Réouverture

La Pinacothèque de Paris à la Madeleine

Par Roxana Azimi · Le Journal des Arts

Le 27 juillet 2007 - 778 mots

Cette structure privée rouvre en juin dans 2 000 m2 appartenant au Crédit Agricole.

PARIS - Après avoir brutalement fermé ses portes en 2004, quelques mois après son inauguration dans le 10e arrondissement, la Pinacothèque de Paris renaîtra le 15 juin dans un bâtiment de 2 000 m2 situé au 28, place de la Madeleine (8e arrondissement).

Des problèmes de copropriété liés aux accès de sécurité ont eu raison de la première version de la Pinacothèque, conçue par Marc Restellini dans les anciens locaux du Musée Baccarat, rue du Paradis. Après deux ans de recherche, l’ancien commissaire d’exposition du Musée du Sénat a découvert ce grand immeuble haussmannien, propriété du Crédit Agricole.

Répartie sur trois niveaux, dont un sous-sol de 600 m2, cette structure privée ouvrira en juin avec une exposition « Roy Lichtenstein », venant de la Fondation Juan March (Madrid). Suivront, à partir du 8 octobre, « Soutine » en coproduction avec le Kunstmuseum de Bâle, puis l’an prochain « Man Ray » et « Pollock et le chamanisme ».

Donné en concession par le Crédit Agricole, ce lieu est financé par une holding composée d’une petite dizaine de collectionneurs européens qui souhaitent garder l’anonymat. Marc Restellini compte aussi sur le lobbying des « American Friends de la Pinacothèque de Paris », en voie de création à Washington sous la houlette de la biographe Meryle Secrest. Dernier atout de Restellini, le magnat japonais de l’immobilier Takahashi a pris en charge les frais de 1,7 million d’euros pour les travaux de décoration et le démarrage du lieu, le gros œuvre étant lui absorbé par le Crédit Agricole.

Ce dispositif a fait grincer pas mal de dents, notamment dans le milieu des conservateurs, un tel lieu pouvant se muer en showroom pour revendre les œuvres exposées. « Aucun des collectionneurs qui me soutiennent ne joue au marchand, assure Restellini. Nous n’avons d’ailleurs aucun marchand dans notre tour de table, pas plus que de mafia russe comme on l’a prétendu. »

Marc Restellini a dû abandonner l’idée de dépôts de collectionneurs, qu’il caressait rue du Paradis. Il compte toutefois monter une collection d’art contemporain, domaine qu’il commence tout juste à explorer. Comment pourrait-il la déployer, alors que la superficie du bâtiment ne l’y autorise pas ? Sans doute à Osaka, où il est en projet avec Takahashi pour un musée de 16 000 m2, prévu en 2009-2010. Dans une logique de mise en réseau de plusieurs lieux sous le label de la Pinacothèque, Restellini prospecte aussi en Chine et à New York pour y ouvrir d’autres relais.

Marc Restellini : controverses et procès

Ambitieux et matamore, Marc Restellini fait grincer les dents. En s’attelant depuis 1997 au catalogue raisonné des peintures de Modigliani sous les auspices de la Fondation Wildenstein, il a ravivé les polémiques.

Initialement programmée pour 2002, cette somme très attendue devrait paraître vers 2008-2009. « Le catalogue de 400 tableaux est fini, nous sommes dans la phase éditoriale, indique l’intéressé. N’importe quel catalogue chez Wildenstein met trente ans à paraître.

Avant, ils travaillaient sur plusieurs catalogues en même temps, maintenant sur un seul à la fois. J’espère sortir le mien après celui sur Marquet. » La guerre qui oppose l’historien de l’art à son principal détracteur, Christian Parisot, fondateur de l’Institut Modigliani, s’est envenimée voilà deux ans. À l’occasion d’une exposition « Modigliani » que Parisot, avait montée à la Bibliothèque Marciana à Venise en mai 2005, Restellini avait déclaré que 80 % des œuvres de l’exposition étaient fausses.

Il s’est aussitôt vu intenter un procès en diffamation. Après avoir été condamné le 6 juillet 2006 par le tribunal de grande instance (TGI) de Paris, Restellini a interjeté appel de ce jugement. La cour d’appel devait rendre son arrêt le 29 mars. Le fondateur de la Pinacothèque de Paris a enfin perdu le 13 février un procès engagé contre la société SVO Art au sujet de l’exposition itinérante des « Chefs-d’œuvre de la collection Rau, de Fra Angelico à Bonnard ». SVO Art, dirigée par Sylvestre Verger, concessionnaire du Musée du Luxembourg au Sénat, s’est vu confier en 2001 l’exclusivité de la production et de l’organisation de l’exposition de cette collection pour une durée de cinq ans. Restellini, qui avait été le commissaire général de cette exposition en 2000 au Musée du Luxembourg, réclamait environ 1,4 million d’euros à titre de dommages et intérêts pour la violation de ses doits moraux sur l’exposition à Portland, des frais de commissariat à Bogota, et enfin pour concurrence déloyale et parasitaire.

Le TGI de Versailles l’a débouté de toutes ses demandes, en concluant que l’exposition de la collection Rau n’était pas une œuvre de l’esprit protégeable par le droit d’auteur.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°256 du 30 mars 2007, avec le titre suivant : La Pinacothèque de Paris à la Madeleine

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