Pour la première fois de son existence, le Musée des arts décoratifs de Paris doit repousser trois expositions faute d’avoir mobilisé les fonds nécessaires à leur financement. Bénéficiant d’une subvention de l’État pour son fonctionnement seulement, l’établissement, une association de droit privé, doit largement faire appel au mécénat. Et subit de plein fouet la crise économique.
PARIS - Ce n’est pas une mais trois expositions programmées cette année que le Musée des arts décoratifs, à Paris, se voit contraint de reporter. « Jules Chéret, de l’affiche au décor », « Mobi boom, le mobilier moderne de 1945 à 1975 » se tiendront finalement en 2010 et « Kate Moss » en 2011. Le musée doit ce revers de fortune à son statut particulier : association privée reconnue d’utilité publique, il ne perçoit de subventions que pour ses frais de fonctionnement et fait appel à des mécènes pour financer expositions, acquisitions ou chantiers de restauration. Cette alliance public-privé voguait à une vitesse de croisière… Or le climat économique tendu de ces derniers mois a fini par gâcher la fête. Des mécènes ont beau tenir leurs promesses, d’autres se sont retirés. Plutôt que de présenter une version tronquée de ces expositions dont l’élaboration a demandé plusieurs années, le musée a préféré les ajourner, le temps de trouver d’autres sources de financement.
Désengagement
La tâche est d’autant plus ardue qu’à chaque projet d’exposition correspond la quête d’un nouveau mécène, sollicité pour des raisons spécifiques – la directrice du musée, Béatrice Salmon, n’hésite pas à parler de « travail de Sisyphe ». Le plus important est d’offrir un retour aux entreprises aspirant à une certaine reconnaissance sociale en plus d’avantages fiscaux. Il y a un an, le musée a tenté d’inverser la tendance en créant son Club des partenaires pour fidéliser les entreprises. Les sommes dégagées (trois « formules » entre 5 000 et 25 000 euros) ont l’avantage de ne pas être affectées à un projet en particulier. Cependant, Béatrice Salmon concède s’interdire « de programmer à trop longue échéance pour générer une souplesse permanente » dans certains espaces du musée. Exposition faite maison à moindre coût, « Hommages à Toulouse-Lautrec affichiste » remplace ainsi au pied levé « Kate Moss » (18 juin). « Madeleine Vionnet, puriste de la mode » (le 24 juin) et « Musique en jouets » (le 25 juin) sont maintenues grâce à la fidélité respective de Natixis et La Grande Récré...
Les échos lointains des difficultés rencontrées par les musées américains paraissent soudain plus proches. Le développement du mécénat dans les musées français est à l’origine d’une concurrence dont les Arts déco sont aujourd’hui les premiers à souffrir. Surtout, il est tributaire de la bonne santé financière des entreprises. Les budgets des musées, qui doivent de plus en plus compter sur l’apport du privé, deviennent aléatoires, surtout pour des thèmes d’exposition « difficiles ». L’exemple des Arts déco démontre la fragilité de ce modèle. Ironie de la situation : la création d’un poste pour renforcer les équipes du musée dédiées au mécénat nécessite l’aval du ministère de la Culture…
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Reports aux Arts déco
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°305 du 12 juin 2009, avec le titre suivant : Reports aux Arts déco