Bain commun

Par Christian Simenc · L'ŒIL

Le 21 mai 2019 - 426 mots

Zurich -  On sait les Zurichois fans de baignades, lac oblige. En témoigne le splendide Bad Utoquai, bain public de style mauresque construit au XIXe siècle et planté à même l’eau, au cœur de la ville.

Pas étonnant si cette typologie titille aussi les architectes contemporains. Récemment livré par l’agence zurichoise EM2N, le centre sportif Heuried en est l’exemple phare. Il s’inscrit en lieu et place d’anciens équipements conçus, en 1964, par Fritz Schwarz et Hans Litz, et consiste en la réhabilitation d’un bâtiment existant fort délabré et à l’ajout d’un édifice neuf. Au menu : deux patinoires (une intérieure, une extérieure), une piscine de plein air et des jeux nautiques, un restaurant, sans oublier une ribambelle de vestiaires et de casiers à vêtements. Surface totale : 9 187 m2. Coût des travaux : 77,7 millions de francs suisses.Le centre sportif Heuried arbore, en réalité, deux visages : l’un foncièrement urbain, lorsqu’on arrive de l’avenue Birmensdorferstrasse, qui vient du centre-ville, l’autre plus bucolique, à l’arrière, conséquence d’un programme d’activités mixtes à la fois à couvert et à découvert. « Le volume global généré introduit une échelle complètement nouvelle dans ce quartier », estiment Mathias Müller et Daniel Niggli, fondateurs de l’agence EM2N. Dessinés au cordeau, les volumes tout comme les détails affichent une rigueur on ne peut plus… suisse.Côté ville donc, hormis un subtil bandeau horizontal logé juste en dessous de la toiture, lequel permet d’apporter à l’intérieur une puissante lumière naturelle, un haut parallélépipède de béton brut quasi opaque loge, entre autres, la patinoire interne et ses gradins, une batterie de salles de sport, ainsi que les vestiaires. Côté jardin, en revanche, l’édifice s’ouvre amplement, grâce notamment à un jeu de rampes, escaliers et autres passerelles qui permettent ainsi au visiteur d’admirer l’ensemble du complexe de différents points de vue. A fortiori en est-il, au premier étage, de la large terrasse du restaurant. Mais la pièce maîtresse de cette construction est sans conteste la toiture, spectaculaire. « À cet égard, le toit est un protagoniste central du projet, car il réunit les diverses fonctions internes et externes du programme », confirment les deux architectes. Ajouré côté jardin, il se permet même un porte-à-faux de 16 m du plus bel effet.Les façades, elles, sont habillées de lattes de bois peintes en blanc et gris qui apportent une agréable délicatesse à l’imposant volume de béton. Truffé de plantations multiples, le jardin se fait paysage quasi vallonné, au cœur duquel émergent une vaste piscine entièrement redessinée, des zones « bains de soleil » agrandies et diverses installations aquatiques pour les enfants. Bref, vivement l’été !

À savoir
Auteurs de la Haute École d’art et de design de Lucerne (2016) et de la métamorphose des arches du viaduc de Zurich en magasins et restaurants (2010), Mathias Müller (né en 1966) et Daniel Niggli (né en 1970) savent se faire très lyriques : « En tant qu’enfants post-idéalistes de la génération 1968, nous ne reconnaissons pas une seule grande vérité, mais trouvons dans les fractures de la réalité un terrain d’ancrage pour l’architecture. »
À voir
Sportzentrum Heuried, Wasserschöpfi 71, Zurich (Suisse). em2n.ch

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°724 du 1 juin 2019, avec le titre suivant : BAIN COMMUN

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