Musée - Nouvelles technologies

L’immersif, la grande tendance du moment à Museum Connections

Par Alexandre Clappe · Le Journal des Arts

Le 6 février 2023 - 857 mots

Le salon parisien qui a fermé ses portes le 18 janvier confirme le développement des technologies dites immersives pour les musées et autres lieux culturels.

Revivre, expérience de réalité virtuelle créée par la start-up Saola pour le Muséum national d'histoire naturelle. © Saola
« Revivre », expérience de réalité virtuelle créée par la start-up Saola pour le Muséum national d'histoire naturelle.
© Saola

Paris. La 27e édition de Museum Connections (au parc des expositions de la porte de Versailles) présentait de nombreuses innovations ou tendances qui concernent l’expérience de visites au sein des musées, parcs d’attractions, zoos ou sites patrimoniaux. Une bonne part de ces innovations provient des nouvelles technologies, présentes sur une centaine de stands, et particulièrement celles des technologies dites immersives.

Nouveauté de cette édition 2023 : le Village Microsoft. Venue au salon avec six entreprises partenaires, la multinationale de Seattle présentait la technologie HoloLens, des casques à réalité augmentée ou mixte. « La France est le pays le plus équipé de ces casques au sein de ses musées », expliquait Othman Chiheb, responsable HoloLens chez Microsoft France.

À la différence des casques de réalité virtuelle qui coupent le porteur de son environnement – une expérience perturbante pour le cerveau qui ne reçoit plus les informations extérieures –, les casques HoloLens fonctionnent grâce à des lunettes transparentes qui superposent des éléments numériques en trois dimensions à l’environnement réel. Cela permet aux utilisateurs d’évoluer de manière simple et intuitive, de se déplacer facilement et d’interagir avec d’autres personnes qui utiliseraient la même technologie. Contrairement à la réalité virtuelle, la réalité augmentée autorise ainsi les échanges sociaux. Se posant simplement sur la tête, le casque est léger et n’empêche pas de porter des lunettes. Il ne nécessite aucune prise en main de la part du visiteur. Mais il a un coût, autour de 3 500 euros.

L’illusion par l’immersion et la 3D

Le studio Realcast a développé deux applications d’immersion, la première équipant le Musée de la Libération à Paris. Un parcours de trente minutes au sein du poste de commandement souterrain du colonel Rol-Tanguy permet de « vivre » aux côtés des résistants de l’époque, pendant l’insurrection parisienne d’août 1944, tout en faisant la visite du bunker. La réalité augmentée ajoute des informations et offre une narration plus intéressante pour le visiteur, sans avoir à transformer le lieu, qui est assez dépouillé.

Parcours en réalité augmentée développé par Realcast pour le Musée de la Libération - musée du Général Leclerc. © Realcast - Photo Pierre Antoine
Parcours en réalité augmentée développé par Realcast pour le Musée de la Libération - musée du Général Leclerc.
Photo Pierre Antoine
© Realcast

La deuxième expérience en immersion sera proposée en mars prochain au Hangar Y à Meudon. Dans cette ancienne usine de ballons dirigeables, construite pour l’Exposition universelle de 1878, sera retracée l’histoire du lieu, et le visiteur pourra interagir avec les personnages : aider un mécanicien à fixer les pièces de son aérostat, par exemple. L’intérêt de l’expérience se situe dans sa capacité à rendre compte de la taille des objets et des engins techniques, en les recréant à l’échelle, et de pouvoir tourner autour d’eux.

Ces technologies permettent également de « redonner vie » à des espèces animales disparues. La start-up Saola a ainsi créé pour le Muséum national d’histoire naturelle une expérience intitulée « Revivre » [voir ill.] où le visiteur peut voir s’animer devant lui des animaux disparus, comme le dodo ou le tigre de Tasmanie, tout en écoutant l’histoire de ces espèces éteintes : un Compsognathus, un petit dinosaure, gambadait ainsi dans les allées du salon. L’entreprise a également développé pour l’aquarium Nausicaá de Boulogne-sur-Mer, un parcours immersif qui montre des scènes de prédation – comme l’attaque d’une méduse géante par une tortue luth – ou des espèces animales impossibles à trouver dans un bassin, comme le requin-baleine.

Certains exposants présentaient des technologies 3D, sans dispositif à porter, comme la projection d’hologrammes, qui permettent de visualiser des pièces archéologiques fragiles ou reconstituées. Et, version plus classique, des jeux vidéo pédagogiques, comme ceux du portail Ikigai de la Sorbonne, proposaient une promenade interactive du théâtre antique d’Orange à l’époque romaine.

Faire ressentir

L’immersion peut se faire par le son. Au Musée des beaux-arts d’Arras, les capsules sonores de quatre à cinq minutes développées par Musair, une jeune entreprise de la région Nord, racontent l’histoire de dix chefs-d’œuvre de la collection. Celle du Saint François d’Assise recevant les stigmates peint par Pierre Paul Rubens en 1615 décrit la métamorphose spectaculaire du saint en insistant sur les émotions et les sensations physiques ressenties par les personnages du tableau. Les récits utilisent des références contemporaines, adoptant un point de vue qui se veut actuel, afin d’expliquer au grand public les références religieuses, mythologiques ou historiques faisant parfois défaut aux non-spécialistes. Ainsi, la capsule relative à La Mort de Caton d’Utique de Charles Le Brun (1646) est conçue comme un rapport de médecin légiste. Cette expérience sonore gratuite est accessible sur smartphone. Elle se veut clairement vulgarisatrice, à même d’intéresser un public qui irait peu au musée en l’attirant par l’immersion et l’émotion.

Les technologies immersives concernent également les entreprises de son et lumière, dont les équipements interactifs – fauteuils qui bougent et lunettes 3D –, sont plutôt destinés aux parcs d’attractions. La société Triotech montrait une de ses réalisations faisant revivre et ressentir la création de la Chaîne des Puys en Auvergne, et notamment le Volcan de Lemptégy.

Qu’elles aient recours à la réalité virtuelle ou non, la plupart des entreprises de technologie du secteur culturel misent aujourd’hui sur l’impact émotionnel et le sentiment d’émerveillement suscités par les outils immersifs dans des attractions destinées avant tout aux familles et aux jeunes.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°604 du 3 février 2023, avec le titre suivant : L’immersif, la grande tendance du moment à Museum Connections

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