Faire parler l’art

Les Matrices/Assises d’Agnès Thurnauer sont en effet des sculptures qui s’apparentent à du mobilier. À l’origine de cette série, la volonté de la plasticienne de sortir le texte du cadre de ses tableaux, où sa présence est récurrente. Afin de donner corps aux mots en délivrant un sens ouvert, Agnès Thurnauer a d’abord imaginé des lettres sous forme de pochoirs, comme des caractères d’imprimerie moulés en creux. En les agrandissant à une échelle humaine, elle est parvenue à son objectif d’une immersion physique dans l’espace du langage. Le Musée de l’Orangerie a ainsi inauguré en octobre 2020 l’installation de ses Matrices chromatiques, soit les douze lettres du vocable diffractées dans le bâtiment. Là où les Nymphéas de Monet invitent à plonger dans la couleur, les Matrices leur offrent un écho métaphorique en lien avec le corps, l’architecture et les collections du musée. Dans une réception symbolique, une attention au silence, elles laissent fructifier la pensée au sein de leur empreinte muette. Et ce n’est pas tout. Au printemps prochain, la ville d’Ivry accueillera les vingt consonnes de l’alphabet dans l’espace public. Pour accompagner ce projet monumental, qui prendra place au square de la Minoterie, bordé d’une école et d’habitations, les trois cents riverains se verront offrir sous forme de coffret une édition de voyelles en format réduit et en céramique. Ainsi l’abécédaire sera-t-il au complet pour de nouvelles prises de parole dans la ville, espère l’artiste, qui entend également activer cette installation grâce à un programme de lectures.