Le marchand parisien Daniel Wildenstein a fait appel devant les tribunaux italiens pour récupérer La Danseuse espagnole Anita de la Feria, de Giovanni Boldini. Vendu sous la contrainte en 1942, le tableau est aujourd’hui aux mains d’un collectionneur de Bologne.
PARIS - Daniel Wildenstein avait reçu La danseuse espagnole de son grand-père Nathan en 1930, pour sa bar mitzvah, mais en octobre 1942, le commissariat aux Affaires juives l’obligait à vendre ce tableau de Boldini à un autre marchand parisien, le comte Trotti. D’après Daniel Wildenstein, la peinture fut alors acquise par le ministre allemand des Affaires étrangères, Joachim von Ribbentrop, puis offerte à son homologue italien, le comte Ciano. L’œuvre est demeurée dans la famille du beau-fils de Mussolini avant d’apparaître, vers 1968, sur le marché italien.
En 1989, Daniel Wildenstein retrouvait son tableau lors d’une exposition à Bologne et le faisait saisir par les autorités. Au dos de la toile figurait la lettre "W", qui avait servi aux Allemands à marquer la plupart des peintures de sa collection.
L’année suivante, Daniel Wildenstein intentait un procès au prêteur – Luigi Pazzaglia, un habitant de Bologne – mais il fut débouté et condamné, en 1995, à verser 30 millions de lires (93 000 francs) pour ne pas avoir réussi, selon la cour italienne, à établir le bien-fondé de son action.
À supposer que Daniel Wildenstein parvienne à prouver qu’il possédait autrefois la Danseuse espagnole, une question se pose : peut-il récupérer le Boldini aux termes du droit italien ? Comme tous les systèmes influencés par le code Napoléon, celui-ci favorise le détenteur – "en fait de meubles, possession vaut titre" – et le propriétaire actuel, Luigi Pazzaglia, pourrait donc être tenu pour acquéreur de bonne foi.
Prescription ou pas ?
Mais peut-être les avocats de Daniel Wildenstein invoqueront-ils le décret 601 du gouvernement provisoire de Rome, daté du 5 mai 1946, qui obligeait toute personne détenant des œuvres d’art "à quelque titre que ce soit", à les remettre aux pouvoirs publics dans les trente jours après parution dudit décret, même s’ils provenaient de pays étrangers, et, en tout cas, s’ils avaient été acquis par l’intermédiaire "de l’État allemand, d’organisations ou de sujets allemands". Dans ce cas, la cour d’appel devrait se prononcer sur le fait de savoir s’il y a lieu d’invoquer la prescription, cinquante ans après les faits.
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Wildenstein veut récupérer son Boldini
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°22 du 1 février 1996, avec le titre suivant : Wildenstein veut récupérer son Boldini