Le commissaire-priseur a su attirer l’attention des médias, dans les années 1980, sur le monde des enchères par sa flamboyance et ses intuitions.
Saint-Tropez, Var. Haut en couleur dans tous les sens du terme, Pierre Cornette de Saint Cyr était le plus connu de tous les commissaires-priseurs. Ce collectionneur assidu avait su populariser le monde des enchères – tout en le dépoussiérant – faisant de chaque vente un spectacle. « Pierre avait beaucoup de charisme et était toujours jovial. C’était une noblesse d’âme, qui ne se laissait pas prendre aux jalousies entre confrères. Si je faisais une bonne vente, il m’appelait tout de suite pour me féliciter. Il ne se prenait pas du tout pour une star, mais il aimait la lumière. C’était son côté méditerranéen », résume Hervé Poulain, un ami intime de plus de cinquante ans.
Né le 1er janvier 1939, à Meknès (Maroc), dans une famille aristocratique issue des Antilles, le jeune Pierre est censé reprendre la gestion des terres familiales. Aussi, il est envoyé en France afin d’y étudier l’agronomie. Mais c’est le droit et surtout l’art qui le font vibrer. Il passe l’examen de commissaire-priseur en 1969, avant de s’associer avec Guy Loudmer et Hervé Poulain. Ce dernier se souvient de leur rencontre à l’examen : « Nous étions les deux seuls à avoir pris le même sujet, “Toulouse-Lautrec et Jérôme Bosch”. En lui demandant ce qu’il avait répondu, il me dit : “J’ai écrit qu’il n’y avait aucun rapport entre eux, sinon que dans les tableaux de Jérôme Bosch, on voyait des personnages qui ressemblaient à Toulouse-Lautrec.” J’ai trouvé cela tellement fort que je lui ai dit : “Toi, je ne te quitte plus !” Cette réponse ne pouvait émaner que d’un esprit supérieur. »
Fort de cette collaboration, il fonde en 1973 sa propre maison de ventes. Très vite, il fait figure d’exception, s’intéressant à des disciplines jusque-là délaissées : les dessins anciens – qu’il a collectionnés avec passion –, mais aussi le design, la bande dessinée ou la photographie. C’est aussi lui qui lance les ventes d’art contemporain en France, sous l’influence de son ami Pierre Restany, fondateur du groupe des Nouveaux Réalistes, avant de se passionner pour les robots japonais des années 1950 et 1960. Rejoint par ses fils aînés, Bertrand puis Arnaud au début des années 1990 – au plus fort de la crise économique –, il parvient à surmonter les difficultés économiques. Si bien qu’en 2014, décision est prise d’investir les espaces d’un superbe hôtel particulier avenue Hoche, deux ans après avoir ouvert une succursale à Bruxelles et avant que la maison ne soit rachetée par Bonhams en 2022. Entre-temps, de 2003 à 2012, le commissaire-priseur préside le Palais de Tokyo.
Au chapitre de ses ventes les plus médiatiques figurent notamment celle du contenu de l’hôtel Claridge en 1977, la dispersion de la succession Kimiyo Fougita, de 2011 à 2013, mais aussi et surtout, depuis 2007, les ventes des collections de l’acteur Alain Delon, dont la dernière s’est tenue en juin. « Jusqu’à la fin mon père a gardé son enthousiasme et sa curiosité, son amour de l’art et de la vie. Sa dernière grande joie professionnelle a vraiment été la vente Delon : 50 ans d’amitié, 50 ans de passion commune », raconte son fils Arnaud, qui retient de son père « sa courtoisie au sens profond du terme, pas comme un masque social mais comme un vrai amour des gens ».
Décédé le 20 août dernier dans une maison de retraite de Saint-Tropez, il a été inhumé le 25 août au cimetière marin. Une cérémonie du souvenir se tiendra à Paris prochainement en l’église Saint-Germain-des-Prés, « sa paroisse », où il aimait assister à la messe le dimanche soir.
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Pierre Cornette de Saint Cyr (1939-2023)
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°616 du 8 septembre 2023, avec le titre suivant : Pierre Cornette de Saint-Cyr (1939-2023)