Le 24 novembre, Christine Albanel désignera les nouveaux bénéficiaires de ce dispositif de soutien aux métiers d’art.
Avec quinze nouveaux promus – parmi lesquels 11 allocataires –, le nombre des maîtres d’art s’élève désormais à 89 titulaires. Créé en 1994 par le ministère de la Culture, ce dispositif ambitionne de soutenir la transmission des grands savoir-faire de l’artisanat d’art français, en incitant des professionnels aux compétences reconnues à accueillir un élève. À ce titre, une allocation annuelle de 16 000 euros leur est versée pendant trois ans. Depuis 2006, le ministère a élargi le périmètre de ces bénéficiaires. Après l’accueil de salariés de maisons de luxe, membres du très sélectif « Comité Colbert » – sans contrepartie financière –, ce sont désormais des chefs d’atelier du Musée du Louvre et de la Manufacture nationale de Sèvres qui viennent grossir les rangs de la promotion. Ces derniers ne percevront pas d’allocation, mais le coût de l’apprentissage au sein des établissements culturels sera pris en charge par le ministère.
La question de la transmission est en effet l’un des enjeux majeurs de l’avenir d’un secteur à la population vieillissante, où les cessations d’activités sont très souvent liées à un départ à la retraite. Or, dans la plupart des métiers concernés, il faut entre huit et dix ans pour parvenir à former un professionnel. Il y a donc urgence à agir. En avril 2006, Renaud Donnedieu de Vabres, alors ministre de la Culture, s’était lancé dans un plaidoyer en faveur du secteur. Devant le Conseil des métiers d’art, il s’était en effet engagé à initier une grande campagne d’information à destination des jeunes, opération peu coûteuse qui aurait contribué à réhabiliter l’image de ces métiers mal connus, vers lesquels sont souvent orientés les élèves en échec scolaire. Aucune suite n’a été donnée à ce discours. Le Comité Colbert – lassé des promesses ? – s’est donc engagé seul dans cette voie. Alors que le secteur est en expansion, les maisons du luxe peinent en effet à recruter des jeunes professionnels hautement qualifiés. En 2007, un accord a donc été conclu avec le rectorat de Paris pour faciliter l’accueil de jeunes collégiens dans les ateliers et tenter de susciter des vocations. L’expérience s’est révélée positive.
Aucune équivalence
Si les métiers d’art dépendent aussi de l’Artisanat et de l’Éducation nationale, le ministère de la Culture dispose de plusieurs leviers pour pouvoir agir en leur faveur. À commencer par l’amélioration du dispositif des maîtres d’art. Nombreux sont en effet les titulaires à déplorer que cette allocation, destinée à couvrir les frais de la formation, soit considérée comme un revenu et soit donc imposable. Une requalification en prix d’honneur suffirait à obtenir une défiscalisation. Quant aux élèves, leur formation sur trois ans ne leur apporte aucune équivalence, quand les meilleurs ouvriers de France (MOF) gagnent avec le concours un diplôme de niveau bac 3. D’autres chantiers mériteraient aussi d’être portés par la Rue de Valois. Ainsi de l’épineuse question des matériaux réglementés, régis depuis 1975 par la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore menacées d’extinction (CITES), ou « Convention de Washington ». Bois précieux, écaille ou ivoire utilisés par de nombreux métiers spécialisés font l’objet d’une stricte réglementation visant à protéger les espèces menacées. Seuls les stocks entrés en France avant 1975 peuvent être utilisés. En 2005, un amendement insistant sur la garantie apportée par ces professionnels dans l’utilisation de ces matériaux – dont la quantité ne représente que quelques kilogrammes par an – avait été préparé par la Rue de Valois en vue d’être présenté à la conférence des parties qui s’est tenue l’an passé. Il s’est perdu dans les arcanes gouvernementaux, faute de soutien. Deux groupes d’études sur la promotion des métiers d’art ont pourtant été mis en place respectivement au Sénat et à l’Assemblée nationale, mais ils n’ont jamais produit de rapport. En juin 2008, la sénatrice Catherine Dumas (UMP) s’est ainsi contentée, en clôture d’un colloque, d’annoncer son intention « de solliciter le président de la République, afin que des professionnels de ce secteur soient à l’avenir conviés à participer aux délégations officielles lors de ses déplacements à l’étranger ». Initiative louable mais guère suffisante.
De son côté, le ministère montre peu d’entrain pour assurer la promotion de ses nouveaux maîtres d’art. Même si, pour la première fois, les lauréats bénéficient actuellement d’une présentation temporaire aux Gobelins, l’idée d’une grande exposition est restée dans les limbes. En 2006, Renaud Donnedieu de Vabres poursuivait son discours en exhortant à faire de la Galerie des Gobelins rénovée « l’écrin, chaque année, d’expositions institutionnelles, et parmi elles, d’une manifestation de trois mois au moins consacrée aux métiers d’art ».
Une autre question se pose : la Mission des métiers d’art a-t-elle sa place au sein de la délégation aux Arts plastiques ? À l’heure de la réforme du ministère de la Culture, ne serait-il pas judicieux d’envisager son rattachement au secrétariat général, plus à même de lui permettre d’assurer ses missions transversales ?
Du 25 novembre 2008 au 4 janvier 2009, Salon carré, Galerie des Gobelins, 42, av. des Gobelins, 75013 Paris, tlj sauf lundi 12h30-18h30. Catalogue, éd. ministère de la Culture et de la Communication.
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Nouvelle promotion dans un climat d’incertitude
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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°291 du 14 novembre 2008, avec le titre suivant : Nouvelle promotion dans un climat d’incertitude