Architecture

L’angle du quadrilatère

Par Christian Simenc · L'ŒIL

Le 2 mars 2021 - 403 mots

BEAUVAIS

Beauvais. -  Avec la réouverture du « Quadrilatère », après deux années de fermeture, Beauvais remet en scène ce singulier édifice des années 1970, blotti au chevet, au sens propre comme au figuré, de la cathédrale Saint-Pierre.

Érigé en 1976 par l’architecte André Hermant, ce bâtiment, qui a abrité jusqu’en 2013 la Galerie nationale de la tapisserie, devient aujourd’hui un centre d’art et d’architecture. Moins qu’un polygone à quatre côtés, il vient surtout, le long et à l’intersection des rues Philippe-de-Dreux et Jean-Racine, littéralement épouser un rempart gallo-romain calé à angle droit. Dès l’arrivée devant l’entrée, rue Saint-Pierre, l’édifice interpelle. La construction, d’une discrétion extrême afin, sans doute, de laisser à la cathédrale voisine le soin d’exprimer toute sa culminante autorité, est volontairement basse, un seul niveau que l’on atteint grâce à une volée de marches oblongues. Les façades, qui alternent hautes « meurtrières » vitrées ou larges fenêtres, sont faites d’un béton émaillé du plus bel effet, et le toit est constitué d’une multitude de voutains. Si les volumes sur rue sont, dans leur grande majorité, rectilignes, côté cathédrale, a contrario, André Hermant a multiplié les redents, à l’instar des arcs-boutants et des piliers de culée dudit monument gothique. Ce n’est qu’une fois dans le hall d’accueil, jouxtant l’auditorium, que le visiteur découvre un bâtiment qui, en réalité, se dédouble sur deux niveaux générant, au total, quelque 1 800 m2 d’espaces d’exposition.À l’instar de l’extérieur, l’intérieur, dégagé de tout élément superflu, est lui aussi d’une grande sobriété. Au niveau haut, des puits de lumière cylindriques transpercent les voutains. Hermant a généreusement ouvert les murs, offrant ainsi moult vues sur la cathédrale. Il ménage aussi d’étonnantes perspectives plongeantes sur le niveau inférieur. Ce dernier est un passage incontournable, car il recèle plusieurs « surprises » archéologiques, tels un exèdre des IIe-IIIe siècles, visible à travers une paroi vitrée, ou cette tour de l’enceinte antique, parfaitement intégrée à l’édifice contemporain.L’an prochain, lesdits vestiges seront valorisés grâce à un parcours qui les traversera. L’équipement en son entier fera d’ailleurs l’objet de travaux de restructuration avec, notamment, la création d’un espace pédagogique, de vestiaires ou d’un café. Budget : 8,6 millions d’euros. Lauréat du concours, l’architecte François Chatillon est un spécialiste de la réhabilitation d’architectures phares du XXe siècle. À son tableau : les halles centrales d’Émile Maigrot et d’Eugène Freyssinet, à Reims, la Cité de refuge de Le Corbusier ou la piscine des Amiraux d’Henri Sauvage, à Paris. Bref, pas d’inquiétude !

À savoir
Marqué par l’enseignement d’un as du béton armé, Auguste Perret, avec lequel il collabore à la reconstruction du Havre, André Hermant (1908-1978) œuvre tant dans le champ théorique – il participe activement, entre 1932 et 1939, à la revue L’Architecture d’aujourd’hui– que dans le champ de l’architecture, avec plusieurs réalisations notables, dont le Musée Chagall, à Nice (1969), considéré comme le premier musée moderne français.
À voir
Le Quadrilatère, 22, rue Saint-Pierre, Beauvais (60).

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°742 du 1 mars 2021, avec le titre suivant : L’angle du quadrilatère

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