Depuis la réforme « LMD », les écoles d’art évaluent le DNSEP qu’elles délivrent. Des rapports confirment la modernisation de leurs volets pédagogie et recherche mais peinent à mesurer l’insertion professionnelle.
Professionnalisation et recherche sont les deux faces exigeantes d’une même pièce. En harmonisant leur cursus sur le modèle européen du LMD (licence, master, doctorat), les écoles d’art doivent rendre des comptes à l’agence indépendante chargée d’évaluer leur Diplôme national supérieur d’expression plastique (DNSEP). Entre juillet et septembre, le Haut conseil pour l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES, ex-AERES) a publié vingt-deux rapports concernant autant d’écoles sur les seules « options art » des DNSEP. Les résultats sont encourageants à plusieurs titres, quoique encore insuffisants sur l’étude de l’insertion professionnelle.
Pédagogie
D’un point de vue pédagogique d’abord, hormis quelques excellents établissements généralistes (Strasbourg-Mulhouse, Lyon, Bordeaux), la plupart des écoles ont développé une stratégie de différenciation par discipline, validée par l’inspection. Les écoles acquièrent ainsi une meilleure visibilité nationale et une légitimité de spécialistes. Il en est ainsi d’Angoulême (illustration), d’Avignon (conservation), du Mans (design sonore) (*) ou de Nîmes (édition et culture numérique), dont l’organisation de la formation est saluée. La constitution des écoles en établissement public de coopération culturelle (EPCC) semble aussi avoir porté ses fruits relativement à la capacité à s’ancrer dans l’environnement socioculturel. Ainsi les liens professionnels et artistiques avec le territoire sont-ils particulièrement salués à Montpellier, Nancy, Cergy.
Recherche
Côté recherche, la formation « conférant grade de master » (1) impose une double exigence : la politique scientifique doit proposer un positionnement précis, mais aussi représenter un fondement intellectuel pour l’école. À cette aune, l’école d’Annecy semble exemplaire. Les experts louent l’organisation de sa scolarité et l’originalité de ses processus d’autocritique et de perfectionnement (adossement de la formation à la recherche, évaluations collégiales et individuelles, notation par les étudiants). À Pau-Tarbes, Saint-Étienne et Nancy, la qualité de la recherche est aussi soulignée.
S’appuyant sur les maquettes pédagogiques, le projet des directeurs d’établissement et les publications réalisées, cette première analyse est donc d’abord qualitative, évaluant chaque école en fonction de ses moyens respectifs et des particularités de son territoire. Les rapports encouragent régulièrement la dimension expérimentale, inhérente à certaines activités de recherche.
Insertion professionnelle
Parallèlement, des données quantitatives sont exigées. Elles concernent l’auto-évaluation, les taux de réussite aux diplômes et le suivi du devenir professionnel des diplômés. Ces données, quand elles existent, complètent l’inscription du diplôme au Répertoire national des certifications professionnelles qui permet de déterminer l’adéquation entre le niveau de diplôme postulé (niveau I, dans le cas du DNSEP) et la réalité de l’insertion et de l’employabilité de l’ancien diplômé (niveau de salaire inclus). Sur ce point, le problème ne réside pas dans les résultats, mais dans la méthodologie des enquêtes, qui restent encore lacunaires.
Il y a des exceptions notables, comme à Strasbourg-Mulhouse, où la Haute école des arts du Rhin ne mesure l’insertion qu’après l’avoir intelligemment définie : certes, bon nombre de diplômés perçoivent des revenus faibles, mais l’activité d’un artiste doit s’observer au-delà du prisme des grilles salariales ou des types de contrat (avoir signé un CDI ou un CDD n’est pas un critère opérant pour juger l’insertion professionnelle d‘un artiste). La qualité des outils de professionnalisation au sein de l’école s’en ressent et l’insertion augmente (à hauteur de 90 %) depuis peu. Ailleurs, les enquêtes poussées sont rares (Toulon, Marseille), et peu d’écoles (Nice, Nantes, Arles [2]) ont une association d’anciens élèves dotée de moyens pour cela. Conséquence : les taux de réponses déclarés varient entre 30 % et 80 %, rendant les données difficilement exploitables. Enfin, sur des promotions inférieures à 20 étudiants, le raisonnement en pourcentage trouve ses limites, raison pour laquelle des écoles d’une même région mutualisent leurs enquêtes. C’est le cas en Rhône-Alpes, dont l’intéressante tentative devra cependant ratisser plus large à l’avenir (50 % de taux de retour aujourd’hui) pour être pleinement exploitable.
Si des améliorations sont attendues par le HCERES, l’évaluation 2015 marque déjà une progression par rapport à 2010. La création d’outils, certes partiels, dénote une acculturation à l’évaluation. Dans le contexte d’un budget contraint, la capacité d’auto-évaluation est un outil précieux que de petites mais dynamiques écoles devront continuer à affiner.
(1) lire le JdA no 436, 22 mai 2015, p. 26.
(2) d’autres écoles en disposent, comme l’École nationale supérieure des arts décoratifs de Paris, qui ne font pas partie de cette vague d’évaluation.
(*) Dans Le Journal des Arts n° 445, paru le 13 novembre 2015, l'article "22 écoles d'art au scanner" attribue par erreur la mention "design sonore" au diplôme délivré par le campus de Tours, au sein de TALM, l'école supérieure des beaux-arts Tours Angers Le Mans. Or c'est bien au Mans, et uniquement sur ce campus, que le seul diplôme français conférant grade de master dans ce domaine est délivré. Toutes nos excuses pour l'interversion des deux campus.
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22 écoles d’art passées au scanner
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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°445 du 13 novembre 2015, avec le titre suivant : 22 écoles d’art passées au scanner