La chaîne d’hôtels Le Méridien fait désormais appel à des artistes pour penser l’aménagement de ses établissements. Le Méridien Étoile à Paris se dévoile le 1er décembre
PARIS. Lorsque les hôtels se piquent d’art, le résultat n’est pas toujours heureux. La politique de la chaîne Novotel, laquelle collectionnait les estampes dont les couleurs épousaient celles des murs a pu ainsi laisser perplexe. Plutôt que de s’engager dans une idée patrimoniale de collection, la chaîne Le Méridien, propriété du groupe américain Starwood, préfère s’associer à des artistes pour homogénéiser sa marque et améliorer son image de belle endormie. L’idée ? Infuser d’ici fin décembre 2008 une unité dans un archipel de cent dix hôtels hétéroclites dans leur offre, leur qualité et leurs services. Depuis deux ans et demi, la chaîne a décidé de réinventer le vocabulaire de la marque en l’articulant sur trois axes : chic, culture et découverte. Pour mener à bien ce toilettage, elle a fait appel à Jérôme Sans, ancien codirecteur du Palais de Tokyo et capitaine du Ullens Contemporary Art Center (UCCA) à Pékin. Sans a d’emblée défini une famille de créatifs, les LM100, comprenant des plasticiens, designers, mais aussi le chef-cuisinier Jean-Georges Vongerichten et la sommelière Linda Grabe. Cette liste de dix-huit personnes, première pierre d’un édifice qui devrait en comporter cent, compte pour l’heure huit artistes : Hisham Bharoocha, Michael Lin, Ralph Gibson, Sam Samore, An Xiaotong, Joan Foncuberta, Younès Rahmoun et Youssef Nabil.
Les dix premières minutes
Tout ce beau monde a été réquisitionné pour travailler sur les dix premières minutes d’arrivée des clients dans les hôtels. « Ce sont des minutes essentielles au cours desquelles un client mesure la qualité des services d’un hôtel. L’idée est de transformer de petits gestes », explique Jérôme Sans. Les artistes se sont donc attaqués à l’entrée en matière, au sens propre du terme, en créant pour chaque hôtel une vitrophanie différente pour chaque portail. Comme si en passant de l’autre côté de la vitre, le visiteur pénétrait un nouveau monde, à l’instar d’Alice au pays des Merveilles. Si aucune thématique n’est imposée, le mot d’ordre tacite est d’éviter la violence et le sexe, « créer la surprise mais dans un effet positif », précise Julien Guitard, de l’agence de communication Item. Une fois franchie la porte, l’usager est assailli de sons inattendus, tels des bruits de feuillages ou d’animal, concoctés par le designer sonore Henri Scars Struck. « Il fallait redonner une temporalité, qu’on sente entre le matin ou le soir des moments différents », indique Jérôme Sans. Le cérémonial du check-in a aussi été revu et corrigé. Le client se voit remettre à son arrivée un plateau, comportant notamment une clé dessinée par l’un des trois artistes, Hisham Bharoocha, Sam Samore et Michael Lin. Celle-ci ne fait pas qu’ouvrir les portes de chambres. Elle donne aussi un accès gratuit à une institution culturelle dans la ville où se situe l’hôtel. Ainsi, Le Méridien de Shanghaï a-t-il signé un partenariat avec le Museum of Contemporary Art (MOCA), celui de Barcelone avec le Musée d’art contemporain (Macba), tandis que le Méridien Étoile s’est associé au Palais de Tokyo. L’expérience sensorielle se poursuit dans l’ascenseur où d’autres sons cocasses attendent le visiteur. Arrivé à la chambre, celui-ci peut tromper l’insomnie avec un livre de contes philosophiques rédigés par Sam Samore. Lancé à Monaco en 2007, ce nouveau concept est inauguré le 1er décembre au Méridien Etoile, dont le portail a été confié aux bons soins de Younès Rahmoun.
En jouant la carte de la synesthésie des sens, le Méridien ne confond-il pas art contemporain et bien-être version Spa ou lounge ? « Mon travail n’est pas celui d’un décorateur, affirme Jérôme Sans. On fait attention à ne pas transformer les artistes en gentils organisateurs. On ne les convie que pour des choses qui résonnent en eux. Pour les créateurs, c’est comme s’ils avaient des commandes publiques dans une dizaine de villes. Hormis Sam Samore, on s’est intéressé à des artistes émergents, pour lesquels c’est professionnellement un plus d’avoir une présence durable. » Quid du coût de cette opération de lifting artistique ? « Mon travail a été de rentrer dans les lignes budgétaires, rester dans les coûts habituels mais avec quelque chose de différent, glisse Jérôme Sans. Ce n’est pas la danseuse de la marque.
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Une chambre en ville
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°292 du 28 novembre 2008, avec le titre suivant : Une chambre en ville