architecture

Forteresse d’Archives

Jean-Marc Ibos et Myrto Vitart

Par Gilles de Bure · Le Journal des Arts

Le 18 juillet 2007 - 467 mots

Peu à peu, l’ancien oppidum de Beauregard, à Rennes, se renforce. Après une première ligne de défense constituée de soixante-douze piles de granit gris, l’Alignement du XXIe siècle, élevée par Aurelie Nemours, et avant l’édification, prévue en 2008, du puissant et mystérieux bâtiment du FRAC [Fonds régional d’art contemporain] de Bretagne par Odile Decq (lire le JdA no 238, 26 mai 2006, p. 10), voici que s’offre au regard et à l’usage une fortification d’importance. En l’occurrence, le nouveau siège des Archives départementales d’Ille-et-Vilaine signé Jean-Marc Ibos et Myrto Vitart.
Vues depuis l’alignement d’Aurelie Nemours, les Archives composent une ligne horizontale noire, longue de 148 mètres, qui, sans bloquer le paysage, le structure puissamment. Dos noir, flancs noirs, percés de meurtrières horizontales. S’avancer, contourner l’obstacle et le considérer de face. Le basculement est saisissant. De ce côté-ci, la longue ligne est entièrement vitrée, parfaitement transparente, accueillante, amène. Même si l’asphalte noir qui compose le parvis se reflétant dans la façade crée des opacités mouvantes, alors que le mot « archives » qui se détache en lettres géantes sur cette même façade ne fait qu’en augmenter, par un effet de contraste inattendu, la porosité. Quelques lignes, d’un rouge écarlate et marquant l’emplacement des places de parking, viennent rompre l’uniformité noire du macadam.
À l’avant du bâtiment, la maison du directeur, autre cube sombre, fait en quelque sorte office de redoute ; tandis qu’en contrebas, un ancien chemin creux, bordé de chênes, semble être, on ne sait, un redan ou une sape…

7 000 m2 d’intelligence
Il s’agit maintenant d’investir la place forte, dont l’accès s’opère dans la continuité du parvis, avec un vaste hall d’accueil à partir duquel le visiteur s’oriente vers les différents services offerts par le lieu. C’est que le rôle des Archives, depuis quelques années, s’est considérablement modifié. Réservées autrefois aux fonctionnaires et aux chercheurs, elles sont dorénavant accessibles à tous. Et ainsi, de simple « conteneur », elles se sont transmuées en lieu de consultation publique, de conférences, d’expositions…
En centre culturel de la mémoire pour ainsi dire. Autant de services et d’opportunités que l’on retrouve ici à Rennes, où les 78 kilomètres linéaires de stockage voisinent avec un auditorium de 160 places, où les salles d’expositions temporaires cohabitent avec la salle de lecture d’une capacité de 170 places – au mobilier en acier d’une légèreté et d’une élégance rares –, où les bureaux s’accommodent de la présence proche de la cafétéria.
Au total, 7 000 mètres carrés d’intelligence (contenu et contenant conjugués) réalisés tambour battant dans une enveloppe de 20 millions d’euros. Un beau bastion sur l’oppidum qui rappelle qu’en cette année du troisième centenaire de sa mort c’est l’œuvre du maréchal de Vauban, battant Le Corbusier sur le fil, que la France a choisi de présenter à l’inscription au Patrimoine mondial de l’Unesco.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°253 du 16 février 2007, avec le titre suivant : Forteresse d’Archives

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