De Knokke à De Panne, la triennale d’art contemporain « Beaufort 2006 » tient le baromètre de l’art au beau fixe en Belgique.
Confortés par le succès obtenu lors de la première triennale de Beaufort en 2003, qui avait alors accueilli 600 000 visiteurs, le commissaire Willy Van den Bussche et ses partenaires ont remis cette année l’art contemporain en selle avec « De l’art à la côte ». Organisée du 1er avril au 1er octobre sur le littoral belge, cette nouvelle édition s’annonce plus radicale que la précédente, qui était liée au thème classique des marines. Aujourd’hui, trente artistes internationaux amarrent des œuvres monumentales autour des thèmes de l’utopie et du mystère, avec, en figure de mentor pour l’insolite, René Magritte, dont une exposition de peintures est présentée au PMMK, Musée d’art moderne sur mer, à Ostende. Si le parrainage de l’artiste surréaliste et les thèmes un peu « bateaux » de la triennale peuvent laisser sceptique, l’événement se révèle au final convaincant.
Organisateur des triennales de Bruges de 1968 à 1974, et initiateur du PMMK en 1986, Willy Van den Bussche fait preuve de l’expérience d’un vieux loup de mer. Ici, il fonde la triennale sur des choix audacieux et amorce un dialogue subtil qui se décline en deux parcours : le « Beaufort Outside » et le « Beaufort Inside ». Tandis qu’en extérieur les œuvres monumentales dessinent un jeu de piste sur 67 kilomètres de côte, le PMMK accueille des pièces plus incisives des mêmes artistes…
Choix audacieux
Ainsi, l’art se montre sous ses divers aspects, du plus ludique au plus pointu, et interpelle tous les publics. Quand l’artiste David Cerny, par exemple, lâche des immenses poupons de métal noir dans la ville de Middlekerke, le PMMK expose l’une de ses œuvres les plus déroutantes : Shark (2005), un mannequin de Saddam Hussein nu immergé dans un aquarium, pieds et poings liés. De même, l’araignée monstrueuse de Louise Bourgeois, Maman (1999), campe sur la tombe de l’artiste James Ensor et surplombe une petite église mystique de ses six mètres de hauteur. Le commissaire n’a pas non plus feint le mauvais goût en s’immisçant dans les chœurs d’églises pour y prôner l’œcuménisme. À Blankenberge, les médaillons de Ling Jian, parmi lesquels Small Bodhisattva (2003), élèvent un patchwork de beautés parfaites sous le regard du prêtre. Un panneau placé à l’entrée par ses soins rappelle toutefois à bon escient que « Ceci n’est pas un musée religieux ». L’art s’associe à la réalité en pays belge, avec bonheur et humour. « L’art est en lui-même engagé », affirme le commissaire, dont les choix jouent la carte de la provocation.
Willy Van den Bussche n’a pas lésiné sur l’investissement, en réservant un budget de 1 500 000 euros pour la seule production d’œuvres nouvelles. Le commissaire entend aussi promouvoir de jeunes artistes tout juste sortis des Beaux-Arts, telle Kati Heck. Enfin, en 2003, cinq communes avaient décidé d’acquérir les œuvres exposées sur leur territoire. Outre son aspect touristique, la triennale offre donc l’occasion pour l’art de s’installer de façon pérenne sur la côte belge. Ce qui n’est pas le moindre des mérites de l’événement.
- Commissaire général : Willy Van den Bussche - Artistes : Jane Alexander, Monica Baer, Stephan Balkenhol, Jean Bilquin, Andries Botha, Louise Bourgeois, Pedro Calapez, David Cerny, Tom Claassen, Bart De Zutter, Jan Fabre, Nigel Hall, Kati Heck, Ling Jian, Ilya & Emilia Kabakov, Mimmo Paladino, Michael Parekowhai, Giuseppe Penone, Michael Ray Charles, Daniel Richter, Joseph Riera i Aragò, Chéri Samba, Norbert Schwontkowski, Koen Van den Broek, Jan Van Imschoot, Joep Van Lieshout, Luk Van Soom, Zhan Wang, Ai Wei Wei, Luc Zeebroek. - Nombre de villes participantes : 10
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
L’art a la cote
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Du 1er avril au 1er octobre, PMMK, Musée d’art moderne sur mer, Romestraat 11, Ostende (Belgique), tél 32 70 22 50 05, www.2006beaufort.be. Catalogue à paraître courant avril.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°235 du 14 avril 2006, avec le titre suivant : L’art a la cote