Inauguré le 29 juin, le Museumsquartier de Vienne constitue l’un des plus grands complexes muséographiques d’Europe. Espéré depuis les années 1970, attendu depuis trois ans, il se déploie dorénavant sur 45 000 m2 de terrain. La Kunsthalle, le Centre d’architecture, le Musée d’art moderne et le Leopold Museum saisissent ainsi l’opportunité de jouer un rôle majeur sur la scène internationale de l’art contemporain.
Après trois années de travaux menés tambour battant, le Museumsquartier de Vienne (le Quartier des musées) est enfin sorti de terre. Inauguré le 29 juin, le complexe n’est pourtant pas tout à fait fini puisque deux des principaux musées – le Leopold Museum et le Musée d’art moderne – ne seront ouverts que dans quelques semaines. En plein cœur de la capitale autrichienne, dans une zone piétonne, le Museumsquartier devrait rapidement devenir une oasis de culture pour les Viennois. Accessible par dix entrées ouvertes jour et nuit, ce complexe propose une multitude de services, avec ses cafés et restaurants, ses salles de théâtre et de danse, ses librairies et ses boutiques de produits dérivés. Charnière entre le centre historique et le 7e arrondissement de Vienne, le Museumsquartier occupe une situation géographique idéale, bordé par la plus importante avenue commerciale de Vienne, la Mariahilfer Strasse, et l’un des hauts lieux de la vie nocturne, le Spittelberg. Si depuis avril 1998 les travaux de réaménagement et les constructions ont requis un financement colossal de près de 1,2 milliard de francs, ils ont permis la création d’un des plus grands complexes de musées au monde, un projet dont la genèse a cependant été tourmentée. En effet, les premières polémiques concernant ce quartier des musées remontent à la fin des années 1980 (lire le JdA n° 118, 5 janvier 2001). Si la situation géographique du complexe avait recueilli l’assentiment de tous, la sélection du projet architectural a été plus problématique. Situé dans les murs des anciennes écuries impériales, près du Kunsthistorisches Museum et du Musée d’histoire naturelle, le complexe conçu par Fischer von Erlach en 1716 avait déjà été réaménagé avec la construction, à l’intérieur de son enceinte, de quelques pavillons utilisés pour des foires, des expositions et des spectacles. Le grand manège couvert au centre de la cour principale était régulièrement utilisé par des manifestations et le public pouvait facilement accéder au site. Lancé en 1986, un concours international avait conduit à la sélection en 1990 du projet de l’agence Ortner & Ortner. Cependant, sous la pression de l’opinion publique, il a été soumis au fil des années à diverses modifications : la tour qui aurait dû dominer l’ensemble du Museumsquartier a été sacrifiée et la hauteur des deux monolithes destinés à abriter le Musée d’art moderne et le Leopold Museum a, elle aussi, été fortement réduite et compensée par un sous-sol plus important.
Le Museumsquartier va créer une saine émulation au sein des musées viennois. Après avoir fait l’acquisition de l’un des deux anciens emplacements du Musée d’art moderne, l’Österreichische Galerie prévoit de s’étendre au-delà du château du Belvédère. Le Kunsthistorisches Museum a annexé l’ancien Musée ethnologique et le Musée du théâtre, tandis que l’on songe déjà à une extension sous le jardin. Consacrée aux arts graphiques, l’Albertina sera encore fermée pendant deux ans à cause de ses travaux de restauration. Elle se dote, en effet, de vastes espaces souterrains et de nouvelles salles creusées sous le parc adjacent du Burggarten. Autrefois bastions de l’art contemporain, la Sécession et la Künstlerhaus devront veiller à ne pas perdre leur place.
Le Centre d’architecture
Fondé en 1992 avec le soutien de la Ville de Vienne et du ministère de la Culture, le Centre d’architecture consacre ses 2 000 m2 à l’architecture autrichienne du XXe siècle. Déjà présent à l’intérieur du périmètre du Museumsquartier, le Centre s’est vu attribuer par le nouveau projet d’Ortner & Ortner tous les espaces donnant sur trois côtés de la cour Staatratshof. Les trois salles consacrées aux expositions temporaires, la bibliothèque aménagée dans le manège octogonal autrefois utilisé par l’impératrice Sissi pour ses poneys, les archives et un café seront accessibles en octobre. L’exposition “Detonation Deutschland” (Détonation Allemagne) est en revanche ouverte jusqu’au 3 septembre. Elle traite en vidéo de la destruction des édifices sur le territoire allemand à partir de la dénazification, de la fin de la Seconde Guerre mondiale jusqu’à l’élimination à la dynamite du Mur de Berlin, et se poursuit avec les nouvelles cathédrales architecturales de la Postdamer Platz.
La Kuntshalle
Située jusqu’en 1992 sur la Karlsplatz, la Kunsthalle a pris possession de son nouveau siège au sein du Museumsquartier au mois de mai. Premier à s’y installer, ce centre d’art contemporain bénéficie du troisième édifice construit par Ortner & Ortner, un bâtiment de briques rouges disposant inévitablement d’un café et d’une librairie. Inauguré par une performance de Vanessa Beecroft et une exposition consacrée à Steve McQueen, il accueille, jusqu’au 16 septembre, “Eine barocke Party” (Une fête baroque). Des artistes tels que Paul Thek et Wim Delvoye, Jake et Dinos Champman, Yvonne Rainer et Sam Taylor-Wood y abordent les rapports entre art baroque et art contemporain. Plus discret, l’ancien espace du centre d’art sur la Karlsplatz va bientôt accueillir une dépendance de la Kunsthalle.
Le Mumok
Désormais baptisé Mumok, le Musée d’art moderne était partagé autrefois entre le palais Liechtenstein, dans le 9e arrondissement, et le Musée du XXe siècle, dans le 3e arrondissement – une partition qui a évidemment toujours déplu aux directeurs de l’institution. À partir du 15 septembre,
le Mumok occupera un grand bâtiment de basalte au sein du Museumsquartier. Dans cet édifice anthracite, la collection, riche en œuvres de l’Arte Povera et de l’Actionnisme viennois, sera présentée sur cinq niveaux dont deux souterrains, tandis qu’une salle de 340 m2 sera réservée aux jeunes artistes. Le musée disposera notamment d’une bibliothèque réunissant plus de 20 000 volumes, d’un auditorium de 500 places, d’un laboratoire multimédia où se tiendront des séminaires, d’un café et d’une boutique.
Le Leopold Museum
Célèbre dans le monde entier pour ses Schiele, ses Kokoschka et ses Klimt, la collection de Rudolf
et Elisabeth Leopold compte quelque 5 000 tableaux des XIXe et XXe siècles, ainsi que de précieux exemples d’arts décoratifs. Acquise par l’État autrichien en 1994 pour plus d’un milliard de francs,
la collection recevra un siège digne d’elle dans un nouveau bâtiment en calcaire conçu Ortner & Ortner. Le 21 septembre prochain, Rudolf Leopold – qui a été désigné directeur à vie de
cette institution – inaugurera ce nouveau musée dont le dernier des cinq niveaux sera exclusivement consacré à Egon Schiele.
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À Vienne, les Musées ont quartier libre
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°130 du 29 juin 2001, avec le titre suivant : À Vienne, les Musées ont quartier libre