Rue de Valois

Ministère amer

Par Sophie Flouquet · Le Journal des Arts

Le 25 juin 2009 - 487 mots

Sous le gouvernement Fillon, la culture n’aura pas eu de gardien du temple.

PARIS - À l’heure où nous mettons sous presse, un remaniement du gouvernement est annoncé pour le 24 juin. Depuis la censure partielle par le Conseil constitutionnel de la loi contre le téléchargement illégal, dite « Hadopi », Christine Albanel a sérieusement entamé son crédit auprès de l’Élysée. Nicolas Sarkozy a d’ailleurs réaffirmé le 22 juin son attachement à cette loi devant les parlementaires réunis en Congrès. Nommée Rue de Valois en mai 2007, l’ancienne plume de Jacques Chirac aura pourtant été une parfaite exécutante des desiderata du président de la République. Cela malgré les atteintes à son périmètre d’action orchestrées par l’Élysée, par l’intermédiaire des conseillers du président – dont l’éphémère Georges-Marc Benhamou –, ou encore de Marin Karmitz, producteur de cinéma récemment promu à la tête d’un Conseil pour la création artistique. Las ! Sur tous les points égrenés dans la longue lettre de mission que lui adressa dès sa prise de fonctions la présidence, la ministre s’est exécutée sans rechigner. Ainsi de la réforme du ministère menée dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP), lancée à marche forcée et, selon les syndicats, dans une absence totale de concertation. Mais aussi de la réforme de l’audiovisuel public, pilotée par l’Élysée, ou de la mise en œuvre de la gratuité partielle d’accès aux musées nationaux, après une étude dont une partie des résultats a été trappée… Pour le reste, la ministre a souvent été aux abonnés absents. Ainsi lors des assauts répétés contre les monuments historiques (lire p. 2 et 6), ou encore pour arbitrer la guerre commerciale menée par le Musée du Louvre contre la Réunion des musées nationaux (RMN). Le marché de l’art, que la ministre avait pour mission de « redynamiser », a été gratifié d’un nouveau rapport, dont on attend toujours un début de mise en œuvre. Et quand il a fallu donner l’exemple en proposant de délocaliser quelques services du ministère, c’est l’Inrap (Institut national de recherches archéologiques préventives) que la ministre a désigné, un organisme déjà largement décentralisé en régions… Un (seul) acte de résistance est à porter au crédit de la ministre. Lorsque ses services ont été sommés de réfléchir à la possibilité d’aliéner des œuvres appartenant aux collections nationales – du jamais-vu depuis la Révolution ! –, la ministre s’est appuyée sur les recommandations avisées de Jacques Rigaud, qui a su habilement faire écarter cette proposition. En deux années, Christine Albanel, ministre peu combative et rarement à l’aise sur ses dossiers, n’est donc guère parvenue à redresser la barre d’un ministère de la Culture profondément affecté par la baisse de ses crédits et une réforme menée calculatrice à la main. Interrogée fin mai, en marge de son déplacement à Abou Dhabi (Émirats arabes unis), sur son éventuelle éviction du gouvernement, Christine semblait – de cela aussi – faire peu de cas.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°306 du 26 juin 2009, avec le titre suivant : Ministère amer

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