Le contrat de concession avec la Ville de Paris n’est pas rompu, mais devant la situation « explosive » liée à l’occupation des lieux par 400 jeunes migrants, les salariés ont exercé leur droit de retrait.
Paris. Le 28 février, les salariés de la Gaîté-Lyrique ont quitté l’établissement culturel de la Ville de Paris après avoir exercé leur droit de retrait et exprimé leur soutien à leur direction. Dans un communiqué daté du 26 février, les équipes jugent que la situation, après plus de 79 jours d’occupation des lieux par le Collectif des jeunes du parc de Belleville (plus de 400 jeunes migrants), « constitue aujourd’hui un danger grave et imminent pour eux, pour les personnes qui occupent le lieu et pour le bâtiment ».« La situation dans l’établissement est explosive, avec une promiscuité intenable, et les violences liées à cette promiscuité sont croissantes en gravité et en fréquence. Plusieurs alertes incendie ont eu lieu ces derniers jours. Le dernier incident grave étant le départ de feu dans les espaces occupés le 21 février, ayant nécessité l’intervention des pompiers de Paris et de la police nationale. »
Dans ce même communiqué, la Gaîté Lyrique SAS, société gestionnaire de l’établissement culturel, indique avoir « informé, le 25 février par courrier, la Ville de Paris de sa volonté de suspendre le contrat de concession qui la lie à celle-ci, à compter du vendredi 28 février. Sans intervention des autorités d’ici [cette date], la Gaîté Lyrique SAS et ses équipes seront contraintes de quitter le bâtiment et de suspendre l’exécution des contrats des prestataires en charge de la sécurité incendie, de la sûreté, de l’hygiène et la propreté, de la maintenance, de la collecte des déchets ».
Deux coups de semonce qui ont fait réagir la Ville de Paris dont les services assurent depuis le 28 février le gardiennage et la sécurité incendie, le temps qu’une mise à l’abri des 446 occupants ait été négociée avec l’État. La rupture de contrat évoquée n’est cependant plus à l’ordre du jour. « Le contrat de concession avec la Ville est maintenu car il s’agit de trouver une solution pour pouvoir rouvrir la Gaîté-Lyrique », souligne Juliette Donadieu, directrice générale de l’établissement.
Pour l’heure, la Ville de Paris et l’État se livrent à un bras de fer relativement à la responsabilité de la prise en charge des jeunes migrants depuis le début de l’occupation des lieux, le 10 décembre 2024. Une responsabilité qui dépend de l’âge des jeunes, ceux qui sont majeurs relevant de l’État au titre de l’hébergement d’urgence. « Les jeunes hébergés à la Gaîté-Lyrique ayant tous été évalués majeurs, ces derniers relèvent pleinement de la compétence de l’État. Le gouvernement l’a d’ailleurs reconnu à la suite d’une question d’actualité [posée à la ministre chargée du Logement devant le Sénat] par le sénateur [PS] Rémi Féraud le 13 février dernier, indiquant que des places de mise à l’abri seraient proposées jusqu’à la décision du juge », souligne-t-on à la Ville de Paris, qui rappelle que, « depuis décembre 2023, la Ville a pris en charge l’hébergement de 1 173 jeunes relevant de la compétence de l’État dont près de 400 le sont encore ».
Au gouvernement, seul Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, s’est exprimé pour l’instant sur le sujet. Aucune prise de parole du côté du ministère de la Culture. Si la tribune de soutien à la Gaîté-Lyrique a été signée dès son lancement le 27 février par plus de 300 acteurs de la culture, de la politique et de la société civile, Rachida Dati se montre peu encline à se positionner compte tenu de ses rapports tendus avec la Maire de Paris, Anne Hidalgo. Le rapprochement de cette dernière avec Emmanuel Macron depuis les Jeux olympiques de Paris pourrait toutefois débloquer la situation.
Reste la mise à exécution ou non de la décision du 13 février dernier du tribunal administratif de Paris saisi par la Ville de Paris, décision qui ordonne l’évacuation du théâtre de la Gaîté-Lyrique des « 300 jeunes majeurs » dans un délai d’un mois, autrement dit à partir du 13 mars. Jusqu’à présent, la Ville de Paris disait ne pas vouloir exécuter cette injonction tant qu’une solution n’était pas proposée par l’État pour une mise à l’abri de ces jeunes. Pour le gestionnaire de la Gaîté-Lyrique, qui s’inscrit dans cette ligne, chaque jour qui passe pèse néanmoins un peu plus sur sa situation financière. L’avance reçue par la SAS sur la subvention annuelle de la Ville de Paris, soit 1,8 million d’euros sur les 3 millions programmés pour 2025, lui permet de parer pour l’instant aux dépenses, 70 % du budget (9 millions d’euros) étant assuré depuis 2024 par les recettes propres de l’établissement. « Nous ne pourrons pas toutefois continuer à puiser dans nos réserves pendant très longtemps », souligne Juliette Donadieu.
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Les équipes de la Gaîté-Lyrique quittent les lieux
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°651 du 14 mars 2025, avec le titre suivant : Les équipes de la Gaîté-Lyrique quittent les lieux