Égypte - Archéologie

ÉGYPTOLOGIE

La découverte d’un bras mort du Nil explique l’emplacement des pyramides de Gizeh

Par Olympe Lemut · Le Journal des Arts

Le 5 juin 2024 - 568 mots

Des archéologues ont découvert un ancien bras du Nil, à l’ouest du fleuve qui aurait desservi les pyramides du nord de l’Égypte.

Égypte. Aujourd’hui situées dans une steppe désertique, les pyramides de Gizeh et leurs voisines ont sans doute été construites près d’un bras du Nil. Un article publié en mai dans la revue scientifique Communications, Earth and Environment avance l’existence d’un bras du Nil qui aurait disparu avec les modifications climatiques au milieu du IIe millénaire avant J.-C. Enam Ghoneim et Suzanne Onstine ont commencé leurs recherches en se demandant « pourquoi la majorité des pyramides sont-elles concentrées dans une zone aride ? ». Il n’était pas logique d’avoir construit les pyramides loin du fleuve puisque celui-ci servait à acheminer les matériaux: la seule hypothèse était l’existence d’un bras du Nil actif sous l’Ancien Empire (à partir de 2686 avant J.-C.) mais disparu. Les auteurs commencent par rappeler que jusqu’au VIe millénaire, le nord de l’Égypte bénéficiait d’un climat humide et de pluies abondantes, permettant au Nil d’avoir plusieurs bras secondaires. Ceux-ci se sont raréfiés par la suite avec un climat plus sec, mais quelques-uns ont continué à couler à l’ouest du lit actuel du fleuve. Les chercheurs ont été confrontés à « l’absence de consensus scientifique » sur le tracé du Nil aux IIIe et IIe millénaires, car le lit du fleuve a beaucoup bougé du fait du volume des sédiments qu’il charriait et des activités humaines sur ses berges. Le Nil s’est déplacé de plusieurs kilomètres vers l’est.

Le tracé d’un bras du Nil reconstitué

L’utilisation de techniques d’imagerie par tomographie électromagnétique et de carottage des sols a permis de retrouver une partie du bras mort du Nil, notamment grâce à l’analyse des anomalies dans les strates géologiques. Le bras mort a été repéré sur près de 64 kilomètres en amont de Gizeh, et les segments explorés montrent une largeur allant de 200 à 700 mètres, ce qui en faisait « une voie d’eau fonctionnelle importante ». Un canal datant de 1911 semble avoir partiellement repris le tracé de ce bras baptisé « Ahramat » (pyramides en arabe), tandis que le lac de Dahchour pourrait être un vestige de ce même bras. Les chercheurs ont examiné plus en détail l’emplacement de certaines pyramides pour confirmer leur hypothèse, notamment la présence d’allées surélevées au pied des temples voisins des pyramides. La plupart des pyramides sont en effet situées dans des complexes architecturaux avec un temple accolé et une voie cérémonielle surélevée : ces voies servaient à transporter vers le temple les matériaux et marchandises venus du fleuve. Les chercheurs rappellent au passage que les temples servaient de ports fluviaux, et leurs recherches ont mis en évidence un lien entre ces voies surélevées et les variations de niveau du Ahramat aux IIIe et IIe millénaires (plus la voie était longue plus le Ahramat était haut). Les études ont aussi révélé des bras secondaires, notamment près de Saqqara et de la nécropole de Dahchour (Ancien Empire) situées aujourd’hui dans une zone désertique : là encore c’est la présence de voies surélevées qui a guidé les chercheurs en parallèle des explorations par imagerie électromagnétique. Avec cette étude, les scientifiques ont donc pu dresser « la première carte de paléo-hydrologie de la province de Gizeh ». L’assèchement du Ahramat est probablement dû à une combinaison de facteurs, dont la désertification et l’apport constant de sable du désert par les vents d’ouest, un facteur toujours d’actualité dans la vallée du Nil.

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°635 du 7 juin 2024, avec le titre suivant : La découverte d’un bras mort du Nil explique l’emplacement des pyramides de Gizeh

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