Le directeur de la Fondation Guggenheim a quitté ses fonctions.
NEW YORK - L’annonce du départ de Thomas Krens, 61 ans, de son poste de directeur de la Fondation Solomon R. Guggenheim, a, dans l’ensemble, été bien accueillie par les éditorialistes de la presse américaine. Selon le conseil du musée, ce départ après 20 ans de service serait le fruit d’une « décision mutuelle ». L’homme qui fut derrière le succès fulgurant du Guggenheim Bilbao, celui qui voulut faire de l’art un business à coups de franchises, aurait enfin cédé à la volonté de ses administrateurs. Ces derniers souhaitent aujourd’hui redonner la priorité aux collections de la maison-mère de la 5e Avenue. Dernier avatar de la vision expansionniste de Thomas Krens, le projet du Guggenheim à Abou Dhabi ne se fera pas sans lui, car il restera à la fondation en qualité de conseiller senior aux affaires internationales.
« Un cauchemar culturel »
« Notre long cauchemar culturel est sur le point de s’achever », titrait Jerry Saltz (New York Magazine), avant de dénoncer une programmation tape-à-l’œil (à l’exemple de « Armani », en 2001), une politique d’expansion démesurée s’appuyant sur une structure financière instable – Krens est à l’origine du départ du richissime administrateur Peter B. Lewis en 2005 –, et un tempérament difficile – le musée new-yorkais a cherché en vain à remplacer sa directrice Lisa Dennison partie chez Sotheby’s en juillet 2007. Dans le New York Times, la plus mesurée Carol Vogel rappelle que Krens, titulaire d’un diplôme de gestion de la Yale University, a créé un modèle reproduit par le Louvre, la Tate et le Centre Pompidou. Or, « le succès de Bilbao est en quelque sorte sa débâcle, car il a essayé de le reproduire sans y parvenir », commentait la critique Lee Rosenbaum, sur la New York Public Radio.
Le long soupir de soulagement poussé par les commentateurs du monde artistique cache une volonté de revenir à l’essentiel et de se débarrasser de l’impact déplorable de la politique de Krens, « l’homme derrière le “McGuggenheim” » (Richard Lacayo, Time Magazine). Pour Linda Yablonsky (Bloomberg.com), le musée de Frank Lloyd Wright peut enfin se remettre au travail, se concentrant sur les « collections, la conservation et les expositions d’art moderne et contemporain ».
Le successeur de Thomas Krens prendra les rênes de la Fondation et de ses satellites internationaux, mais aussi celles du musée new-yorkais. D’ici là, les pronostics vont bon train. Le cabinet de recrutement Philips Oppenheim devrait s’intéresser à Michael Govan, directeur du Los Angeles County Museum of Art. Mais le nom de Ann Philbin, directrice du Hammer Museum de la UCLA (Los Angeles), est souvent cité, tout comme celui de Donna De Salvo, conservateur en chef et directrice associée à la programmation du Whitney Museum de New York, dont la Biennale vient d’ouvrir ses portes avec les saluts de la critique. On chuchote également les noms du conservateur français Bernard Blistène, du directeur de la Tate, Nicholas Serota, et de Samuel Keller, récente recrue de la Fondation Beyeler (Riehen/Bâle).
Le départ de Krens est surtout l’occasion pour les acteurs culturels new-yorkais de tirer une leçon, comme le suggère Charlie Finch (Artnet.com, 28 février) : « [Thomas Krens] devenant un mythe, une figure protéiforme de controverse, qui était l’antithèse de l’intimité, le monde de l’art peut aujourd’hui se dire, pour le meilleur comme pour le pire, « Il était notre Dieu » ».
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
So long Krens !
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°277 du 14 mars 2008, avec le titre suivant : So long Krens !