Vitrine et porte-parole des artistes contemporains, le galeriste défend les créations de son choix et en assure la promotion auprès des collectionneurs et des institutions.
À la différence de l’antiquaire, le galeriste expose, vend et défend des artistes vivants, avec lesquels il travaille « en direct » (c’est ce qu’on appelle le « premier marché »). Financièrement, son revenu repose sur le prélèvement d’une commission pour chaque œuvre vendue – équivalente en général à 50 % de sa valeur –, un apport souvent complété par des activités de second marché (rachat et revente d’œuvres déjà apparues sur le marché), voire de courtage (acquisition d’une pièce pour le compte d’une tierce personne). Mais le métier ne saurait être réduit à son aspect commercial, le galeriste étant à la fois un porte-parole pour les artistes, un prospecteur de nouveaux talents et l’interlocuteur des institutions [musées, centres d’art, Fonds régionaux d’art contemporain (FRAC)…] et des collectionneurs, dont il doit parvenir à gagner la confiance. Gestionnaire averti, il doit en outre se révéler un fin négociateur et un habile « communiquant ». « Son rôle est d’influencer les acteurs influents du marché », résume Nathalie Obadia, qui défend depuis plus de dix ans la peinture française contemporaine. Pour Olivier Antoine, directeur de la galerie Art:Concept, installée à deux pas de la rue Louise-Weiss, à Paris, « le galeriste peut être comparé à une boule à facettes. Il est protéiforme et réfléchit à la lumière des autres ». Aucune formation spécifique n’est requise pour devenir, galeriste mais rares sont ceux qui n’étaient pas, dès leurs débuts, sensibilisés à l’art. Ainsi de Nathalie Obadia qui, si elle a suivi des études de droit et de sciences politiques, a grandi dans un milieu de collectionneurs d’art contemporain, ou d’Olivier Antoine, juriste de formation mais initié dès l’enfance à la recherche de l’objet de collection.
Militantisme
Une bonne connaissance du milieu artistique est aussi des plus précieuses avant de créer sa propre galerie. Elle s’acquiert souvent en travaillant quelques années chez un confrère. « Mon passage chez Daniel Templon m’a permis de nouer de nombreux contacts, notamment avec de jeunes artistes. C’est comme ça que j’ai rencontré Carole Benzaken ou Valérie Favre », raconte Nathalie Obadia. D’autres se sont lancés au culot, sans expérience ni carnet d’adresses. Mais avec une persévérance à toute épreuve. « Je ne connaissais rien ni personne, ne savais même pas ce qu’était un FRAC. Mais je croyais en ce que je faisais », témoigne Olivier Antoine, qui a débuté à Nice avec des artistes issus de la Villa Arson. Même approche du côté de Frédérique et Philippe Valentin (galerie Chez Valentin), qui ont commencé par exposer de jeunes artistes dans leur deux-pièces du Marais, « tout en faisant des petits boulots pour faire tourner la baraque. Il faut une certaine dose de folie et de foi dans les artistes que l’on défend », estime Frédérique Valentin. Comme elle, de nombreux galeristes revendiquent cet aspect militant du métier, et se battent pour la diffusion de la jeune scène française. Tous insistent par ailleurs sur l’établissement de rapports de confiance et d’amitié, avec tant les artistes que les collectionneurs. Le galeriste doit en effet savoir ne pas céder aux sirènes de l’argent facile et de la mode. « On est identifié par les artistes que l’on défend depuis longtemps, analyse Nathalie Obadia. Et il est impossible de surmonter les crises sans un fonds de collectionneurs fidèles. » Pour constituer un tel fonds, il faut être à la fois mobile, assurer l’accueil en galerie comme une présence active dans les foires et salons, disponible et à l’écoute. « Nous exerçons une activité de communication avant tout, qui nécessite de la patience et la curiosité des autres », poursuit la jeune femme.
Savoir anticiper
Autre spécificité du métier : la recherche de l’œuvre rare et de l’artiste prometteur. Celle-ci peut s’effectuer dans les foires et expositions internationales (Art Basel, Manifesta, l’Armory Show à New York), mais les galeristes préfèrent généralement avoir la primeur de la découverte, et privilégient donc la visite d’ateliers et les contacts « en réseau ». « Les artistes déjà présentés par la galerie, les critiques d’art et les collectionneurs constituent de bons relais », explique Nathalie Obadia. « Les échanges entre galeries permettent aussi de renouveler le fonds », précise Olivier Antoine. Mais selon quels critères s’effectuent leurs choix ? Qu’ils privilégient la peinture ou les œuvres expérimentales, les artistes français ou étrangers, ces professionnels s’accordent sur la nécessité de sentir l’air du temps et d’anticiper. Leurs coups de cœur sont ainsi souvent mâtinés de considérations stratégiques. Nathalie Obadia a par exemple connu des débuts fulgurants en proposant des artistes français travaillant autour de la peinture, à une époque où celle-ci était tombée en désuétude, pour ne pas dire en disgrâce. « Cela répondait à une demande non comblée », affirme l’intéressée.
La prospection, de même que l’organisation régulière d’expositions, ne doivent toutefois pas masquer la réalité quotidienne du galeriste, partagée entre l’accueil des visiteurs, les appels téléphoniques et courriers aux différents acteurs de la profession, sans compter l’archivage des dossiers et travaux d’artistes. « On assure beaucoup d’administratif », soupire Olivier Antoine… La galerie une fois fermée, la journée est encore loin d’être terminée. « Les rapports avec les artistes se font en dehors des heures d’ouverture, le soir et le week-end. C’est un métier sans limites… », conclut Nathalie Obadia.
- École du Louvre, tél. 01 55 35 18 00, universités de Paris-I et Paris-IV. Cette dernière propose notamment le DESS « Art contemporain, connaissance et pratique », tél. 01 53 73 71 39. - MST « Métiers de l’exposition » (option Art contemporain), université de Rennes-II, tél. 02 99 14 13 91/87. - École du Magasin à Grenoble (connaissance et maîtrise des outils et techniques de l’exposition), tél. 04 76 21 64 75. - Mastère « Droit et fiscalité du marché de l’art » à l’université Lyon III-Jean-Moulin, tél. 04 78 78 75 20. - EAC (groupe d’enseignement supérieur privé en ingénierie des arts et de la culture), tél. 01 47 70 23 83. - IESA (Institut d’études supérieures des arts), tél. 01 42 86 57 01. - Christie’s Education, tél. 01 42 25 10 90.
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Galeriste d’art contemporain
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°196 du 25 juin 2004, avec le titre suivant : Galeriste d’art contemporain