Deux institutions niçoises mettent l’action à l’honneur. Traces ou œuvres témoignent d’un autre art pauvre, entre performance et ironie.
NICE - Depuis plus de deux ans maintenant, Éric Mangion entretient à la Villa Arson, à Nice, un programme articulé. Plutôt qu’au seul appétit de nouveauté tapageur, ce dernier répond à une ambition réflexive sur les questions et enjeux de l’art contemporain de ces vingt dernières années. Souvent en collaboration avec des commissaires invités (aujourd’hui avec Marie de Brugerolle), ce programme voit alterner expositions monographiques d’artistes de référence et projets thématiques ou problématiques un peu compliqués. Avec le risque assumé de proposer des expositions ou des figures d’« artistes pour artistes », une visée compatible avec ce qu’est et doit être la Villa.
Objets « idiots »
Avec « Ne pas jouer avec des choses mortes », ce début de printemps s’inscrit ainsi dans le projet de montrer un sujet invisible, ou du moins un matériau artistique problématique : les objets de la performance, que l’exposition prend soin d’entourer de guillemets et d’italique. Le statut artistique de ces machines, dispositifs et autres instruments de la performance, dans leur grande dissemblance formelle, dans leur devenir – entre relique, fétiche et muséification – est une question ingrate et courageuse. La scénographie juxtapose des objets de regard au statut flottant, incertain, souvent lié au récit de leur origine qu’un livret de près de 70 pages communique aux visiteurs. Les pièces de la trentaine d’artistes internationaux réunis ici, venues des années 1980, 1990 et surtout 2000, constituent un parcours parfois déconcertant. Celui-ci relève, ainsi de Spartacus Chetwynd dans la salle carrée, de la reconstitution d’un large espace scénique ouvert. Mais aussi de la frontalité de spectacle plus intime (musical pour Jacques Lizène, cinématographique avec Jim Shaw), rejoignant la frontalité du dispositif de l’installation, et celle, souvent ironique, de la statuaire ou du totem (Paul McCarthy, Erwin Wurm). Il s’y trouve également beaucoup de machines improbables, encore actives (Martin Kersels) ou non (Richard Jackson), voire « activables » avec John Bock. Il faut aussi ajouter quelques panneaux photographiques et vidéographiques, des objets-prothèses, parfois sous vitrine (Brice Dellsperger). Au bric-à-brac des objets souvent pauvres voire « idiots » de la performance, doit répondre une attention soutenue, patiente et comme telle pleinement payée en retour par la diversité et la formidable folie des univers proposés. Dans une histoire de la performance (mais n’est-ce pas là un oxymore ?) qui s’écrit aujourd’hui, « Ne pas jouer… » ouvre une porte.
- Commissariat : Éric Mangion
- Commissaire associée : Marie de Brugerolle
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Éloge de la folie ordinaire
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Abonnez-vous dès 1 €Jusqu’au 24 mai, Villa Arson, 20, av. Stephen-Liégeard, 06000 Nice, tél. 04 92 07 73 73, www.villa-arson.org, tlj sauf mardi 14-18h. Catalogue à paraître aux éditions Presses du réel, Dijon.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°279 du 11 avril 2008, avec le titre suivant : Éloge de la folie ordinaire