaffectés en lieux artistiques.

Particulièrement actif sur la scène culturelle, le conseil régional a une nette tendance à soutenir les projets spectaculaires aux retombées politiques immédiates. Forte personnalité politique, à la tête de la région depuis 2001, Daniel Percheron (PS) est présent sur tous les fronts : il était aussi bien à l’inauguration de la Cité de la dentelle à Calais en juin dernier qu’aux auditions de l’Institut national de recherches archéologiques préventives au Sénat, à l’automne, sans oublier le soutien apporté pour l’inscription du bassin minier sur la Liste du patrimoine mondial de l’Unesco… Mais c’est sans conteste l’inauguration du Louvre-Lens, annoncée pour 2012, qui accapare l’attention du conseil régional.

Pays de la Loire
Avec un budget global de 1,396 milliard d’euros, les Pays de la Loire consacrent 43 millions au domaine des sports, culture et loisirs confondus, soit un total de 3 % du budget global de la région. Son action concerne principalement la musique et les arts plastiques. Rappelons que les autres collectivités du territoire, particulièrement des communes comme Nantes, se montrent des plus entreprenantes dans le domaine culturel. La région intervient donc souvent comme le partenaire de projets initiés par d’autres, à l’instar de la Folle Journée de Nantes, largement relayée.

Picardie
De 2006 à 2007, la région Picardie avait réuni artistes, acteurs de la vie culturelle, publics et privés, pour élaborer un schéma régional destiné à mieux gérer les dispositifs d’aides régionales, consacrées en grande partie au spectacle vivant et à la lecture. Particulièrement inquiet par la réforme des collectivités, le conseil régional a décidé de voter le budget 2010 seulement après les élections régionales. En 2009, le budget global s’élevait à 920 millions d’euros, dont 25 millions (environ 3 %) pour la culture, le sport et les loisirs confondus.

Poitou-Charentes
Bourses octroyées aux Maisons des lycéens, mise en place du dispositif « Créattitude » pour soutenir les projets culturels extrascolaires des lycéens, recrutement d’animateurs culturels dans les établissements scolaires, subventions appuyées aux bibliothèques, manifestations gratuites comme les Nuits romanes (festival proposant des spectacles dans des églises, fleurons du patrimoine roman) : les initiatives de la région en matière culturelle sont largement consacrées à des opérations de « démocratisation culturelle ». Pour 2010, l’enveloppe dédiée à ma culture atteint 30 millions d’euros, soit 4,4 % du budget global. La région mise aussi bien sur le spectacle vivant que sur son patrimoine, comme en témoigne la cinquième édition de l’Université d’automne des professionnels de la médiation du patrimoine, en octobre dernier.

Provence-Alpes-Côte d’Azur
Dotée d’un solide budget pour la culture en 2010 (54,66 millions d’euros sur un budget global de 1,953 milliard d’euros, soit près de 3 %), la région Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA) s’est démarquée avec des actions sur le long terme. En 2001, le conseil régional a ainsi doté son territoire d’une Agence pour le patrimoine antique (devenue depuis Agence pour le patrimoine en PACA), chargée d’exécuter un travail d’inventaire et de mise en valeur des vestiges anciens, un enjeu capital pour ce secteur miné par la déferlante immobilière. C’est aussi la région PACA qui, la première, a lancé une étude, en 2005, témoignant des recettes et emplois que générait la culture (1,2 milliard de revenus annuels en PACA) : le ministère de la Culture s’en était directement inspiré pour lancer une enquête similaire sur le pays entier.

Le choix de Marseille comme capitale culturelle n’a fait que doper une politique culturelle déjà dynamique. Mais, alors que la cité phocéenne peine à lancer la construction du Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée, les travaux du Centre de la Méditerranée, situé également sur l’esplanade de l’ancien embarcadère du port de la Joliette, vont bon train. Lieu d’expositions et de rencontres ouvert à la création contemporaine, cette institution est entièrement subventionnée par la région. Président de la région depuis 1998, Michel Vauzelle part, selon les sondages, largement favori face à Renaud Muselier (UMP), un proche de Jean-Claude Gaudin, récemment nommé président du conseil culturel de l’Union pour la Méditerranée, et délégué spécial pour la préparation de Marseille « capitale européenne de la culture 2013 ».

Rhône-Alpes
Traditionnellement centriste, la riche région Rhône-Alpes a basculé à gauche aux dernières élections. En six ans, le budget alloué à la culture a doublé, passant de 33,7 millions d’euros en 2004 à 70,8 millions en 2010, soit de 2 % à 2,86 % du budget global. Les arts vivants, relayés par un solide réseau d’établissements (opéra, danse, théâtre, littérature, cinéma…), bénéficient d’une politique de soutien déterminée aussi bien en termes d’équipements que de création et de diffusion, et où le jeune public est au premier rang. Les biennales ne sont pas en reste : Lyon et Saint-Étienne ont 11 % et 10 % de leurs budgets respectifs financés par la région.

Le projet phare de cette mandature est, dans le cadre des « Grands projets Rhône-Alpes », le « Design dans la cité » à Saint-Étienne, financé à hauteur de 10 millions d’euros – dont 5 millions pour la Cité du design inaugurée en octobre 2009. Alors que l’opposition dénonce le nouvel hôtel de région créé par Christian de Portzamparc qui verra bientôt le jour dans le quartier lyonnais du Confluent (140 millions d’euros), le président Jean-Jack Queyranne n’hésite pas à dénoncer le « parisiano-centrisme » de la politique ministérielle, en parlant de « bling bling culturel ». À bon entendeur…

Thématiques

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°319 du 19 février 2010, avec le titre suivant : Les 22 régions et la culture

Tous les articles dans Création

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque