NEW YORK - Une nouvelle société, MutualArt, vient de lancer le premier fonds de pension américain pour les artistes plasticiens : l’Artist Pension Trust.
Celui-ci leur offre la possibilité de placer leurs œuvres sous forme d’investissement à caractère mutualiste. Conservées pendant une période allant jusqu’à vingt ans, ces œuvres seront ensuite vendues. Une part de la somme recueillie financera alors les fonds de retraite des artistes participants.
Cette société a pour ambition de créer un réseau de fonds à but non lucratif dans le monde entier (à New York, Los Angeles, Londres, Berlin, Pékin, Tokyo et Moscou). Elle assure qu’elle pourrait ainsi créer un empire milliardaire, gérant des milliers d’œuvres d’art.
Le comité de direction de MutualArt est composé de l’homme d’affaires israélien Moti Shniberg, fondateur de la société de codage Image ID, de Dan Galai, professeur d’économie à l’Université hébraïque, gérant de Sigma, un fonds de garantie israélien, et de David A. Ross, ancien directeur du Whitney Museum, à New York, et du Museum of Modern Art de San Francisco. À ce jour, 2 millions de dollars (1,6 million d’euros) ont déjà été réunis auprès d’investisseurs israéliens et américains afin de lancer le projet. Parmi les conseillers de MutualArt figurent les artistes John Baldessari et Kiki Smith, Bruce W. Ferguson, doyen de la School of Arts de l’université de Columbia, Raymond McGuire, coprésident de Morgan Stanley Fusions & Acquisitions, Irving Sandler, historien de l’art, et Jerry Wind, professeur à la Wharton School of Business (Pennsylvanie).
Moti Shniberg, âgé de 32 ans, a eu l’idée de ce projet en apprenant que les jeunes artistes américains vivaient généralement dans une insécurité financière. Sans protection comparable aux retraites d’entreprise, ils sont privés aux États-Unis des bénéfices du droit de suite, et ne peuvent déduire de leurs impôts la valeur marchande des œuvres qu’ils offrent aux institutions caritatives.
« Les artistes produisent des richesses considérables au cours de leur vie, observe David Ross, et ce programme est censé leur en faire profiter. » David Ross et ses conseillers vont ouvrir une série de fondations régionales, dotées chacune d’un directeur et d’un comité de sélection incitant 250 artistes à y adhérer. Chaque artiste s’engagera à investir 20 œuvres pour vingt ans et plus, selon un échéancier préétabli. Celles-ci seront conservées par la fondation dans des réserves accessibles aux musées et galeries sollicitant des prêts, et figureront dans les expositions et les publications proposées par la fondation. Les œuvres seront vendues à leur cotation la plus haute, en collaboration avec les galeristes des artistes concernés, voire par le biais de ventes privées, de ventes publiques ou de courtiers. Les rentrées financières seront réparties comme suit : 40 % pour le compte de retraite de l’artiste, 40 % pour un fonds commun partagé équitablement entre les 250 sociétaires, et 20 % pour MutualArt, afin de couvrir les frais de stockage, d’assurance et de gestion.
Les œuvres sans valeur marchande seront soit restituées aux artistes ou à leurs ayants droit, soit offertes à des institutions à but non lucratif. Les sommes dégagées seront gérées par une société d’investissement, les artistes gardant le contrôle de leur placement. Ces derniers commenceront à percevoir des revenus vingt ans après le début de leur contrat. « Il suffit que deux de ses 250 artistes atteignent un succès comparable à celui de Chuck Close pour qu’une fondation régionale ait l’argent nécessaire à son fonctionnement, explique David Ross, mais nous pensons plutôt que notre taux de réussite avoisinera les 5 % et pourrait s’élever au double. »
Les artistes en vue soutiendront leurs confrères moins heureux, mais, en allouant la moitié des bénéfices des ventes aux comptes individuels, MutualArt fait aussi profiter chaque artiste de son succès sur le marché.
David Ross a nommé Pamela Auchincloss, galeriste et consultante, au poste de directrice de la fondation new-yorkaise, le comité de sélection étant composé de Clarissa Dalrymple, commissaire d’exposition, et des marchands Jeffrey Deitch, Jack Tilton et Simon Watson. Créée en décembre 2003, la fondation vient de publier une première liste de 24 artistes parmi lesquels Christopher Mir, Lamar Peterson et Chloe Piene, dont on a pu voir pour celle-ci des dessins à la dernière Biennale du Whitney Museum. Davis Ross compte leur adjoindre annuellement 50 artistes jusqu’à atteindre les 250 sociétaires.
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Les artistes américains investissent
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°199 du 24 septembre 2004, avec le titre suivant : Les artistes américains investissent