Limoges - Rares sont les projets artistiques déployés dans l’espace public qui le font avec discrétion.
La Fondation Bettencourt-Schueller, à travers son prix Liliane Bettencourt pour l’intelligence de la main, vient cependant d’en distinguer un d’une modestie et d’une pertinence réjouissantes. En voici l’histoire. Un céramiste, Gregory Rosenblat, et deux designers, Nicolas Lelièvre et Florian Brillet, se sont associés à l’occasion d’un appel d’offres de la ville de Limoges dans le cadre de son plan de valorisation. Nourrie de nombreux échanges, leur proposition a consisté à effectuer de micro-interventions dans le tissu urbain afin de réparer ou de remplacer, ici un vase, là un pignon, une gouttière ou un carreau manquant en utilisant, à chaque fois, la porcelaine « bleu de four » caractéristique des manufactures limousines. Baptisée Aotsugi, leur œuvre plurielle – une vingtaine de pièces « pansements » dispersées dans la ville – s’inspire de la technique ancestrale japonaise « kintsugi » consistant à réparer des objets ébréchés ou cassés à l’aide de jointures en laque saupoudrée d’or. Technique sous-tendue par une philosophie qui, bien que née au XVe siècle, entre parfaitement en résonance avec les préoccupations de développement durable qui sont aujourd’hui les nôtres. Pourquoi jeter, quand on peut le réparer, un objet dont l’existence se trouve ainsi prolongée ? À l’échelle d’une ville, ce bricolage sophistiqué – résultat de relevés précis et de modélisations en 3D – suggère, remarque Jean de Loisy, président du jury du prix Liliane Bettencourt pour l’intelligence de la main, « le rôle que la société attribue désormais aux métiers d’art : la réparation des excès de l’hyperconsommation qui a entraîné la disparition de la beauté dans l’espace social ». Biscuit contre béton, le chantier est immense.
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De la porcelaine pour panser la ville
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°748 du 1 novembre 2021, avec le titre suivant : De la porcelaine pour panser la ville